Faillite de l’éducation: La CSQ suggère un examen de conscience collectif
Par nathalie-deraspe
Décrochage, enseignants épuisés, insuffisance de soutien et de ressources, dénigrement de la profession. Voilà le triste constat de la Centrale des syndiqués du Québec (CSQ), qui s’arrêtait dans la région mardi pour mesurer l’ampleur des dégâts et consulter le milieu afin de trouver des solutions à la crise.
«Nos membres voulaient qu’on remette l’éducation au goût du jour, d’indiquer le président de la CSQ, Réjean Parent. Les États généraux avaient promis la réussite au plus grand nombre, mais force est de constater que c’est loin d’être le cas, surtout dans les Laurentides, où le taux de diplômation est très en deçà de la moyenne nationale.»
Cette vaste campagne d’animation-consultation triennale a pris son envol en 2006. Après avoir ciblé les problématiques, l’organisme a entamé une tournée des régions qui à terme, devrait aboutir à une grande mobilisation sociale.
Quatrième région en terme de population, les Laurentides se classent à l’avant-dernier rang au niveau de la diplômation des élèves. Seule le Nord-du-Québec nous devance. Fait inquiétant, les données statistiques de 2001 attestent que plus de 25% des 15 ans et plus n’a pas réussi à décrocher son diplôme d’études secondaires. Pire, la moitié de ceux-là a passé moins de neuf ans sur les bancs d’école.
Même si la population des Laurentides augmentera du tiers d’ici 2026, la région demeure mal desservie au niveau des services éducationnels et ce, malgré l’ouverture d’extensions du cégep de Saint-Jérôme à Tremblant et à Mont-Laurier et la venue de l’Université du Québec en Outaouais (UQO)
dans la capitale régionale, déclare la CSQ.
Coup de barre nécessaire
Syndiqués, enseignants ou professionnels, le discours est le même. Il faut que l’ensemble de la société accepte de promouvoir une mission éducative dans les meilleures conditions d’apprentissage possibles et un financement public adéquat du pré-scolaire à l’université, quitte à abolir progressivement les subventions destinées au privé. L’intégration des élèves en difficulté est également sous la loupe. Et devant toutes ces revendications, on revient à la charge en exigeant des classes moins peuplées. Bref, tout est sujet à une remise en question, y compris le calendrier scolaire. «C’est rendu que les professeurs doivent s’adapter au mode de vie des parents, clame l’enseignante Francine H. Michaud. Mais les enfants qui quittent pour une semaine, deux ou même un mois représentent une surtâche pour nous. C’est la même chose pour les élèves de 6e année. Comme il n’y a plus de redoublement, ont doit les préparer du mieux qu’on peut à entrer au secondaire. J’ai hâte que le ministère comprenne qu’une année scolaire ne se prépare pas en quelques minutes mais plutôt six mois d’avance.» L’épisode des bulletins chiffrés saute au visage: «Il a fallu se retourner sur un dix cennes pour être prêts à temps».
«L’argent est toujours le nerf de la guerre, de souligner la présidente de personnel de soutien à la Commission scolaire de la Rivière-du-Nord (CSRDN), Lise Beauchamp. On est assujettis aux enveloppes budgétaires. Il faudrait peut-être penser investir en terme de prévention et pas seulement au niveau correctif. Les projets pour contrer la violence sont bien accueillis, mais il faut s’assurer que les moyens suivent.»
Une école pour tous
Le modèle Finlandais, qui prône une école plus inclusive, commence à se frayer un chemin dans la communauté enseignante. «Il y a 15 ou 20 ans, on excluait les élèves en difficulté pour les mettre dans des classes fermées.
Maintenant, il y a des classes spéciales pour ceux et celles qui ont du talent et c’est les élèves réguliers qui sont laissés pour compte, précise le président du syndicat des enseignants de la CSRDN, Jean Dumais. Il est peut-être temps qu’on pense à des projets sélectifs qui intègrent le plus d’élèves possible.»
À la lumière de tous ces débats, le conseiller en orientation Claude Jean prétend qu’il faut réintégrer la notion de bonheur au travail dans les écoles. Il s’agit là d’une responsabilité de gestionnaires, affirme-t-il.
«Les étudiants ont devant eux des gens épuisés, fatigués. On sait que le personnel en éducation a le cœur trois fois plus grand que tout le monde, mais il y a une souffrance de fond. Il faut changer les paradigmes. On gère encore les ressources humaines comme dans un temps d’abondance, mais il faut soigner notre monde si on veut faire des petits.»