La maison brûle

Par Frédérique David

Plus de 440 feux de forêt ont déjà été enregistrés cette année au Québec, alors que la moyenne annuelle à cette période est de 207. Bien sûr, les théories complotistes ont envahi les réseaux sociaux accusant le gouvernement d’avoir volontairement déclenché les feux au Québec. Dans les faits, la seule responsabilité qu’on peut reprocher au gouvernement, quand on lit tous ces complotistes, c’est de ne pas investir assez en éducation ! Quant aux feux, ils ont bel et bien été déclenchés par la foudre. Des météorologues ont réussi à le prouver en observant les images satellites et les radars du 1er juin dernier, date à laquelle les feux ont débuté. Tout concorde. La sécheresse de la nature était élevée au mois de mai. De plus, plusieurs pins sont desséchés par des parasites. Les éclairs parviennent donc facilement à déclencher des incendies. D’ailleurs, contrairement à la France où la plupart des feux sont déclenchés par la négligence humaine, ceux du Québec ont pris naissance dans des zones inhabitées et inaccessibles.

Le réchauffement climatique

Les théories du complot permettent de ne pas voir ce qui devrait tous nous préoccuper : le réchauffement climatique qui est la principale cause de tous ces feux et, surtout, nos décisions individuelles et collectives qui l’alimentent depuis des décennies. Une étude publiée en 2014 dans le journal Science révélait que le réchauffement climatique multiplie le nombre d’éclairs. Tiens donc ! Pour chaque degré de réchauffement global en plus, les chercheurs ont calculé 12 % de plus d’éclairs. Dernièrement, tous les scientifiques et les spécialistes en environnement abondent dans le même sens. Nous sommes arrivés à l’aube de cette nouvelle ère qui impose des changements drastiques.

Notre aveuglement

Aujourd’hui, les brasiers se multiplient. Nos forêts brûlent autour de nous et on vaque à nos occupations polluantes, plus préoccupés par notre petit confort matérialiste que par le sort de notre planète. Les pompiers s’en occupent. Ils sont forts les pompiers !

On trouve même le moyen de réitérer notre confiance à l’égard d’un gouvernement qui se soucie tellement peu de l’environnement qu’il ne voit rien d’absurde à parler de transition énergétique à côté d’un Hummer électrique ! Et la célèbre déclaration d’un de ses ministres, « Lâchez-moi avec les GES ! », en dit long sur ses intentions d’agir pour réduire notre impact environnemental.

Pompières et pyromanes

C’est le titre de l’essai de Martine Delvaux que je suis en train de lire. Drôle d’adon ! Ce livre, elle l’a écrit pour sa fille et les gens de sa génération. Sa fille qui a le même âge que ma fille et qui, comme elle, dit qu’elle n’aura jamais d’enfant. Parce que nos jeunes n’ont plus d’espoir dans ce monde qu’on laisse brûler ! Martine Delvaux qui s’est fait accuser d’être pyromane, parce qu’elle n’hésite pas à dénoncer. Martine Delvaux dont je savoure tous les écrits tant ils allument mes préoccupations sociales, environnementales et de maman. Comme moi, ses espoirs sont tournés vers les jeunes qu’on ne veut pas écouter. « On préfère vous penser capricieux.ses plutôt que d’admettre qu’on ne veut rien entendre de vos cris. De vos demandes. Qu’on n’en a rien à faire de votre exigence. De votre lucidité. De vos paroles impitoyables de vérité », écrit Martine Delvaux.

La figure emblématique de cette génération, Greta Thunberg, n’a-t-elle pas été celle qui s’est fait le plus critiquer et insulter sur la place publique ? Pourtant, elle ne faisait qu’annoncer ce qui est en train d’arriver. « Je suis là pour vous le dire : notre maison brûle. Quand votre maison est en feu, vous ne vous assoyez pas pour discuter de la jolie rénovation que vous pourrez faire une fois le feu éteint », déclarait-elle. Qu’a-t-on fait depuis ?

Comme Martine Delvaux, je crois qu’il est temps d’écouter cette génération qui regarde le monde en face et qui ne parvient plus à rêver. Il est temps de réparer ce monde qu’on leur laisse et d’assumer nos responsabilités, parce qu’on a choisi de les mettre au monde. Comme le dit si bien Martine Delvaux : « Dorénavant et à jamais, ma pensée sera tournée vers ce qui brûle. Ma tête, mon cœur et mon âme en flammes. Il faut combattre le feu par le feu. »

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