Les déchets, un dossier qui sent de moins en moins bon

Par nathalie-deraspe

S’il y a un dossier qui souffre du syndrome pas dans ma cour, c’est bien celui des déchets. Même s’il est vrai que la très grande majorité des municipalités des Laurentides ne veut pas se voir imposer les déchets des autres, certains flairent la bonne affaire. Et si c’était payant?

Pendant qu’il y en a qui magasinent des bioréacteurs, d’autres magasinent des déchets. C’est que la technologie de tri-compostage est gourmande à souhait. Pour être rentable, il fait traiter une quantité phénoménale d’ordures ménagères. Il faut dire que des usines comme celles que Conporec ou Aecon proposent vont chercher dans les sept chiffres. D’où l’importance d’associer un maximum de municipalités au projet. Depuis plus d’un an, une délégation de maires de la région recherchent fébrilement une solution. Plusieurs sites sont à pleine capacité, d’autres ont besoin d’une mise à niveau pour arriver à se conformer aux nouvelles exigences du ministère de l’environ­nement. Pour avoir les coudées franches, les MRC des Pays-d’en-Haut et des Lau­rentides ont demandé une délégation de compétences à leurs municipalités mem­bres. Ainsi, un seul représentant parlerait au nom de tous.

Depuis, le préfet Ronald Provost tente de convaincre les municipalités des MRC Antoine-Labelle et des Hautes-Laurentides à se joindre au projet. On a même interpellé les gens de la Vallée de Gatineau pour s’assurer de mettre la machine en marche. Mercredi soir dernier, la Régie des déchets de la Lièvre a décidé de se retirer du consortium. Pour le moment, les déchets du nord aboutissent soit au centre d’enfouissement de Lachute ou à celui de Mont-Laurier. La plupart du temps, la même compagnie fait à la fois la collecte d’ordures et de matières recyclables. Difficile pour monsieur et madame tout le monde de vérifier si on fait réellement une distinction entre les deux ou si, pour une raison x, on enfouit le tout le dans un centre de transbordement illégal, histoire de diminuer les coûts de transport. Chose certaine, les plaintes se multiplient. Des témoins admettent avoir vu des camions faire des aller-retour douteux qui laissent présager toutes sortes d’avenues.

Conquête de l’or vert

De son côté, la coopérative de travailleurs Orvert tente toujours de sauver le centre de tri situé à Rivière Rouge. Un plan de relance étoffé a été soumis aux membres de la Régie intermunicipale de récupération des Hautes-Laurentides (RIRHL) pour sauver les emplois qui s’y rattachaient. On se rappellera qu’en décembre 2006, le site a été fermé sans préavis, malgré le fait que les contrats d’approvisionnement s’étiraient jusqu’en juin. Depuis, les membres d’Orvert et de l’organisme On Récup’ multiplient les démarches pour avoir accès aux documents et convaincre les élus de maintenir le centre fonctionnel. En septembre dernier, un groupe de cinq municipalités a déposé une offre d’achat. Celle-ci a été rejetée du revers de la main pour la simple et bonne raison que deux municipalités sont revenues sur leur position. Vendredi dernier, la Régie Inter­municipale de récupération des Hautes-Laurentides (RIRHL) a à son tour déposé une offre. Celle-ci a été acceptée à 16 contre 8. Un juge devra toutefois trancher afin de déterminer si la première offre prévaut.

L’année dernière, le député de Labelle, Sylvain Pagé, a déposé une pétition de 12 000 noms visant le maintien du centre de tri. «C’est un dossier qui appartient aux municipalités, de dire le député. À chaque fois que j’ai essayé d’obtenir des informations, j’ai eu des versions différentes. S’il y a des municipalités qui parlent du même côté de la bouche, c’est leur problème éthique. Mais j’ai su qu’il y a des gens qui n’étaient pas contents quand j’ai demandé une intervention de la ministre des Affaires municipales, Nathalie Normandeau, afin qu’elle aide les gens de la région à résoudre la problématique.»

Un journaliste expulsé par la police

Dans ce dossier nébuleux des déchets, l’information est servie au compte-gouttes.

Vendredi dernier, le journaliste Ronald McGregor a fait les frais d’un règlement qui interdit à toute personne de «filmer, d’enre­gistrer et ou de photographier à l’intérieur du lieu où se tiennent les séances du conseil d’administration ainsi que sur les terrains présentement en construction de la régie intermunicipale des déchets.» Un règlement similaire a été adopté par les membres de la Régie intermunicipale de récupération des Hautes-Laurentides (RIRHL), un organisme qui réunit plus ou moins les mêmes personnes. Le président de la RIRHL et de la Régie de la Lièvre, le maire de la municipalité Saint-Aimé-du-Lac-des-Îles, François Desjardins, ne semble pas s’émouvoir du fait qu’un tel règlement nuise à la transparence des dossiers et porte atteinte à la démocratie municipale. Qui plus est, sa version des faits est contradictoire à celle des témoins sur place. «On se sert de ces choses-là et ce n’est pas toujours à bon escient. Une personne s’est présentée et a commencé à prendre des photos. Il ne s’est jamais identifié comme journaliste (Mc Gregor se serait tout de suite identifié comme tel). Je lui ai demandé de sortir et il a dit que les seules personnes qui pourraient le faire sortir ce serait la police (il a mentionné plutôt que les photos ne serviraient peut-être pas). Ce monsieur-là perturbait l’assemblée. Notre réunion, c’est pas un terrain de jeu.» Quand l’auteure de ces lignes lui a demandé ce qu’il adviendrait si elle osait prendre une photo d’un bâtiment de l’une ou l’autre des Régies, l’ex-policier a répondu ironiquement: «Vous iriez en prison, comme la fille en Iran!» François Desrochers a déclaré n’avoir jamais vu le journaliste auparavant, une déclaration qui a eu l’heur de surprendre le patron de M. McGregor, Michel Gareau. Le directeur général régional n’est pas content qu’un des ses journalistes se soit fait expulser de la sorte d’une réunion publique. Vendredi, la direction des hebdos Quebecor se penchait sur la question afin d’évaluer s’ils donneront suite ou non au dossier.

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