Ça ne saigne pas

Par Mimi Legault

La chronique à Mimi

mimilego@cgocable.ca
On a tous été choqués par le décès de la petite Rosalie, retrouvée dans un bac à déchets suite à une mort violente. En écoutant cette horrible nouvelle, j’ai eu l’impression de croquer à pleines dents dans un citron.
Parallèlement à ça, je réfléchissais aux enfants qui subissent régulièrement des violences presque au quotidien, mais que personne ne peut arrêter. Que voulez-vous, ça ne saigne pas… Combien de fois dans ma carrière d’enseignante ai-je été témoin de parents qui criaient après leurs petits, qui levaient la main sur eux. Dans certains cas, c’est carrément la fessée.
Des enfants tapés, talochés à l’intérieur des chaumières, il y en a plus que vous ne le croyez.
Je vous donne deux exemples. Fin d’après-midi, une mère vient chercher son garçon de 6 ans à la garderie de l’école, l’enfant visionne un film. Elle jette un coup d’œil à la télé et s’écrie : « Mais c’est un film de violence! ». On lui répond gentiment que la vidéo en question fait partie de la liste autorisée par la commission scolaire. La mère en remet et hausse davantage le ton. Probablement gêné par son attitude, le bambin l’implore pour partir. Alors maman se retourne et lui sert une de ces claques derrière la tête qui ferait avancer l’âne le plus têtu, en ajoutant : « Ta gueule, criss ». Violence!
J’aperçois un jour des marques rouges sur l’abdomen de mon élève Dan qui changeait de chandail après le cours d’éducation physique. Penaud, il m’avoue que sa mère l’a frappé avec le bout d’un parapluie parce qu’il avait laissé traîner une petite auto dans sa chambre; sa mère a pilé sur l’objet, et elle est tombée. Hon! Mais Dan en rajoute! « C’est de ma faute, dit-il, et puis elle était très fatiguée. »
Outrée, je téléphone à la mère et lui dis que la prochaine fois qu’elle le toucherait, je ferais un signalement à la DPJ.
L’histoire ne s’arrête pas là. En revenant de l’école, « môman » en colère contre son fils l’attendait de pied ferme. C’était quelques jours avant Noël. Il m’est nécessaire de préciser ici que les parents étaient financièrement à l’aise.
Sa mère l’amena vers le sapin et lui demanda de choisir deux cadeaux destinés à Dan. Elle les saisit avec plaisir et alla les jeter à la poubelle sous les yeux horrifiés du petit. « Tiens toé! » C’était un vendredi soir. Tel que commandé, Dan prit ensuite la direction de sa chambre pour en ressortir dimanche après-midi.
Le lundi matin, il me raconte sa triste fin de semaine. « Si je me plains encore à toi, ma mère m’a dit qu’on viendrait me chercher pour aller vivre dans une famille très pauvre et que je ne la reverrais plus jamais. »
Il me regarde droit dans les yeux et me dit : « Tu sais quoi, Mimi? Je préfère une bonne fessée, je suis habitué et puis, quand elle me frappe, ça dure moins longtemps que de passer deux jours dans ma chambre ». À partir de ce moment, mon petit Dan s’est refermé comme une huître. Violence!
Je me mets à la place d’un enfant qui hurle de douleur pendant que le parent le frappe aux fesses espérant qu’il comprenne le bon sens. Quelle lâcheté! C’est lui le « cheuf ». « Enwaye » mon Zorro, jette ton pur concentré de rage sur celui ou celle incapable de se défendre. C’est bien plus facile de donner des claques (après tout, on a plus de plaisir à donner qu’à recevoir) que de prendre le temps de s’asseoir pour di-a-lo-guer.
Suite au décès de bébé Rosalie, un voisin se sentait coupable de ne pas avoir alerté qui de droit lorsqu’il a entendu un adulte devenir violent avec la petite. Ne lui lançons pas la pierre, on aurait peut-être fait la même chose.
Chacun préférant vivre pour soi et chier dans le bacul. Excusez ce langage, mais des fois, il faut parler cru pour être entendu. Je ne peux pas marcher dans le beurre sans me graisser les pieds.
Les violents s’en lavent souvent les mains en minimisant leurs actes.
Comme le gars qui répond au juge qui le réprimande parce qu’il a battu sa femme avec une hache : « Oui je l’ai frappée, mais pas avec le boutte qui coupait ». Quand même…
La Terre est peut-être ronde, mais il y aura toujours des cons dans tous les coins.

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