Comme un poème

Par Frédérique David

Elle est arrivée dans mes bras un jour ensoleillé d’août 2023. Le mois s’annonçait pourtant gris et pluvieux, mais ça prenait un rayon de soleil pour accueillir ce petit être qui allait faire de moi une grand-mère, pour la première fois! On ne réalise pas tout de suite bien ce que cela signifie. Cet enfant-là n’est pas le mien, je ne l’ai pas porté dans mon ventre. Mais il est l’enfant de mon enfant, celui que j’ai mis au monde pour la première fois il y a 27 ans. Le temps file si vite! Les mêmes gestes se répètent autour des nouveaux parents, les mêmes bruits d’hôpital, les mêmes routines, les mêmes apprentissages, les mêmes inquiétudes, les mêmes questionnements. Tout ressurgit de ma mémoire avec précision, comme si c’était hier. « Oh, où sont passées nos plus belles années? / On s’éloigne lentement / Où sont passées nos plus belles années? / L’avenir nous les rend », chante le slameur et poète Grand Corps Malade (GCM).

Il y a eu les joies, les peines, les rires, les premières découvertes et ta petite main dans la mienne comme celle de ta fille aujourd’hui. J’avais presque oublié cette sensation de douceur, d’abandon, d’amour inconditionnel. Il y a eu les premiers pas, mais surtout les premières descentes en ski qui te rendaient si fier. Je me souviens de mon étonnement quand j’ai retiré les petites roues de ton vélo et que tu as filé d’un trait sans que je tienne ta selle. Il n’y a pas eu de première fois ce coup-là! Tu étais toujours pressé de grandir et même de prendre l’avion tout seul à 7 ans pour traverser l’océan! Tu crois que ta fille jouera avec les voisins dans la rue, beau temps mauvais temps, à bâtir des forts, des pistes de vélo, de l’imagination, de la débrouillardise et des rêves? L’insouciance des parents semble avoir été anéantie par une anxiété médiatique et généralisée. Je ne vois plus d’enfants dans les rues le soir. La pandémie les a remplacés par des chiens qui promènent leurs maîtres. Ça fait partie des nostalgies qui nous font sentir vieux!

Donner la vie relève aussi du miracle. On ne peut que s’émerveiller devant ce petit être qui respire, réagit, s’exprime, ressent. « On a fait ça toi et moi? », t’a dit ton amoureuse encore étonnée. Et moi de penser que ce petit cœur qui bat vient de toi. Toi qui m’a fait vivre des nuits d’insomnie quand ton cœur à toi s’accrochait à la vie dans ton petit lit d’hôpital il y a 25 ans. Toi qui devient papa deux ans après avoir perdu le tien. Ainsi va la vie qui va. Les joies viennent apaiser les épreuves. « Un passé composé d’événements imparfaits / Un passé pas si simple, des sourires en trophées / Puis la mélancolie, je la mêle au présent / C’est la belle embellie des souvenirs apaisants / Et les belles années, même en point de suture / Je vais les amener visiter mon futur » (GCM).

Aujourd’hui, ma petite fille, tu nais avec toute ta tendresse et ton innocence. Tu n’es que douceur. Tu nais comme un poème, dans ce monde en grand chamboulement. Tes sourires et tes petits gestes remplissent nos journées de bonheur et de sens. Nous saurons t’accompagner dans tes convictions, tes choix. Tu as le droit d’être toi. Tu peux aimer le rose, le foot ou les camions. Tu peux t’exprimer haut et fort. Ta venue a dissipé les nuages sombres. Tu es espoir d’un monde meilleur. Le nôtre l’est déjà avec toi. En attendant crie fort, ris et mords dans la vie. Parce qu’elle est belle aussi. Surtout avec toi!

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