(Photo : Anna Dupuis Zuckerman)
« On vient de perdre un chef-d’oeuvre », a affirmé le maire Gilles Boucher.

L’ancien Centre culturel détruit

Par Luc Robert

L’ancien Centre culturel de Sainte-Marguerite-du-lac Masson est passé sous le pic d’une pelle hydraulique, le 13 mai dernier, malgré sa reconnaissance à titre de bâtiment patrimonial. On se souvient que celui-ci était candidat pour accueillir l’Espace bleu des Laurentides. 

Crainte de la possible présence d’amiante

Le maire de Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson, Gilles Boucher, craint pour la santé de la population, à l’approche de la saison d’utilisation de la plage, située près de l’ex-Centre culturel démoli.

L’ancien Centre culturel de Sainte-Marguerite-du-lac Masson avant sa démolition.
L’ancien Centre culturel de
Sainte-Marguerite-du-lac Masson
avant sa démolition. (Crédit photo: Archives)

C’est que les jeunes du camp de jour Gourou, de Sainte-Marguerite, utilisent régulièrement la plage publique de la Ville, attenante au centre. La majorité des activités ont toutefois lieu à l’école Mgr-Ovide-Charlebois.« Dans trois semaines, 90 jeunes vont fréquenter le camp de jour, et par la bande, vont venir jouer à la plage. Que se passera-t-il avec l’air ambiant ? Sera-t-il respirable ou contaminé ? Je crains pour la santé publique, dont celle des résidents et des jeunes », a soulevé le maire Boucher.

Dépêchée sur les lieux, une inspectrice de la CNESST est venue servir, lundi dernier, une ordonnance de suspension immédiate des travaux au contracteur. « La reprise des travaux de démantèlement pourra seulement avoir lieu quand une méthode de travail sécuritaire aura été fournie et approuvée par la CNESST. Pour le moment, un contrôle des poussières est exigé. Un suivi rigoureux sera effectué, car la sécurité et la santé priment », a pointé du doigt Cindy L’Heureux, responsable des communications à la Division de la prévention et des inspections, secteur Rive-Nord, à la CNESST.

L’inquiétude plane

Le maire Boucher demeure tout de même inquiet pour ses concitoyens. « Les travaux ont été arrêtés, mais il est trop tard. Le vaisseau amiral de l’Art-Déco du Québec a sombré. En démolition, les contracteurs sont passés à côté. Le tri des matériaux, selon les règles environnementales, va nécessiter l’utilisation de bâches et de techniques de décontamination. Mais il se passe quoi entre temps pour les voisins, quand le vent déplace les poussières possiblement contaminées ? », a repris le maire.

La CNESST n’a pas voulu s’avancer trop vite sur la présence d’amiante sur place. « On n’a pas la certitude de présence d’amiante dans les décombres. On joue quand même de prudence. Il y aura des analyses », a-t-elle rappelé.

Le maire Boucher a été plus incisif au sujet de la composition des rebuts. « Le Blue Room, les murs et la tuyauterie sont reconnus pour avoir possédé de l’amiante. Un article de la loi pour les lieux patrimoniaux protégés n’a jamais appliqué et pourrait être utilisé cette fois. Après une amende sévère, le propriétaire pourrait devoir reconstruire les lieux de manière identique. Lors de la réception (à l’Hôtel de Ville) de l’autorisation du ministère de la Culture, rien n’interdisait la démolition de quelque chose de non répertorié (patrimonial). On n’avait pas d’autre choix que de délivrer le permis pour (la destruction) du manège. Je prévois une longue enquête, mais j’espère que le gouvernement provincial exigera une reconstruction à neuf identique, avec le Blue Room et deux étages adaptés pour l’Espace bleu. »

Le maire de l’Estérel, la ville voisine, M. Frank Pappas, a incité par écrit ses concitoyens à se tenir loin de l’ancien Centre culturel.
« Nous avons des raisons de croire que le bâtiment détruit contenait de l’amiante à plusieurs endroits, donc de possibles émanations peuvent survenir », a-t-il mentionné.

Silence radio

Les frères Derek et Richard Stern, d’Hampstead, sont propriétaires des lieux, via l’entreprise Olymbec. Ils n’ont pas retourné l’appel d’Accès. Ils se spécialisent dans le secteur de la gestion immobilière.

« On n’a pas de retour d’appels des Stern non plus : on vient de perdre un chef-d’œuvre. On n’avait pas les ressources, ni les critères, pour nous s’opposer à la destruction. Nous n’avions qu’à délivrer le permis. Ils voulaient démolir la partie arrière. Le reste s’est écroulé », a relaté M. Boucher.

Accès a pu parler à l’architecte d’Olymbec, M. Robert Libman, notamment connu pour avoir été chef du parti Égalité (1989-1993), à l’Assemblée nationale.

« Rien n’était intentionnel là-dedans (l’effondrement). Nous sommes aussi catastrophés que le maire et la population. Un communiqué sera (a été) émis, le mardi 17 mai. »

Projet d’hôtel

Le maire Gilles Boucher était au courant des visées d’Olymbec sur ce terrain. « Ils sont venus nous présenter un projet d’hôtel de 141 chambres, de 206 000 pieds carrés en tout. Dès 2013, je me suis présenté à la maire pour faire classer ce lieu. Là, tout est fini. »

Le résultat a soulevé l’ire de Mme Nathalie Roy, ministre de la Culture et des Communications avec le gouvernement Legault. « J’ai appris que le bâtiment patrimonial classé du domaine de l’Estérel, dans les Laurentides, a été démoli illégalement, sans autorisation. J’ai demandé au ministère de faire toute la lumière sur ce qui s’est passé. Nous appliquerons la loi », a-t-elle souligné via Twitter.

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