La langue n’a pas de frontière, la générosité non plus
Par France Poirier
Lorsque l’on s’est présentés chez les Micoli à Saint-Jérôme, nous sommes reçus par les deux chiens enjoués de la famille, le sourire d’Hélène et l’odeur de la tarte aux bleuets sortant du four. À date rien de particulier, mais le couple Sandro et Hélène Micoli avec leurs deux filles accueillent sous leur toit une mère ukrainienne et ses quatre enfants.
La famille est arrivée le 8 avril dernier et tous vivent en harmonie. Ils communiquent ensemble via le site de traduction Google. Par les gestes et les expressions du visage, ils réussissent à se comprendre. Les enfants ont été rapidement intégrés à l’école Notre-Dame où ils ont été reçus avec beaucoup de bienveillance de la part du personnel et des élèves, nous raconte Hélène. Elle nous montre des cartes de bienvenue reçues par les enfants ukrainiens réalisées par les élèves.
« Il fallait agir »
« Nous ne pouvions pas rester à ne rien faire quand l’invasion de l’Ukraine a commencé et nous avons décidé d’agir. Nous ne sommes pas très réseaux sociaux, mais nos deux filles, Rosa et Rebeca nous ont aidés. C’est sur Facebook que nous avons trouvé une page où des femmes ukrainiennes disaient vouloir sortir du pays et venir au Canada. C’est ainsi que nous sommes entrés en contact avec Lily et ses quatre enfants. Ce n’est pas ce qu’on avait prévu, mais on s’est dit : » on va s’arranger ».Au début, on pensait accueillir une famille avec deux enfants, mais elle en avait quatre. Oleksandr et Arsenii, deux jumeaux de 12 ans, Tonya, 8 ans et le petit Aron, 6 ans. Aux dires de Sandro, Tonya est le rayon de soleil de la maison. »
Un dur périple pour arriver à Saint-Jérôme
Lily et Ruslan Bilohur vivaient à Kyiv avec leurs quatre enfants. En début mars, ils ont pris une décision qui a sauvé la vie de la mère et des enfants. Le père est toujours
à Kyiv où il défend son pays. Ils sont en contact assez régulièrement. La famille vivait leur petite routine de tous les jours, alors que le drame se préparait à la frontière. L’armée russe se préparait à envahir l’Ukraine. Et la capitale Kyiv où les Bilohur vivaient était la première cible.
La grand-maman insistait pour que la famille quitte Kyiv. Elle voulait qu’ils se réfugient chez elle à Butcha, un petit village en banlieue de la capitale. Ça aurait pu être une bonne idée, mais l’intuition de Lily finit par la convaincre de rester à Kyiv auprès de son mari. Quelques jours après le début de l’ invasion, il était clair pour le papa que ce n’était plus sécuritaire, même dans la capitale. Il insista pour que Lily parte avec les enfants. Une décision déchirante pour tous. Ainsi, commença un voyage difficile et périlleux vers la Pologne.
« Quant à Butcha, il sera sous le contrôle de l’armée russe pour quelques semaines. Après sa libération, le monde entier sera horrifié des atrocités et crimes de guerre commis par les Russes envers les femmes, les enfants et la petite communauté de cette banlieue autrefois paisible. Il semble que la décision de Lily aura sauvé sa vie et celles des enfants. Ruslan est toujours au combat quelque part en Ukraine », raconte Sandro.
Manque de soutien du gouvernement
Sandro déplore le manque d’encadrement du gouvernement pour l’accueil des réfugiés et pour soutenir les familles d’accueil. « La communauté est généreuse et veut aider, mais
les règles ne sont pas claires. Pour notre part, nous avons défrayé les billets d’avion pour faire venir la famille ici et nous les logeons dans notre maison », nous explique Sandro. Selon lui, la lenteur bureaucratique complique tout. « Le gouvernement, s’il veut aider devrait s’occuper de faire venir des familles. Les Québécois sont généreux, la communauté s’en occuperait, mais pour l’instant tout est compliqué. Quand Lily parlera la langue, elle aura rapidement un emploi qui pourra lui permettre d’être plus autonome », ajoute Sandro. En Ukraine, Lily travaillait en garderie.
Lorsqu’un ami de Sandro a su que celui-ci accueillait une famille, il a tenu à leur venir en aide.
« Selon ma propre initiative, car bien sûr Sandro était mal à l’aise de demander de l’aide. Mon ami Sandro est un homme pour qui j’ai une grande admiration. Il est d’une bonté et d’une générosité exceptionnelle. Sa femme et lui ne pouvaient pas rester les bras croisés devant autant de cruautés. J’ai donc décidé d’ouvrir une page GoFundMe pour venir en aide à cette famille au grand courage », a souligné Max Leblanc.
Vous pouvez consulter son GoFundMe sur sa page Facebook. « Il est important de dire que les sommes amassées vont entièrement à Lily et ses enfants pour défrayer leurs dépenses personnelles », tient à souligner Sandro Micoli.