Nos personnes âgées ne sont pas à l’abri des abus

Par nathalie-deraspe

La certification des résidences pour personnes âgées n’offre aucune garantie de bons soins. À preuve, le tiers des plaintes acheminées au commissaire

régional en 2008-2009 les concernaient.

Sur papier, tout est parfait. Dans les faits, tout se complique. On entend de véritables histoires d’horreur. Une jeune

employée a dénoncé une série de faits troublants. La pauvre craint tellement pour son emploi à 9,65$ l’heure, qu’après avoir livré quelques commentaires, elle flanche. «J’ai peur qu’on me

reconnaisse.» Pourtant, elle n’en peut plus de voir les personnes âgées traitées comme du bétail. «Ça ne peut plus continuer comme ça» laisse-t-elle tomber.

Les employés n’ont pas le temps de

manger. Il faut donner les pompes et normalement attendre un peu entre chaque dose. La plupart du temps, on précipite la manœuvre, faute de temps. S’ajoutent les traitements intramusculaires, l’insuline, l’administration des médicaments. Le tout, souvent effectué sans la moindre compétence en soins infirmiers. «Quand je suis rentrée, je n’avais aucune formation. Je ne savais même pas ce que ça faisait de piquer à côté d’une veine.» Heureusement, il y a une prime de 50 sous de l’heure pour les employés formés!

Le soir, une seule personne est sur place et doit veiller sur une centaine de résidents. Et on ne parle pas de la bouffe… Éplucher des carottes pourries, trier le gras de la viande, donner des portions minimes. Ça se comprend. Il faut trouver le moyen d’offrir un repas de l’entrée au dessert pour 1,30$. Plus le cuisinier réussi à abaisser ses coûts, plus il a de chance d’obtenir un bonus en fin d’année.

Les employés doivent donner les bains, laver la résidence, les draps, aider à la cuisine, débarrasser la salle, donner les traitements. «On est censés prendre une demie-heure pour souper. Je prends 5 minutes et je me fais des toasts.» À ses dires, beaucoup de

résidents veulent se plaindre mais craignent les représailles. Si une employée a peur, imaginez la pauvre vieille… Des résidents ont affirmé avoir déjà eu droit à un blé d’inde comme repas principal. Point à la ligne. D’autres jours, on sert des crêpes nues dans l’assiette.

La sécurité en jeu

La directrice du programme de certification du Conseil d’agrément québécois, Sylvie Lambert, admet que les menus sont évalués «sur

papier» et que les vérifications de conformité ont lieu une fois l’an, généralement autour de la même date. «Mais des visites surprises peuvent avoir lieu à n’importe quel moment», s’empresse-t-elle d’ajouter. Rappelons que le Conseil d’agrément québécois est un organisme privé. Quel serait son l’intérêt de multiplier les démarches?

Côté médication, c’est à chaque CSSS de s’assurer du bon fonctionnement des méthodes et de la qualité des soins prodigués. Côté nourriture, le MAPAQ peut intervenir. À condition qu’une plainte ait été formulée. Et les Agences de santé ont également un pouvoir d’inspection qu’elles peuvent faire valoir «à très peu de délai d’avis», nous indique-t-on.

Il n’y a pas de quota de base pour le personnel en place, sauf si le service de sécurité incendie en

faisait la recommandation, précise Mme Lambert. Après vérification, on nous assure qu’aucun

service de sécurité ne pourrait s’immiscer dans les affaires d’une résidence privée pour personnes âgées. «On fait une simulation de feu une fois par an. S’il y avait un incendie, faudrait laisser les

invalides derrière. Avec un employé par nuit,

impossible de sauver tout le monde», lance un chef de sécurité qui préfère garder l’anonymat.

Accès a visité plusieurs résidences de la région. De deux choses l’une. Nos personnes âgées

peuvent opter pour des lieux défraîchis et où ça sent l’humidité, mais où l’ambiance est bonne,

ou se retrancher vers ces immense édifices

impersonnels où, derrière un décor convenable se cache les pires abus. «On a pas le temps de s’en occuper», confie à nouveau la jeune fille.

Les résidents peuvent toujours faire appel au

commissaire aux plaintes. Le service est accessible depuis 2007. Sur papier, tout est parfait. Dans les faits, tout se complique. Mais on le sait, les vieux, c’est tous des chialeux…

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