Nouvelle année

Par Jean-Claude Tremblay

Ça faisait longtemps qu’on l’attendait, cette cuvée spéciale « 21 ». Elle était gardée précieusement à bonne température, dans l’anticipation de son ouverture, prévue quelque part après le 31 décembre dernier.  Voilà que l’on vient à peine de déboucher l’élixir au cépage d’espoir, que l’on remarque que la robe est anormalement marron… et que le nez… est nettement vinaigré ! Doit-on craindre le pire ? Est-ce que cette nouvelle bouteille est de la même production que le dernier millésime de « piquette » issue des vendanges 2020 ?!

Est-ce que je rêve, ou quand je suis allé me coucher la dernière journée de l’an dernier, je pouvais encore sortir mes vidanges deux fois par mois, faire le fou en allant me chercher du lait au dépanneur à 20h05, et me consoler parce que tout allait (finalement) rentrer dans l’ordre pacifique-ment aux États-Unis ? Suis-je le seul à se sentir un peu comme Marty McFly dans le premier « Retour vers le futur » ? Vous savez, la dernière scène du film, celle où il se réveille momentanément soulagé, car il croit que tout ce qui vient de se passer n’était qu’un cauchemar à oublier ?

La suite

Au moment d’écrire ces lignes, nous ne sommes qu’à quelques jours de l’assermentation du nouveau président américain. Un passage singulier qui se fera à huis clos, dans des conditions surréalistes, dans une ville assiégée par l’armée, résultat de mesures devenues nécessaires après la pitoyable entrée meurtrière par les supporters du président sortant dans le Capitole, l’équivalent de notre Parlement.

Je ne pensais jamais un jour que la proposition de « s’injecter du désinfectant » deviendrait plutôt banale comparer au reste.  Incitation à la violence, menaces, intimidation, ordre présidentiel de pardonner en express des criminels, et le tout, tranquillement assis sur la mallette qui contient les codes nucléaires pouvant tout faire sauter. Entre cette situation et la crise sanitaire mondiale qui, nous le voyons bien, s’est transformée en crise socio-économique majeure, nous vivons tous un moment historique – un dont nous sommes les témoins, mais dont nous pouvons aussi être les acteurs pacifistes.   

L’espoir

Malgré ce constat accablant et les souffrances bien réelles, je ne peux m’empêcher de croire qu’il n’y a pas de hasard, et que les leçons viendront lorsque nous serons prêts à les accueillir. Grâce à ce qui se passe présentement sur la planète, d’importantes réformes verront le jour, qui, il faut y croire, amélioreront le sort de plusieurs de nos semblables. Par ailleurs, y a-t-il une autre façon de le voir si l’on veut demeurer sain d’esprit ?

Lorsque l’on a le visage placardé sur l’arbre, il est difficile de voir la forêt, mais je sais que ce moment viendra.

D’ici là, il faut se demander ce que l’on peut faire pour aider nos proches, nos jeunes et nos moins jeunes, nos malades, notre personnel soignant, nos proches aidants, nos enseignants, nos commerçants, ainsi que tous les autres pour qui ce n’est pas évident. Vous savez l’astuce que j’ai développée au fil des années, une qui m’a aidé à passer à travers les moments les plus ardus de ma destinée ?  J’arrête de recenser et de mettre l’emphase sur mes propres malheurs, et je mets toute mon attention sur les autres, en leur demandant comment je peux les aider – la prime, c’est que faire du bien aux autres…nous fait du bien à nous-mêmes, et se sentir utile apaise l’âme : tout le monde gagne.

L’humain a besoin de remettre les compteurs à zéro, c’est pour ça que nous avions hâte de tourner la page au 31 décembre, c’était hautement symbolique. Nous n’étions évidemment pas dupes, nous savions que le premier janvier n’allait pas tout changer, mais ç’a été notre façon de nous protéger – de mettre notre cerveau en mode « roupillon », en se permettant un moment de dissonance cognitive assumé, histoire de se créer cet espace mental tant recherché.

Il reste des défis, mais j’ai confiance en nous, en nos valeurs d’entraide et de solidarité, en nos grandes capacités d’adaptation, et notre pouvoir de créativité – contrôlons ce que nous pouvons contrôler, et veillons à donner au suivant, dans le seul moment qui compte vraiment, le présent.

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