Les dirigeants d’O de mer Propulsion contre-attaquent

Par nathalie-deraspe

Trouvés coupables de 346 chefs d’accusation, les cinq dirigeants d’O de mer Propulsion accusent l’AMF d’outrepasser ses droits et de laisser en plan leurs investisseurs. Accès vous livre en primeur les détails d’un rêve devenu cauchemar. Une histoire invraisemblable qui éclabousse jusqu’au président du PQ de la circonscription de Prévost.

Tout a débuté alors que le phytothérapeute Jean-Louis Poirier cherchait une solution qui permettrait de reminéraliser le corps des personnes dont le système immunitaire est affaibli. Celui-ci voit en rêve que l’eau de mer est la solution. Ce présage se situe en accord avec des travaux publiés par le savant naturaliste René Quinton qui, en 1904, affirme que l’océan possède des vertus thérapeutiques inégalées.

Jean-Louis Poirier rencontre le thérapeute en relation d’aide Luc Bissonnette. Les deux hommes sollicitent leurs proches et amis afin d’obtenir des emprunts pour démarrer leur entreprise. «Il n’était pas question de vendre des actions, précise Christian Fréchette, un des administrateurs de la compagnie. Pourtant, c’est là-dessus que l’AMF nous condamne», fustige-t-il. (Les dirigeants d’O de mer Propulsion s’appuient notamment sur ce motif pour en appeler du verdict de culpabilité rendu le 19 mars dernier). «Personne ne nous a lancé de roche. Tous les investisseurs sont prêts à attendre», soutient Christian Fréchette. L’homme admettra par la suite qu’une femme convoquée à la barre s’est effondrée en larmes après avoir expliqué que sa soeur l’avait poussée à injecter 60 000$ dans le projet.

Un sauveur apparaît

En novembre 2005, O de mer Propulsion est lancé à Sainte-Adèle grâce à des conventions de prêt. Selon les dires du trésorier Jacques Savoie, un avocat de la compagnie s’est d’abord enquéri des dispositions de l’AMF auprès du Barreau pour s’assurer de la légalité de la démarche. Bien au fait du dossier, celui-ci ne sera pas reconnu en cour comme un expert.

En 2007, des hommes d’affaires s’intéressent à la compagnie. Un rendez-vous convenu dans un chic bureau de la Place Ville-Marie convainc les dirigeants de l’entreprise que la fortune est à portée de main. Non seulement parle-t-on d’acheter un navire pour aller cueillir l’eau de mer à la source, mais l’un des intervenants présents se vante d’avoir ses entrées au gouvernement en tant qu’ex-conseiller spécial d’un ministre en fonction. Parmi eux, se trouve un certain Guy Parent.

Le 20 juin 2007, un accord de principe intervient entre O de mer Propulsion et Gestion Guy Parent inc. L’entente est signée sous les recommandations de Jean-François Laroche, déclaré coupable de pratique illégale de l’activité de courtier, et du Groupe Conseil expert GCE (une entreprise désormais introuvable).

Guy Parent promet un investissement de départ de 5 millions de dollars grâce à un transfert bancaire à être effectué le 22 juin, et un autre 6,5 M$ prévu trois mois plus tard. Dès lors, le document lui assure plus de 50% des parts de la compagnie.

Une valise d’argent

Le mois suivant, l’homme en question se serait présenté aux administrateurs en offrant le premier versement promis en argent comptant, moyennant une cote de 10%. Le tout était vraisemblablement contenu dans une valise diplomatique en provenance d’Afrique.

Pris de panique, les dirigeants d’O de mer Propulsion reculent. Ceux-ci concluent à une tentative de blanchiment d’argent.

La valise en question ne sera jamais ouverte. Le problème, c’est que le document signé le mois auparavant suppose d’éventuelles ventes d’actions, ce qui incrimine d’entrée de jeu les signataires. «Sans la lettre d’intention de 11,5 M$ de Guy Parent, nous aurions démarré la compagnie à plus petite échelle», prétendent les dirigeants d’O de mer en entrevue. Même si 76 personnes ont englouti plus de 1,3 millions de dollars dans le projet, les dirigeants d’O de mer Propulsion affirment être des victimes dans cette affaire. Guy Parent s’est d’ailleurs volatilisé quelques jours après que son offre ait été refusée.

Quelques mois plus tard, Marc Nadeau, anciennement d’Olymel, est recruté et nommé directeur-général. Celui-ci aurait quitté en mars 2008 dans l’espoir de démarrer sa propre entreprise dans le domaine grâce à un contrat obtenu avec Luc Bissonnette en Inde.

Questions en suspens

Le thérapeute en relation d’aide continue de prétendre que leur produit est «extraordinaire». Accusé de quatre infractions, celui-ci affirme que le témoignage de Marc Nadeau est pris au pied de la lettre. «Si on est rendus coupables, il aura le chemin libre.»

Mais il y a pire. Des quatre millions de dollars réclamés en constats d’infraction par l’AMF, pas un sou ne serait destiné aux investisseurs. L’amende imposée par le tribunal appartient à l’Autorité des marchés. N’étant pas inscrits comme courtiers en valeurs mobilières, les investisseurs n’ont pas droit aux fonds d’indemnisation. Aux yeux du trésorier Jacques Savoie, déclaré coupable de 114 infractions, «l’AMF utilise le nom des investisseurs pour capitaliser.» Les enquêteurs de l’Autorité des marchés n’ont jamais rencontré les accusés avant leur visite en cour et les allégations de tentative de blanchiment d’argent auraient été écartées du dossier.

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