(Photo : Courtoisie Louise Arbour)

Les municipalités à l’heure des poules

Par Simon Cordeau (initiative de journalisme local)

En avril dernier, la Municipalité de Piedmont a prolongé jusqu’au 31 décembre 2024 son projet pilote qui autorise la garde de poules urbaines. « Avec les nouveaux règlements d’urbanisme, on va évaluer la pertinence de le mettre dans le règlement officiel », avait déclaré le maire, Martin Nadon. Dans la région, plusieurs municipalités autorisent déjà les poules, dont Morin-Heights, Prévost, Saint-Colomban, Sainte-Adèle, Saint-Sauveur, Sainte-Sophie, Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson, Saint-Jérôme, Val-David et Val-Morin.

Mais certaines municipalités les interdisent toujours, au grand dam de Louise Arbour, qui milite activement pour étendre leur légalisation. « C’est la mission de Poules en ville depuis plus de 12 ans. J’ai travaillé avec 150 municipalités et j’ai été mandatée par l’Union des municipalités (UMQ) pour donner des formations aux cadres et aux élus. »

Mobilisation citoyenne

Selon Mme Arbour, les municipalités ont à leur disposition toute l’information pour légaliser les poules. « L’ensemble des normes est assez similaire d’une municipalité à l’autre. Ça n’implique pas de gestion, de coûts, d’efforts ou de ressources supplémentaires pour la ville. C’est très simple à mettre en place. »

D’ailleurs, la poule a été mise dans la case des « animaux de ferme », mais il s’agit plutôt d’un animal domestique, explique l’experte. « Il y a un manque de connaissances et de clarté, des préjugés et des mythes qui vont souvent empêcher un groupe d’élus d’aller de l’avant. Ou ils n’ont pas le temps de se mettre le nez dans le dossier. Donc il faut que les citoyens militent. »

L’oeuf ou la poule ?

Pourquoi voudrait-on des poules chez soi ? « La raison première, c’est pour avoir des oeufs frais et de qualité », indique Mme Arbour. Toutefois, le rendement varie d’une race à l’autre, et il existe « plus de 300 espèces pondeuses ». L’experte recommande les poules hybrides, qui proviennent de couvoirs ou de magasins agricoles. « Elles sont vaccinées, dociles, faciles et résistantes au froid. » Ces poules rousses pondent un oeuf par jour, toute l’année durant.

« La deuxième raison, c’est d’avoir un animal de compagnie. Même si les poules ne pondent plus, plusieurs les gardent comme animal domestique ou pour la zoothérapie. Ce sont des animaux très intéressants et intelligents, selon les races. » Les poules ne demandent pas beaucoup d’entretien quotidien et peu de supervision. Ça peut aussi être l’occasion d’enseigner aux enfants la compassion et l’empathie.

L’experte souligne cependant que ce n’est pas la même chose qu’adopter un chat ou un chien. « Il faut bien comprendre leur comportement et que ce sont des animaux grégaires. » C’est pourquoi les municipalités autorisent entre trois et cinq poules : elles doivent vivre en groupe pour rester heureuses et en santé. Et on n’a jamais de coq, pour éviter la reproduction, les désagréments sonores le matin et pour une question de sécurité. « Ils peuvent être dangereux et attaquer les humains », précise Mme Arbour.

Plusieurs municipalités exigent d’ailleurs une formation, avant d’avoir des poules, pour éviter la cruauté animale. Que ce soit pour éviter les maladies et leur prodiguer des soins, s’assurer qu’elles sont confortables l’hiver, ou intégrer de nouvelles poules au groupe sans créer de bagarres, il est facile de commettre des erreurs. « C’est important de faire des choix éclairés, de connaître les avantages et les inconvénients. Il y a tout un savoir-faire », insiste l’experte.

Sécurité alimentaire

Pour Mme Arbour, les poules pondeuses s’inscrivent également dans l’idée du développement durable et de l’autonomie alimentaire. « C’est un point auquel je tiens beaucoup. On est extrêmement vulnérables face à l’industrie agroalimentaire et aux changements climatiques. » En contrepartie, les oeufs frais, riches en nutriments et en vitamines, sont « l’aliment par excellence ». « Tant qu’on a trois ou quatre poules, on aura toujours une sécurité alimentaire », plaide-t-elle.

Cela dit, on n’adopte pas des poules pour sauver de l’argent, souligne Mme Arbour. Déjà, un poulailler assez grand peut coûter de 7 000 à 8 000 $. « C’est un investissement important. » Il faut aussi compter les fournitures et la moulée pour les nourrir. « On ne passe pas nos restes de table à nos poules : c’est un mythe. Elles doivent fournir un oeuf par jour, donc il faut une bonne moulée, bien équilibrée, qui compte pour 90 % de leur alimentation. »

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