Peur inc.
Les vrais rebelles sont «dans le champ»
Bush s’en-«(re)va»-t-en-guerre; il s’en-«(re)va»-t-en-guerre, cette fois-ci, pour les législatives du mois prochain et le contrôle de la Chambre des représentants et du Sénat. Vous rappelez-vous cette image de Colin Powell agitant, en point de presse, de petites fioles, destinées à convaincre l’opinion publique que des armes bactériologiques se trouvaient en Irak? Un désastre plus tard, la peur est de nouveau au centre de la stratégie républicaine, dans la course aux votes. Plusieurs spots publicitaires télé montrent en boucle ben Laden…
La peur fait vendre. Non seulement des votes, mais aussi des films, des journaux, des ouvrages, des stations de radio, des émissions de télé, des frigidaires extra-larges et de la bouffe en conserve, des cours d’auto-défense. Des bunkers, aussi. Et des pepper- spray. La peur fait vendre des maisons dans des domaines fortifiés, réservés aux 50 ans et plus et sans enfants. La peur fait vendre de l’assurance et des REER. La peur fait vendre des chiens d’attaque et des systèmes de protection.
La peur fait vendre aussi des suppléments vitaminiques. La peur est le nouveau klondike du marketing, aux côtés des industries de la beauté, du mieux-être, du bien-être, des livres de psycho-pop.
Et vendre enfin des lois anti-terroristes, et la panoplie des produits bio, qui sont, toutes, des réponses à la terreur ambiante.
Il faut se méfier des réactions rapides, presque instinctives, prises dans l’urgence, en mode «terreur».
Dans le mot «terreur» se terre le mot «erreur».
Les vrais rebelles seraient dans un champ, dis-tu, Josée, en train de faire pousser paisiblement des chèvres? Je te l’accorde, l’image est jolie…
D’accord, nous jouons aux apprentis-sorciers depuis des lustres; les OGM sont la pointe de l’iceberg qui nous fondra dessus demain.
Mais pourtant non, les vrais rebelles d’aujourd’hui sont les mêmes qu’hier: ils sont ceux qui savent penser, qui savent interroger – mais tu le sais déjà, toi qui n’ingurgites pas que du thé vert et du lait aux oméga-3, mais aussi trois ou quatre bouquins par semaine. Les vrais rebelles savent penser. Ils sont les derniers vivants, ceux qui savent nommer. Qu’ils s’empiffrent de McDo, et qu’ils meurent bientôt, n’y change rien.
Les vrais rebelles seraient dans un champ, dis-tu, Josée, en train de faire pousser paisiblement des chèvres? Je te l’accorde, l’image est jolie…
Mais elle engraisse une industrie déjà obèse.
En passant, ton lait, il ne sentirait pas un peu le poisson par hazard?