Les victimes préparent un recours collectif
Par nathalie-deraspe
C-Difficile
Excédés par les manquements nombreux du gouvernement et le laxisme de certains établissements hospitaliers en matière d’hygiène et de prévention, l’Association pour la défense des victimes d’infections nosocomiales (ADVIN) va intenter un recours collectif qui pourrait bénéficier à des milliers de malades qui ont contracté une infection nosocomiale dans un établissement de santé du Québec.
L’ex-médecin et fondateur de l’ADVIN est on ne peut plus clair: nous avons dix ans de retard au niveau du contrôle des infections dans les hôpitaux. Paraphrasant Florence Nightingale, infirmière lors de la guerre de Crimée, Jacques Besson déclare: «Si vous savez chaque année que 100 personnes meurent à la suite d’une infection à l’hôpital, c’est aussi criminel de ne rien faire que de les mettre dans un champ et de les fusiller.»
Lui-même victime d’une infection qui a failli lui coûter la vie, Jacques Besson martèle à qui mieux-mieux que la meilleure façon d’éviter une pandémie est d’Instaurer une campagne nationale de lavage des mains, une pratique qui a permis de diminuer les taux d’infections à l’hôpital le Gardeur de Repentigny de 75 %!
«Le ministre Couillard aurait besoin de changer son équipe de communications, clame l’ex-médecin. On camoufle, il n’y a pas de transparence et les gens ont peur d’aller à l’hôpital».
Le directeur général de l’Hôpital régional de Saint-Jérôme défend ses positions. «En 2004,nous avions plus de cas que la moyenne au Québec, mais les différentes mesures mises en place chez nous nous ont permis de rattraper la moyenne nationale qui elle-même a baissé. Ce n’est pas un hasard, mais ce n’est pas un acquis non plus.»
Claude Blais affirme du même souffle que la situation demeure très préoccupante, compte tenu du fait qu’on entre de plein fouet dans une période grippale intense. Toutefois, toutes les mesures proposées par le ministère de la Santé et des services sociaux ont été mises de l’avant, affirme-t-il. L’injection d’un million de dollars tiré à même le budget de fonctionnement de l’hôpital a permis de réorganiser les services de salubrité, d’embaucher trois nouvelles infirmières, un médecin infectiologue et un pharmacien, qui gère rigoureusement les prescriptions d’antibiotiques. En outre, les patients infectés sont systématiquement isolés et informés de leur cas. À l’admission, une machine spécialisée permet en quelques heures à peine de détecter tout patient infecté par le SARM (on en dénombre une quarantaine par jour).
Des morts inutiles
Selon l’ADVIN, les infections contractées dans les hôpitaux (ERV, SARM, C-Difficile) auraient fait plus de 14 000 victimes dont près de 2000 morts entre 2003 et 2005 et coûté près de 168 M $ à la société. Dans la région,, impossible d’’obtenir des chiffres.
Dans un mémoire déposé en mars dernier, les directions de Santé publique du Québec demandaient au gouvernement d’instaurer un fonds récurrent de 30 M$ annuellement dédié exclusivement à la prévention. Le collectif appuyait sa demande sur un rapport de l’Organisation canadienne de développement économique (OCDE), qui déclarait en 2004 que seul 2,8 % des dépenses de santé sont consacrées à des programmes de prévention alors que les facteurs comportementaux modifiables comptent pour 40 à 50 % des décès prématurés. Deux lavages de main des patients par jour a permis de réduire de moitié l’incidence de cas à l’Hôpital Le Gardeur, une économie de 900 000 $ sur un programme qui en a coûté 160 000 $, ce qui équivaut à une économie annuelle de 70 à 80 M $ par an pour la province.
Avec le débordement des urgences, la saison de la grippe et l’arrivée de bactéries et de virus de plus en plus virulents, il est de plus en plus urgent que les patients s’informent de leurs droits. «Nous demandons à ce que soit modifiée La Loi sur la santé, précise Jacques Besson, afin qu’en cas d’infection nosocommiale, l’établissement ait le fardeau de la preuve et non la victime et nous voulons qu’il y ait un régime d’indemnisation sans égard à la faute.». Au gouvernement et aux établissements à faire leur devoir.