Deux femmes qui mènent

Par Martine Laval

Josée Pilotte et Mary-Josée Gladu, éditrices d’Accès

À la question : D’où vous est venu cet élan, à Mary-Josée et à vous, de lancer un journal? Que croyiez-vous que vous alliez apporter de différent dans le milieu des médias écrits? Josée Pilotte, propriétaire et éditrice du journal Accès répond:

Marine Laval

«On avait toutes les deux travaillé plusieurs années dans un autre journal et on essayait de faire passer des idées, d’innover, et comme le milieu dans lequel on opérait était plutôt conventionnel, il y avait moins de place pour la créativité. Suite à un conflit de travail, et par la force des choses, on s’est retrouvées toutes les deux, Mary-Josée et moi, à se dire qu’on avait envie de relever le défi de démarrer un journal à nous.

Si on regarde ça avec le recul, la vie nous a forcé à nous questionner, à prendre le taureau par les cornes et à foncer…un peu les deux yeux fermés à l’époque, sans trop réfléchir. On avait la capacité de le faire et aujourd’hui on se rend bien compte que ça fait partie de nos personnalités d’avoir le guts d’entreprendre une telle aventure. Nous sommes heureuses aujourd’hui d’être nos propres patronnes et on se sent bien dans cette situation de leadership. De dire que c’était planifié, qu’on avait fait un plan d’affaires, qu’on avait mûrement réfléchi, non. On a saisi l’opportunité au vol et on a appris sur le tas au fur et à mesure qu’on avançait.

Toute cette liberté a eu un prix à payer par contre. C’était très audacieux il y a 13 ans de partir son propre journal dans un milieu contigenté, parce que Quebecor et Transcontinental étaient tout de même présents et avaient la majorité du marché québécois. Dès notre première sortie du journal, on entendait des commentaires qui signifiaient qu’on ne nous donnait pas grand temps à vivre, qu’on ne pourrait pas survivre parce qu’on n’avait pas vraiment de financement et j’en passe. On a tout entendu et le milieu attendait en fait qu’on se casse la figure.

Nous étions des femmes, nous étions jeunes, tout était à bâtir, aussi bien l’entreprise que la confiance du milieu des affaires. Les gens reconnaissaient qu’on avait du guts mais encore aujourd’hui les gens nous observent et se demandent comment on arrive à survivre, comment on fait pour durer.

La réponse est qu’on croit en ce qu’on fait, qu’on est fières de notre produit, qu’on a su bien s’entourer, qu’on a mis la créativité de l’avant, qu’on a toujours fait de la place aux artisans qui voulaient travailler avec nous. En engageant les gens ont leur demandait s’ils étaient prêts à faire la différence avec nous, parce qu’on croyait faire la différence.»

Accès, c’est le journal indépendant qui n’a pas peur de tenir certains propos, de parler de certains sujets, qui a une approche particulière dans le traitement de son information, qui n’a pas peur de dénoncer, de dire la vérité. Vous, les initiatrices, où pensez-vous que vous faites la différence?

«Dans tout ça justement, mais c’est surtout dans le mot liberté qu’est toute la différence. Être indépendant n’est pas facile mais ça engendre une fierté. Être libre de dire ce qu’on a envie de dire n’a pas de prix de nos jours dans la société dans laquelle on vit et dans le monde. Ça prend quelques années avant de réaliser tout le pouvoir de cette liberté, le pouvoir des mots. Mais c’est cette liberté qui renforce notre sentiment d’appartenance et notre fierté d’avoir créé ce journal.»

Vous êtes-vous parfois mises en danger?

«On s’est souvent mises en danger. Dans certains dossiers en l’occurrence. On n’a pas le soutien d’une firme d’avocats ici. Mais tout ça nous a forcé à être meilleures, à aller au bout des choses, à bien faire notre travail, à bien connaître nos dossiers, pour avoir l’endroit et l’envers des médailles. On a toujours été intègres par rapport à notre travail et on a pris une place dans notre communauté qui celle de est chien de garde de la démocratie, de porte-voix des citoyens. On a acquis une crédibilité parce qu’on a dénoncé, fouillé, on s’est mis à la place des gens, comme à celle des élus. On a réussi, malgré des effectifs réduits mais aussi avec une grande créativité et une capacité de réagir rapidement, à être efficaces. On a su s’entourer de passionnés qui ont eux aussi embarqué dans l’aventure avec nous.»

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