À Prévost, les parents préparent la réplique

Par nathalie-deraspe

Des élèves otages de décisions administratives

Depuis des années, la commission scolaire doit gérer les débordements de classes et la surpopulation des écoles de son territoire. Mais à Québec, les données ne concordent pas avec la réalité du terrain. Après avoir déplacé quantité d’élèves pour regrouper sous un même toit les secondaires I à V, voilà qu’on s’apprête à chambouler le quotidien de centaines d’autres enfants. Une bataille de chiffres dont les élèves sont les premières victimes.

Le 25 octobre dernier, plus de 400 parents attendaient de pied ferme les responsables de la commission scolaire de la Rivière-du-Nord (CSRDN). Alertés à quelques jours d’une consultation visant à redéfinir les périmètres des bassins d’alimentation des écoles secondaires de la région, ils s’étaient déplacés en masse pour signifier leur attachement à l’école des Hauts-Sommets. Ceux-ci refusent obstinément que leur progéniture finissent leurs études à la Poly­valente de Saint-Jérôme. Si à Prévost, le débat semble plus émotif que nulle part ailleurs,… c’est que l’école, quoique construite à Lafontaine, était d’abord et avant tout destinée à la clientèle en provenance de Prévost. Mais le boom résidentiel des dernières années est venu changer la donne. Dès la première année, l’école était à pleine capacité. Quatre ans plus tard, on compte plus de 300 élèves en trop. Mais s’attaquer au dossier de l’école des Hauts-Sommets, c’est ouvrir une véritable boîte de Pandore. Comme s’il n’est pas suffisant d’assister au jeu de chaises des professeurs, la CSRDN doit constamment défendre ses intérêts auprès du ministère de l’Éducation, des loisirs et du sport. «Dans ses calculs, la CSRDN prévoit un enfant par trois maisons alors qu’au ministère, le ratio est de 1 pour 6, explique la commissaire Sylvie Gaudreault. Et il faut être en débordement pendant 10 ans avant qu’ils acceptent l’idée d’une construction neuve. À Saint-Jérôme, on a été 13 ans en surpopulation avant qu’on accepte de construire une école pour desservir les jeunes en provenance de Mirabel.» À l’époque, l’ex-directeur de la CSRDN, Yves Sylvain, et le maire de Saint-Jérôme, Marc Gascon, ont dû multiplier les efforts et hausser le ton avant de pouvoir enfin obtenir gain de cause.

Comme du bétail

Même si les parents prévostois préfèrent que leurs enfants vivent dans des classes surpeuplées (ils ont failli être 40 dans la classe de sciences cette année) plutôt que de les déménager dans une méga-école (la Polyvalente de Saint-Jérôme et l’école Nicolas-Gatineau sont les deux seuls établissements de la province à compter plus de 3000 élèves), la situation est difficilement supportable pour quantité de jeunes Jérômiens, entassés dans 21 roulottes aux côtés de l’école Cap-Jeunesse ou dans les classes exiguës de St-Stanislas, où ils sont 200 de trop. «C’est un beau témoignage d’appréciation pour l’école des Hauts-Sommets de voir les parents manifester de la sorte, confie le directeur-adjoint de la CSRDN, Marc St-Pierre, mais de dire que la Polyvalente c’est l’enfer, c’est manquer de respect à toute une équipe qui travaille fort pour rehausser le statut de cet établissement.» France Trudeau, qui dirige ce village étudiant depuis mars 2005, tente de se faire rassurante. Malgré une forte population d’étudiants, tout a été mis en place pour sécuriser les plus jeunes et encadrer l’ensemble de la clientèle; l’école est sectorisée et organisée en familles, on a instauré un système de tutorat pour chaque élève, les jeunes ont choisi leur tenue vestimentaire et la bâtisse a subi plusieurs réaménagements majeurs permettant d’atténuer le fait que certaines ailes datent des années ’60. Qui plus est, les élèves réussissent de mieux en mieux. «En mathématiques, les plus faibles ont obtenu 87,6%, soit plus de 20 points au dessus des scores de la province dans les examens standardisés», défend France Trudeau. Même chose au niveau des taux de diplômation, paraît-il.

Pétition et marche

Malgré ces arguments, les Prévostois n’entendent pas lâcher la serviette. Le maire se dit même prêt à bâtir des infrastructures sportives et d’y ajouter quelques classes pour desservir sa population. Des parents ont affirmé qu’ils n’hésiteraient pas à assumer le transport de leurs rejetons matin et soir pour les garder à la même école. D’autres ont même proposé de retenir leurs jeunes à la maison en septembre prochain plutôt que de les envoyer dans une école trois fois plus grande. Le comble, c’est que la nouvelle école de Mirabel sera remplie à pleine capacité dès son ouverture en 2008, ce qui laisse entendre que d’autres réaménagements de population d’élèves sont à prévoir. Et aux tenants qui suggèrent d’humaniser la Polyvalente en y intégrant moins d’étudiants, Marc St-Pierre réplique qu’y ôter 850 jeunes ne réglera pas les problèmes de débordement de l’ensemble du réseau.

Quoiqu’il en soit, les parents entendent poursuivre leurs revendications. En 24 heures, une poignée d’entre eux ont réussi à récolter 391 signatures. Un comité s’est formé en catastrophe pour proposer des solutions de rechange et une marche de protestation est en préparation. De nouveaux arrivants sont d’autant plus choqués qu’ils ont choisi Prévost spécifiquement en fonction de cette école. «Une bonne école, c’est un argument de taille pour l’achat d’une maison, souligne à son tour l’agente immobilière France Rémillard. Sans ça, bien des familles vont décider de s’installer ailleurs.»

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