She’s (too?) Hot?

Par Éric-Olivier Dallard

«Une femme sans parfum est une femme sans avenir.»
– Coco Chanel

Elle était féministe, Coco Chanel. Les premiers tailleurs masculins adaptés aux femmes, c’est elle. Le port fier du pantalon par les femmes, c’est elle…

L’importance de ce fait?: l’habit ne fait-il pas le moine?

Elle était féministe, Coco Chanel. Et une femme d’affaires aguerrie. Pourtant cette citation: «Une femme sans parfum est une femme sans avenir»…

On s’émeut de la couverture médiatique ayant toujours entouré Paris Hilton? Plus encore ces jours-ci où les proportions deviennent… hors de proportion?

Et même Josée, mon éditrice, qui s’y met! Le pire, c’est que je sais bien que l’envie n’a rien à voir avec sa sortie: cette femme-là a l’habitude des belles… d’ailleurs, elle en a une dans son miroir… Habituée, j’vous dis. Donc, si ce n’est pas la jalousie qui parle dans son Espace griffé de la semaine, serait-ce la raison, le sens critique?

Pendant les Fêtes, cet hiver, je me suis tapé la biographie de Jacques Courtin (Une réussite en beauté ou la fabuleuse aventure de Clarins, éd. JC Lattès, 2006), le fondateur français de la maison Clarins (les produits de beauté) – décédé d’ailleurs ce printemps. Sur le quatrième de couverture, ces mots: «Des secrets pour être belle, des secrets pour réussir… le bonheur.» Notez les mots, allitération employée en apposition, figures de style renforçant le propos: belle et bonheur. On est à l’aube du troisième millénaire, et toute la question est là. Et la réponse surtout.

La féminité, et même seule, sa simple mise en valeur, sans autre type de «démarche» ou de «propos», suffit. Son existence – et l’exposition médiatique de cette existence qui lui donne sa plein résonance – constitue en elle-même un discours, un point de vue. Qui demeure, malgré les grands idéaux et les beaux discours, fascinant. Une fascination qui opère – et c’est là l’universalité de la chose – autant chez les femmes que chez les hommes.
«Chez les femmes»?! En introduction à sa bio, ces propos de Courtin sont rapportés: «Je suis heureux d’avoir rendu plus riches ceux qui m’ont fait confiance en achetant mes actions. Je ne compte plus ceux qui me disent: “Ma maison de campagne, je devrais l’appeler Clarins…” Ça me touche beaucoup.»

Ce ne sont pas les hommes qui ont rendu Courtin et les actionnaires de Clarins riches.
(À savoir par contre si c’est le regard des hommes qui fait que les femmes consomment à un rythme effréné les élixirs de beauté – et donc qu’en définitive ce sont les hommes qui ont rendu riches les maisons de produits de beauté – c’est une autre histoire; je ne peux penser que 40 ans de féminisme n’auraient pas, à ce compte, tué l’engouement… les racines sont plus profondes… La popularité des poupées Barbie n’a jamais décru.)

Paris Hilton et ses frasques et son exubérance et son je-m’en-foutisme et son dédain des qu’en-dira-t-on est une part de cette féminité qui fascine, dont je disais qu’elle constitue en elle-même un discours. Une part que portent aussi les hommes, bien sûr, mais qui, dans leur cas, ne suffit pas (comme l’écrit Josée: si «Paris» s’était appelée «Johnny», pas un chat ne se serait pointé à sa sortie de tôle!).

Bien sûr, il y a des dérapages à tout cela… Si je ne suis ni surpris ni outré de l’engouement suscité par Paris, je le suis de petites choses qui, elles, selon moi, contribuent vraiment à rendre «le monde un peu plus laid»; de petites choses comme ces mots sur le site internet de Holt Renfrew (oui, oui, la célèbre et snobinarde enseigne): «Playboy Beauty – Qui connaît les femmes splendides mieux que le magazine Playboy? Grand connaisseur de sex-appeal depuis plusieurs décennies, Playboy se lance dans l’industrie de la beauté avec Playboy Beauty, sa première incursion avant de lancer une gamme complète de produits de beauté. Playboy a créé une palette de nuances variées, composée de produits sensuels et luxueux pour le visage, les yeux et les lèvres, présentés dans un emballage des plus séduisants. Essayez-les ou offrez en cadeau (…)!» Chez Holt Renfrew!

Playboy chez les guindés, Playboy comme une tendance mainstream, Playboy comme si c’était Wallpaper ou L’Actualité: c’est cela que l’on doit questionner…
«Dérapage»? Contribuant à rendre «le monde un peu plus laid», cette banalisation de Playboy?… C’était dans la presse nationale il y a deux semaines: les chirurgiens plasticiens soulignaient le nombre grandissant de femmes qui se présentent dans leurs cabinets pour une «chirurgie de la vulve», demandée strictement pour raisons esthétiques… Une opération qui a le vent dans les voiles actuellement. Imaginez: les femmes arrivent chez leur chirurgiens avec une édition de Playboy ou Hustler, comme elles iraient chez leur coiffeur, un numéro de Vogue à la page cornée: «C’est cette couleur de mèches que je veux!»

Oui, imaginez… Rendre «le monde un peu plus laid», c’est cela.

Paris Hilton, donnons-lui cela: elle ne sent pas le vent, d’où il vient, où il va. Elle est le vent. Elle n’est pas le vent, elle est la tempête. Elle n’est pas la tempête, elle est un ouragan. Beaucoup de vent, justement, un bruit assourdissant, surtout du vent… mais l’air qu’elle déplace, la blonde héritière!
«Une femme sans parfum est une femme sans avenir», disait Coco Chanel… Paris a lancé récemment la frangrance Heiress («Héritière»).

Elle a de l’avenir.़

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