L’Homme s’ennuie

Par Mimi Legault

La chronique à Mimi

Des fois, il me faut un GPS pour suivre l’Homo Sapiens modèle 2018. Malgré tout le modernisme et peut-être même à cause de ça, l’Homme s’ennuie profondément dans sa chaumière. Il fait joujou avec la Terre à coups d’excès de CO2 et de plastique (entre autres), et finit par s’en lasser. Il vise alors d’autres planètes, Mars ou la Lune, s’en fout finalement, pour aller « domper », vidanger ses surplus terriens qu’il emportera avec lui craignant de… s’ennuyer.

L’Homme s’embête dans son char mon Gérard. Il roule sa vie à pleins gaz et parfois « crash » son bolide. Sa radio « décibel » son ouïe à fond la caisse. Pas grave s’il a les facultés affaiblies, il les avait bien avant ses leçons de conduite. Son plaisir est de raccourcir sa vie et celle des autres. Ça lui donne un taux de testostérone un peu plus élevé sans avoir à souffler dans la « baloune ». Et lorsque la « clisse » de solitude devient sa passagère, vite il reprend son petit écran et texte sa vie en roulant vers l’éternité.

Ce chasseur de mammouths tue le temps. Il conjugue sa vie au passé décomposé et au futur pas si simple que ça. Se croit plus que parfait. Mais jamais au grand jamais, il vit le présent. Maintenant. Il étire, étire, étire ce temps et soudain, l’élastique pète. Pas grave, ce sera la faute de l’élastique.

L’Homme s’emmerde dans sa maison surhypothéquée remplie de cossins nouvelle vague. Pourtant, croit-il, il ne lui manque rien : le chalet, le bateau, le sea-doo.  Étant certain cette fois de trouver enfin le bonheur, il achète l’inutile croyant qu’il ne peut s’en passer. Quelques années plus tard, on retrouve la pancarte devant sa maison cossue : vente de garage.

L’Homme en a assez de ce vide qu’il remplit dans un seau d’eau troué. Il le comble en sniffant sa jeunesse. Il « crack » pour ce monde artificiel à l’hôtel « Héros Inn » où on le reçoit à bras ouverts pourvu qu’il ait du fric. Grâce à Justin, depuis le 17 octobre, l’Homme se rend à la SQDC pour acheter son cannabis en toute liberté. Ce n’est pas beau ça ?

L’homme d’aujourd’hui « facebook » ses amitiés. Certains en comptent 2488, d’autres davantage. Il n’est plus seul même s’il en connaît à peine une dizaine. Quand il est en manque de joie de vivre, il se rend au Drug Store parfois appelé pharmacie Jean-Coutu acheter quelques comprimés antidépresseurs ou des calmants pour son âme esseulée et qui sait, il y trouvera peut-être même un ami.

C’est un chef de file. Oui oui. Il fait la file pour les meilleurs billets au Centre Bell, pour être l’un des premiers à la SQDC et même pour l’ouverture d’un IKEA. Il déclare présent pour coucher dehors devant un Future Shop pour acheter son deuxième écran plasma. Grosse télé, p’tite vision. Allez comprendre alors pourquoi sa très grande patience fond comme neige (en poudre) lorsqu’un client du supermarché n’est pas dans la bonne file pour la caisse rapide… Il gueulera comme un écarté.

L’Homme (on s’entend ici que je vise et l’homme et la femme…) s’embête au point de ne plus savoir quoi inventer sur les réseaux sociaux. Avec son amie Anne Nonyme, il écrit des textes haineux à tous ceux qui « l’énarvent » : à son ex, aux chroniqueurs, à plus nobles que lui, bref, il fait feu dans toutes les directions. Il éprouve un plaisir fou le temps que ça dure. Mais c’est toujours à recommencer.

L’hiver, l’Homme un peu yéti et ben gelé (même l’été) vide son compte ou remplit sa carte de crédit, c’est selon, pour débourser quelques billets bruns via Cuba ou le Mexique pour rougir cette peau trop blanche. Il a les blues et des idées noires, ça lui fera du bien.

Rendu à l’âge des métaux (dents en or, cheveux d’argent, pacemaker en titane), l’Homme connaît véritablement l’ennui. Placé pour son bien en résidence, la grisaille de l’âme le ronge d’une façon telle qu’il meurt d’ennui. Un jour, il se penche un peu trop courbé sur son passé. Bang! Il tombe lourdement dans l’oubli.

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