Jeter la pierre… ou jeter Dubois

Par jocelyne-cazin

La journaliste et conférencière sauveroise Jocelyne Cazin, qui a chroniqué pour Accès dernièrement, commente pour nous ce qu’il est maintenant convenu d’appeler «l’affaire Dubois». Opinion tranchée.

Je ne viens pas ici faire un réquisitoire en faveur de Claude Dubois, des joueurs de hockey ou de toutes ces vedettes que vous aimez normalement traiter différemment. L’affaire, on peut l’appeler l’affaire, puisque l’histoire du gars véritablement artiste qui se faufilait par la porte arrière pour être vacciné et ressortir maladroitement par la grande porte (faut l’faire!!) a dépassé largement les 24 heures dans l’actualité. Cette «affaire» donc, a presque éclipsé les vingt ans de la chute du mur de Berlin. Vous riez! Je vous parie mon cachet que certains bons citoyens qui faisaient la file et qui ont hué le chanteur à sa sortie de la clinique ne savent même pas que le mur de Berlin est tombé il y a vingt ans pour la liberté. Quoi! Certains d’entre vous me glissent à l’oreille que vous en connaissez qui ne sont même pas au courant de l’histoire du mur du Berlin, de ces centaines de morts, du mur de la honte, du passage de l’est à l’ouest, etc..etc…!!

Revenons donc à cette histoire qui en dit long sur notre mentalité, parfois de petit peuple, qui tire un peu trop vite sur la différence, un peu trop fort sur du bois.. Des gens m’ont raconté que des amateurs de l’une des plus belles voix du Québec ont éliminé toute sa discographie de leur iPod. Un autre n’était pas gêné de se vanter qu’il cracherait au visage de l’artiste s’il le croisait. La chasse aux sorcières n’a jamais cessé. Voyez ce que l’on a tenté de faire avec le ministre Sam Hamad lorsqu’il s’est présenté à l’hôpital avec son enfant souffrant. Tout de suite on l’a mis au pilori sans aucune vérification, après qu’une femme eut contacté le journaliste, affirmant qu’il s’était servi de son statut de ministre pour éviter l’attente. Il est bien évident que l’on ne peut être d’accord avec un passe-droit qui touche directement la santé des gens, que ce soit des enfants, des adultes ou des personnes âgées. Mais arrêtons-nous une seule minute sur le phénomène des passes droits. Si Claude Dubois avait été Roger Tremblay, un anonyme qui avait une sœur ou une cousine infirmière à la clinique de St-Sauveur. Cette même cousine aurait ouvert la porte arrière pour laisser passer Roger, qui lui, pas plus brillant que Dubois, serait sorti par la grande porte.

Roger aurait-il subi les mêmes sarcasmes proférés à l’égard du chanteur? Poser la question s’est y répondre. On aime aimer nos vedettes, on les traite aux petits oignons, aux grands soins, on ne crie pas au scandale parce qu’elles sont payées grassement lorsqu’elles portent les couleurs de nos valeureux. La trop grande tolérance que le bon peuple peut avoir à l’égard de ces idoles en certaines occasions justifie t’elle cet amour haine, cette si grande intransigeance, ces manifestations de dégoûts si amers que l’on remarque parfois, par exemple dans le cas de Claude Dubois? À quand un vaccin pour le bon jugement?

Des traitements de faveur

et quoi encore!!!

J’ai envie de vous raconter une histoire vécue il y a une douzaine d’années alors que je devais subir une intervention chirurgicale. J’avais les sinus maxillaires supérieurs infectés. C’était à l’époque de J.E. au sommet de ma notoriété comme animatrice à l’époque. Imaginez la scène: assise dans le couloir d’attente à l’hôpital St-Luc, en compagnie d’une trentaine d’autres personnes présentes pour toutes sortes de raisons, je file un «mauvais coton» comme on dit. Pourtant, cinq minutes ne sont pas encore passées, que déjà j’entends les murmures: «hein! C’est madame J.E.!» ou «c’est la madame de J.E.!» Et comme vous pouvez vous en douter, certains ne se contentent pas de murmurer. Ils arrivent autour de vous comme les abeilles sur le miel. Ils ne savent pas faire la différence entre une salle d’attente d’un hôpital et un bar, entre vie privée et vie publique. Une infirmière voyant la scène, me fait signe de là suivre. Elle m’a gentiment isolée afin que je puisse vivre ma souffrance en toute tranquillité en attendant que le médecin se pointe.

Un jour de mammographie, en camisole, dans la salle d’attente du gynécologue, assise avec une quinzaine d’autres dames, j’essaie de me faire le plus discrète possible derrière mon Paris Match. Mais faut croire que certaines pages sont plus transparentes que d’autres… Soudain, dans le presque silence de la pièce exiguë, une voix stridente me lance: «Ha ben Madame Cazin! Qu’est-ce que vous faites icitte en camisole? J’pensais jamais voir madame J.E. en camisole à matin..!!» Y a rien là, pensez-vous. Vous avez probablement raison.

C’est juste pour vous dire que lorsqu’une personne est connue, il est impossible qu’elle soit traitée comme le commun des mortels. L’être humain étant ce qu’il est, ne parle pas à monsieur et madame tout le monde, comme il parle à ses stars.

Encore une fois, je répète, ce que je viens d’écrire ne donne pas raison à Claude Dubois ou quelque joueur de hockey que ce soit de se surestimer et de réclamer un traitement de faveur pour un vaccin. Mais trop d’exemples me viennent à l’esprit pour constater à quel point quand les vedettes font du bien, c’est beaucoup mieux que n’importe quel quidam, mais quand elles font mal, houlala!! Le mal est pire que le pire du pire.

Oui! On veut des vedettes, mais on préfère les icônes que celles en chair et os. On les veut parfaites, sans tache, sans faute, sinon gare à elles, on les fera flamber, comme du bois! La seule façon de séduire à nouveau «un million de gens» est d’avouer la faute plutôt que de là camoufler, de là travestir. Ce que le chanteur n’aura pas manqué de faire au plus notoire des confessionnaux dimanche soir.

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