Le dossier des antennes cellulaires éclipsé par la mort de Ted Rogers
Par nathalie-deraspe
Le porte-parole du comité qui demande le retrait des antennes cellulaires cachées dans le clocher de l’église de Terrebonne, a présenté une allocution devant les journalistes de la Tribune parlementaire à Ottawa. Son intervention est survenue le jour même du décès de Ted Rogers, de la compagnie de téléphonie cellulaire du même nom.
Personne n’aurait osé relever cette coïncidence pour le moins dérangeante. On voulait que la presse s’intéresse sur le danger potentiel des antennes relais qui servent à diffuser les ondes cellulaires, mais on s’est plutôt penché sur la mort d’un pionnier des télécommunications. François Therrien, ce professeur d’électricité qui tente depuis l’été dernier de faire retirer une de ces antennes du clocher de Terrebonne, a plusieurs fois interpellé le vieillard de 75 ans par écrit, mais ses missives n’ont pas trouvé écho.
Son allocution de mardi dernier suivait la remise d’une pétition de 841 signatures destinée au ministre fédéral responsable d’In- dustrie Canada, Tony Clement. Le porte-parole du comité insiste pour qu’Industrie Canada applique le principe de précaution, en éloignant à plus de 300 mètres les antennes cellulaires des écoles de la région. François Therrien demande également de con- sidérer les effets biologiques des micro-ondes à faible intensité sur la santé des personnes, et particulièrement celle des enfants. Pour l’heure, les normes canadiennes surpassent et de loin celles en vigueur dans bon nombre de pays européens. Alors que les études suggèrent des expositions maximales de 1000 microwatts par mètre carré, des analyses effectuées près des écoles et de la garderie avoisinantes du clocher de Terrebonne affichent des taux jusqu’à 5 fois plus élevés. Plus près de nous, les résidences du cégep Saint-Jérôme affiche plus de 7 fois ce résultat, tout comme c’est le cas au pourtour de l’Hôpital régional.
Le responsable des communications du cégep, Jacques Moisan, affirme que la direction a été particulièrement sensible aux données divulguées dans les journaux. «Nous avons demandé à nos fournisseurs si nos antennes étaient bien conformes aux normes canadiennes. L’un d’entre eux nous a indiqué que les expositions étaient bien en deçà des normes établies.» La Direction de la santé publique a également émis des opinions de réserve sur le sujet. «Nous ne pouvons nous substituer aux agences ou aux experts-conseils», de dire M. Moisan.
Respecter le zonage
M. Therrien espère qu’Industrie Canada tien-ne compte des règlements de zonage municipal en vigueur lors d’implantation de nou- velles antennes. Comme les télécommunications sont de juridiction fédérale, rien n’empêche l’organisme de donner le feu vert à une compagnie qui se verrait interdire l’accès sur un territoire municipal donné. De plus en plus de villes ou arrondissements québécois hésitent à établir des antennes-relais près des établissements scolaires. C’est le cas notamment de Boucherville et de Saint-Bruno, qui refuseraient pour l’instant de céder à l’un ou l’autre des géants des télécommunications. À Terrebonne, la ville a décidé de sévir en émettant d’abord un avis d’infraction. L’installation contreviendrait au zonage institutionnel de l’église. Une rencontre aurait eu lieu entre la compagnie Rogers, la fabrique et des représentants de la ville, mais aucune entente n’aurait été entérinée.
Terrebonne est donc revenue à la charge, avec un constat d’infraction dont le délai de paiement expire ces jours-ci. La Fabrique de la paroisse Saint-Louis-de-France prévoit embaucher un avocat pour défendre l’installation de ses antennes. Une dizaine d’antennes seraient camouflées dans les divers clochers du diocèse de Saint-Jérôme. Il nous a été impossible de joindre les responsables du diocèse pour valider l’information. Une étude datant du 31 mars 2000 et réalisée par l’ingénieur civil électronicien Willy Pirard, pour le compte de Direction générale des Ressources naturelles et de l’Environnement (DGRNE) du Ministère de la Région wallonne, souligne que «les antennes installées sur le toit, ou le long des façades de bâtiments ne devraient, normalement, présenter aucun risque pour ses occupants, du fait qu’elles concentrent leur rayonnement dans la direction horizontale et aussi grâce à la protection apportée par le toit et les murs. Par contre, il convient de veiller à ce qu’il n’y ait pas, face aux antennes, de bâtiments trop proches.»