Retour sur les élections à Sainte-Anne-des-Lacs
L’éligibilité de Sylvain Harvey questionnée
Par Cynthia Cloutier Marenger – Peu de temps après que l’éligibilité aux élections du nouveau maire de Laval eut été contestée, voilà que c’est au tour de Sainte-Anne-des-Lacs de vivre une histoire similaire. En effet, le candidat défait André Lavallée prétend que son adversaire Sylvain Harvey était inéligible selon l’article 61 de la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités.
D’après cet article, «est éligible à un poste de membre du conseil de la municipalité toute personne qui a le droit d’être inscrite sur la liste électorale de celle-ci et qui réside de façon continue ou non sur le territoire de la municipalité depuis au moins 12 mois le 1er septembre de l’année civile où doit avoir lieu une élection générale.»
Condition non respectée?
Or, selon André Lavallée, seul membre de l’Équipe Monique M.-Laroche à avoir été défait lors des élections, Sylvain Harvey, maintenant conseiller au poste 6, n’aurait pas satisfait à la deuxième condition. En effet, celui-ci n’aurait pas résidé à Sainte-Anne-des-Lacs 12 mois avant le 1er septembre2012, mais bien 10 mois seulement.
Pour preuve, M. Lavallée, appuyé par la mairesse Monique M.-Laroche, cite l’acte d’achat de l’actuelle maison de M. Harvey, consulté à partir du Registre foncier du Québec en ligne du ministère des Ressources naturelles et de la Faune. Selon ce registre public de transactions immobilières, au 1er septembre 2012, la résidence principale de Sylvain Harvey aurait été située à Montréal.
Interrogé sur ces allégations, Sylvain Harvey, qui ne désire pas largement commenter l’affaire dans les médias à moins que des actions légales ne soient entreprises, rejette néanmoins les accusations d’inéligibilité de M. Lavallée. «Il ne faut pas nécessairement être propriétaire pour se porter candidat aux élections», dit-il en affirmant avoir rempli les conditions de l’article 61.
Actions légales
En cas d’inéligibilité d’un élu, selon Carl
Charest, relationniste de presse du Directeur général des élections (DGE), deux options
s’offrent: contester l’élection en inéligibilité dans les 30 jours suivant l’assermentation ou intenter une action en déclaration d’inhabilité à n’importe quel moment au cours du mandat.
Dans les deux cas, il en revient à la Cour supérieure de rendre un jugement. Si celle-ci déclare l’élu inéligible ou inhabile, des élections partielles doivent être déclenchées. Rien n’empêche alors l’élu démis de ses fonctions de se représenter et, advenant une nouvelle victoire, de retrouver son poste. Il en aura alors coûté au plaignant jusqu’à 15 000$ (recours en inéligibilité) ou 30 000$ (requête en inhabilité) en frais juridiques pour porter sa cause devant le tribunal québécois. Quant au défendeur, les frais encourus pour le défendre seraient payés par la municipalité, donc par les contribuables. Même scénario en cas de déclenchement d’élections partielles.
Suite des choses
Questionné quant à ses intentions de poursuivre ou non Sylvain Harvey en Cour supérieure, André Lavallée, qui a été chercher l’avis d’un avocat dans cette affaire, affirme qu’il ne suivra néanmoins pas cette voie. «Je me sentirais bien mal de faire payer ces frais à la population», dit-il en faisant référence à la défense de Sylvain Harvey et à de possibles élections partielles. M. Lavallée désire toutefois que la situation soit révélée au public, lui qui estime que Sylvain Harvey savait pertinemment qu’il enfreignait la loi électorale en se présentant contre lui: «Il a de l’expérience en politique. Il connaît la loi. Il s’est pété les bretelles avec la transparence pendant la campagne électorale, mais il a floué les gens qui l’ont élu. Nous, on a fait une campagne propre.» En accord avec les promesses de transparence faites par son équipe pendant la campagne, Monique M.-Laroche, qui affirme avoir tenté sans succès d’éclaircir la situation avec M. Harvey, a quant à elle révélé les soupçons d’inéligibilité dès la première séance du nouveau conseil. «S’il montrait patte blanche, s’il donnait des preuves de son éligibilité, on n’en parlerait même plus», déplore-t-elle.
Or, rien, dans la loi, n’oblige un candidat ou un élu à fournir de preuves, comme un acte de propriété ou un bail, qu’il satisfait aux conditions d’admissibilité stipulées à l’article 61. «Le DGE s’assure que le dossier de candidature est complet, explique Carl Charest. Pour le reste, il s’en remet à l’honnêteté du candidat.»
Considérant qu’un flou existe à ce sujet,
Monique M.-Laroche estime que la loi devrait être changée pour éviter de telles situations. Elle espère ainsi que les municipalités feront des pressions en ce sens prochainement.