Fin de l’épisode
Gabriel Nadeau-Dubois a finalement été condamné à 120 heures de travaux communautaires. Franchement, compte tenu de l’ampleur du débat, je m’attendais à ce que la foudre s’abattrait sur ce terroriste, et qu’il finirait l’année en prison avec ses potes.
J’espérais avec impatience l’énoncé de cette condamnation, de sorte à m’insurger sur l’appréciation de la loi. L’herbe a été partiellement tondue sous mes pieds, mais il me reste quand même quelques commentaires fondés à faire partager à ce lectorat si sensible d’Accès. En petit soldat discipliné de l’information, je me suis procuré le jugement du 1er novembre1. Ça se lit comme un petit morceau de littérature, avec ses longueurs et ses surprises, et c’est ma foi bien écrit. Et en matière de surprise, nous sommes servis.
D’abord nous sommes dans une situation furieusement intéressante, où le pouvoir, via son bras judiciaire, est capable de museler un mouvement de revendication et de contestation. Nous avions observé, alors que le gouvernement Libéral était majoritaire, qu’il avait pu faire passer un cortège de lois à l’Assemblée, lois à forte saveur autoritaire. Pas dictatoriales, mais s’en rapprochant dangereusement. Il est stipulé dans ce jugement du Très Honorable Juge Denis, que l’outrage au Tribunal vise à garantir la primauté du droit sur l’arbitraire, l’ordre social et le chaos. Excusez-moi du peu, mais je viens de mettre le doigt sur la véritable question à traiter dans ce sujet. Comment sait-on que nous avons à traiter de chaos, d’arbitraire? Qui peut dire que nous sommes en plein chaos, et qui en est responsable? Question clé, qui touille dans cette zone grise de l’état social d’une nation et dans laquelle chacun patauge en prétendant que pour lui, c’est de l’eau claire, et que c’est l’autre qui a tort.
Mais juste après que cette question de fond soit soulevée par le juge, vient une citation de John Fitzgerald Kennedy, alors qu’il était président des États-Unis. Et là, tout l’édifice aux fondations morales qu’essayait de bâtir cet honorable juge, s’effondre. Je dois dire que donner comme exemple de posture démocratique nos voisins du Sud est «exhilarating» comme ils le diraient eux-mêmes. Un pays qui a monté peu après cette citation l’opération Condor avec le Prix Nobel de la paix Kissinger, et qui a eu la peau d’Allende, qui a lancé la guerre du Vietnam, pour finir avec l’imposture des armes de destruction massive en Irak. Je crois qu’en terme de chaos et d’arbitraire, ils en connaissent un bout. Mais ce qui se trouve être le bouquet, c’est que l’on fait parler John Fitzgerald Kennedy, dont tant de gens pensent qu’il était un président exemplaire, alors qu’il n’était que le rejeton d’une lignée de politiques appuyée par les mafias irlandaise et italienne. Encore une fois, en matière de morale, je crois qu’on peut trouver de meilleurs modèles.
Enfin, pour ce qui concerne cette condamnation, j’ai constaté quelques commentaires dégoulinants de haine dans les blogues, traitant Gabriel Nadeau-Dubois de socialiste, tare majeure sur un continent libéral. Être condamné de la sorte, pour un socialiste doit se vivre comme une récompense ou une validation de son statut. J’ai entendu hier soir une définition courte et sympathique du socialisme: «mettre en commun les forces de chacun pour le bien de la nation». Quel programme ignoble, vous en conviendrez!