Belle Océane
Par Rédaction
Ça fait déjà quelques semaines que la vie de la belle Océane, 13 ans, a été fauchée tragiquement. Lachute, c’est mon patelin. J’y suis née, j’y ai grandi, Enfance heureuse, adolescence itou. Je demeurais à deux pas de l’église; j’étais présente aux funérailles.
Pour écrire ma chronique, j’avais besoin de vivre leur peine, de ressentir l’émotion mise à nue, de m’imbiber de leurs larmes. Je pensais revenir avec mon bloc-notes rempli de pensées. Pas assez de mots mais trop de maux. L’église était remplie : des ados collés les uns aux autres, des amis aux yeux rougis, des proches dévastés. La grande sœur le frère, le père et la mère tous discrets, généreux d’accueil à la porte de l’église qui recevaient à bras ouverts les condoléances méritées.
Des centaines de gens ont défilé devant la photo de cette enfant souriante qui comme l’abbé célébrant l’a si bien dit : une p’tite boule d’énergie qui mordait dans la vie à pleines dents. On se pince, on se dit que c’est pas vrai, qu’on va se réveiller de ce cauchemar. Une histoire comme Le loup et le petit chaperon rouge. Mais les loups ne vivent pas tous dans les bois. Certains sont même bipèdes. Et comme ils ne vivent pas en meutes, on n’y prête guère attention surtout si les proches le voient comme un animal domestiqué… Au fond, ce n’est pas la vie qui est trop courte ce sont certaines gens sur notre chemin qui sont trop petits…
Une cérémonie à l’image de cette ado décédée mais si vivante en même temps. J’ai profondément apprécié ce prêtre et pourquoi pas le nommer : Robert Lemire. Le genre de bonhomme qui vous donne envie de croire en Dieu. Qui a mis le Seigneur dans son pack-sack et qui le traîne partout avec lui. Des phrases comme : Dieu refuse la souffrance, la mort. Dieu ne nous punit pas. Mais quand on ne vit pas dans l’Amour, on vit dans la merde. Il n’a pas dit le mot merde, il a dit pire. Les ados l’écoutaient religieusement, c’est le cas de le dire. L’abbé Lemire n’a pas lévité avec des mots de monseigneur. Une simplicité volontaire du cœur. Lorsqu’il s’est présenté devant nous, il a dit tout de go : moi aussi j’suis en beau joual vert!
Un ami d’Océane a écrit une chanson pour elle, il est venu chanter son refrain accompagné de sa guitare. Tu es partie sans avertir… Son best friend Jérémy lui a écrit une lettre. Trop ému, un adulte est venu à sa rescousse lire ce mot pour traduire ses émotions.
Une autre de ses copines est venue parler au micro au nom de toutes les autres. Océane, cette semaine, chacune de nous s’est fait tatouer ton prénom, tu seras toujours avec nous désormais.
Puis l’abbé est revenu avec son message d’espoir : on ne regarde plus en arrière, c’est trop écoeurant, faut pas rester dedans parce que si on reste là on reste en cr…. J’ai regardé mon amie Pipo : a-t-il vraiment dit ça? Elle a fait oui de la tête. Eh ben, que je me suis dit, il parle pour se faire comprendre. J’en avais gros sur le cœur contre ce monstre. L’Humain est parfois tellement bêbête qu’une violence répétée finit par lui paraître un droit. Mais lorsque j’ai quitté la cérémonie, je n’étais plus la femme en colère. L’abbé nous a fait comprendre qu’Océane ne sera jamais morte tant qu’il restera au moins une personne pour penser à elle. L’aigle n’engendrera jamais la colombe…
Paix à toi Belle Océane.