L’indépendance du Québec, pièce maîtresse de l’implication politique du comédien Pierre Curzi
Par nathalie-deraspe
En marge de sa venue dans les Laurentides pour une soirée bénéfice organisée au profit du Parti Québécois au Manoir Saint-Sauveur, le comédien et député de Borduas, Pierre Curzi, a raconté en entrevue exclusive, ce qui l’a conduit de la scène culturelle à la scène politique.
Quand avez-vous senti cet élan pour la politique?
«La décision a mûri lentement, confie l’homme de théâtre. Malgré certaines victoires obtenues à l’Union des artistes, résultat concret de nombreuses luttes, je trouvais qu’en général, nos batailles syndicales ne changeaient pas grand chose aux problèmes. J’ai vu des artistes s’engager dans des batailles environnementales, mais on a beau s’impliquer, ça ne change pas les politiques en place. C’est là que j’ai compris que le pouvoir syndical n’est pas le pouvoir politique. Et comme j’avais développé un discours politique au fil des ans, je devais faire le saut pour être logique avec moi-même. Mais il m’arrive de trouver que c’est masochiste comme choix. Avant, tout le monde t’aime, là on se retrouve avec des milliers d’ennemis. (rires)
Comment s’est fait la transition?
«On aimerait toujours que ça se fasse doucement, mais on s’est retrouvés rapidement en campagne électorale, avec un chef qui est parti tout de suite, on m’a ciblé comme candidat potentiel à la chefferie et on s’est retrouvés dans la deuxième opposition!
Vous êtes très lié au projet de loi de Mme Marois. Est-elle allé trop loin?
Dès son arrivée, notre nouvelle chef a identifié des missions pour chacun de nous. J’ai été nommé, tout comme Daniel Turp, Alexandre Cloutier et d’autres de mes collègues, dans le groupe de travail sur la langue, la culture et l’identité québécoise. Je ne comprends pas le tollé qu’il y a présentement. La loi 101 nous a rassurés et a eu de bons effets, mais il y a eu du laxisme. Si on laisse 5 000 à 7 000 immigrants s’intégrer à la langue anglaise, on accentue le problème. Parallèlement, il y a tout la question d’équilibre entre l’exercice de la foi et la laïcité. En Hollande, il faut pouvoir parler le néerlandais si on veut immigrer. Imaginez, pas l’anglais ou le français, le néerlandais! Nous on propose un contrat **fair**, avec un examen national pour tous, et on veut franciser les petites entreprises de 50 à 100 employés qui n’étaient pas touchées par la loi 101.
Et la sortie de Jean Charest dans les journaux?
C’est pas correct d’aller combattre le projet dans les médias. Il ne veut pas qu’on en débatte, mais se rend sur la place publique pour le faire. Moi je dis, messieurs les juges, vous devez interpréter ces droits. Car au départ, il se dégage un bon consensus. Nous aspirons à une culture commune, à l’égalité entre les hommes et les femmes et nous voulons séparer l’Église de l’État. Pourquoi ne pas en débattre? L’idée d’un projet de loi n’est pas d’opprimer le monde, mais ce qui fait peur, c’est qu’on propose les fondements d’une constitution. C’est très difficile de parler d’identité quand t’es même pas capable de te donner une constitution. On n’a même pas signé celle du Canada! Un jour on va se rendre compte que c’est payant de posséder tous les leviers au lieu de subir des décisions qui nous sont défavorables. C’est plus facile de contrôler notre destin.
Quel héritage aimeriez-vous laisser en tant qu’homme politique?
J’aimerais intégrer la culture à l’éducation et participer à la régionalisation de la culture, faire en sorte qu’il y ait un lien intime avec l’éducation. J’ai trouvé dommage que les activités culturelles aient été boycottées à cause de la grève des professeurs. On devrait faire tout le contraire.
C’est l’anniversaire de la mort de René Lévesque, quel souvenir en gardez-vous?
Pour les gens de ma génération, René Lévesque, c’est le père de la Révolution Tranquille. Pour moi qui avait 20 ans, c’était un mentor. Je me souviens avec précision de son tableau quand il animait Point de mire à Radio-Canada. J’étais fasciné par son esprit de synthèse et s’il y a une parenté avec moi, c’est bien cette faculté-là d’être un bon vulgarisateur. C’était un grand modèle.
Pourrait-on revoir Pierre Curzi sur les planches ou au cinéma?
Ce serait difficile de le faire. Je ne voudrais pas que les gens confondent le comédien et l’homme politique. La politique, ce n’est pas un jeu. Je ne suis pas venu jouer, je suis venu agir. Et je ne suis pas un personnage politique. Je suis un homme en politique.
ENCADRÉ
Titre : À l’avant-scène
Avant de changer de public, Pierre Curzi a occupé des fonctions dans lesquelles il a dû à plusieurs reprises prendre des décisions à caractère politique. En voici un résumé…
• Acteur cinéma _ théâtre _ télévision _ radio _ improvisation _ enseignement _ écriture (cinéma et télévision) _ direction théâtrale (1969-2006)
• Président de l’Union des artistes (1996-2006)
• Président de la Coalition pour la diversité culturelle (1998-2006)
• Président du Fonds d’investissement de la culture et des communications (2004-2006)
• Vice-président de la Fédération internationale des acteurs (2004-2007)