Quand la maladie mène à la pauvreté

Par benerice-jette

L’histoire de Suzanne

La vie est un océan. Parfois des vagues immenses nous submergent, nous prenant au dépourvu. Malgré tous les calculs, une chose demeure imprévisible: la maladie. Et elle peut tout faire basculer, tant au niveau physique, émotif que financier.

Une dame, que l’on nommera Suzanne, avait tout pour mener une vie paisible: un mari, trois enfants adultes, et un emploi. Elle se faisait un point d’honneur d’être bénévole auprès des plus démunis. Mais un jour, une vague l’a renversée: «J’ai aujourd’hui 63 ans. Il y a une dizaine d’années, mon mari a été atteint d’un cancer grave et j’ai dû m’en occuper. J’ai quitté mon emploi car je n’avais plus assez d’énergie pour tout faire», raconte Suzanne.

Dans ces mêmes années, l’un de ses fils dans la quarantaine a été diagnostiqué psychotique: «Je ne pouvais le laisser à lui-même, alors je l’ai pris chez-moi. La maladie mentale est méconnue et soulève des préjugés. À cette époque, nous étions pointés du doigt et les voisins nous évitaient. À vouloir aider mon fils, déjà épuisée par la maladie de mon mari, j’ai fini par couler avec lui et sombrer dans une dépression profonde», déclare-t-elle.

Conseillée par l’agent attitré de son fils sur l’aide-sociale, Suzanne adhère aussi au programme pour subvenir à ses besoins. Elle s’adresse au CLSC pour connaître d’autres ressources et trouve ainsi un médecin de famille. Elle est aussi dirigée vers l’aide alimentaire et le transport bénévole. S’étant défaite de son véhicule, il lui était difficile de se rendre à différents rendez-vous médicaux.

Les différends entre Suzanne et son mari à l’égard de la présence constante du fils les mènent à la séparation. Avec cette nouvelle épreuve, l’étau se resserre un peu plus sur Suzanne. «Chaque mois je dois choisir entre acheter de la nourriture ou payer une facture. L’hiver c’est pire, car les frais de chauffage augmentent», souligne-t-elle.

Son fils ayant finalement été hospitalisé et stabilisé dans un centre adapté, Suzanne croyait trouver un répit, mais suite à une évaluation, son fils doit quitter le centre, laissé à lui-même. «Il erre dans la région de Montréal. Lorsqu’il finit par me rejoindre, je vais le chercher et il passe quelques jours chez-moi, avant de disparaître à nouveau. Cela m’affecte beaucoup», déclare Suzanne. «C’est une roue qui tourne et je n’arrive pas à m’en sortir complètement. Les personnes qui travaillent dans les organismes venant en aide aux plus démunis sont dévouées et ont le cœur sur la main. Je ne peux que les remercier.»

Dans un avenir rapproché, Suzanne a deux objectifs: surmonter sa dépression afin d’être plus fonctionnelle, et se trouver un emploi. «Il y a des limitations à mon âge. La plupart des emplois ici son saisonniers, et on privilégie les étudiants. J’ai de hautes études et j’ai toujours travaillé. C’est dur de croire que je suis aujourd’hui dans l’incapacité de gagner ma vie», déplore-t-elle.

«Ce qui m’afflige encore plus que la pauvreté, ce sont les préjugés envers les gens atteints de maladie mentale. Il faut cesser de croire qu’ils sont paresseux ou profiteurs. Ils n’ont pas choisi de dépendre des autres. Les troubles mentaux ne sont pas un état d’âme, c’est une maladie

qui peut vous entraîner vers le fond», conclut

Suzanne.

L’institut National de Santé publique du Québec et le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec – Comité de la santé mentale, dévoilent qu’environ 20 % des Canadiens seront personnellement atteints d’une maladie mentale au cours de leur vie, et que les personnes à faible revenu sont plus à risque, parce que fréquemment soumises à un stress plus élevé, sur une plus longue période de temps que la majorité des gens. Des études épidémiologiques ont prouvé que la pauvreté est un facteur qui influence grandement la santé mentale, et que l’inverse est aussi vrai, plongeant l’individu dans un cercle vicieux.

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