Saint-Sauveur : Carole Viau est sanctionnée de nouveau par l’OACIQ
La conseillère municipale de Saint-Sauveur Carole Viau, qui est aussi courtière en immobilier chez Proprio Direct, a été sanctionnée une deuxième fois par le comité disciplinaire de l’Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ), lors d’une audience le 24 mai.
La sanction comprend 60 jours de suspension du permis de courtage, 6 000 $ d’amende et l’exigence de publier un avis de suspension dans le journal. Il s’agissait d’une recommandation commune de l’accusation et de la défense, que le comité disciplinaire va entériner par écrit sous peu.
Mme Viau a plaidé coupable aux trois chefs d’accusation concernant (1) l’information, (2) la vérification et la démonstration de l’exactitude des renseignements, et (3) la tenue, la conservation et l’utilisation des registres et des dossiers.
Facteurs atténuants et aggravants
La procureure, Me Stéphanie Bouchard, a d’abord indiqué que la sanction doit être « juste et équitable, eu égard aux circonstances » et guidée par quatre critères : la protection du public, l’exemple pour les autres membres de la profession, dissuader les récidives, mais permettre de gagner sa vie.
Parmi les facteurs atténuants, Me Bouchard a souligné le plaidoyer de culpabilité de Mme Viau, sa collaboration à la rédaction d’une recommandation commune de sanction, et le risque faible de récidive.
Cependant, parmi les facteurs aggravants, Me Bouchard a noté la longue expérience de Mme Viau, qui travaille dans le domaine de l’immobilier depuis plus de 40 ans, et la rétribution financière qu’elle a retiré de la transaction. Me Bouchard a aussi rappelé que Mme Viau avait un antécédent disciplinaire en 2022, alors qu’elle avait été condamnée à payer des amendes de 6 000 $ et à suivre une formation.
Obligation de donner « toutes les informations »
La plainte contre Mme Viau avait été déposée le 27 septembre 2023. Le premier chef d’accusation concernait l’information. À partir du 17 mai 2021, un test d’air est complété suivant la découverte qu’il y a déjà eu une culture de cannabis dans la propriété dont Mme Viau représente le vendeur. Les résultats de ce test d’air sont transmis à toutes les parties. Mais le rapport explicatif, qui vulgarise ces résultats techniques et donne des recommandations, n’est pas transmis à l’acheteur.
Me Bouchard a qualifié la gravité objective de cette infraction d’« élevée ». « Le courtier a l’obligation de donner toutes les informations pertinentes à une transaction, incluant celles qui sont négatives. Le courtier doit agir avec transparence. L’intimée [Mme Viau] ne pouvait pas garder le résultat du rapport [de recommandation suite au test d’air] pour elle. »
Ce rapport indiquait la présence de spores et de mycotoxines dans certains endroits de la propriété. La procureure a souligné que cette information peut influencer le consentement de l’acheteur.
Vérifier l’information
Entre le 18 et le 19 mai 2021, alors qu’elle était informée d’un événement de culture de cannabis, Mme Viau a inscrit qu’il n’y en avait pas eu dans la déclaration du vendeur, a indiqué Me Bouchard concernant le second chef d’accusation. « Le courtier doit toujours être en mesure de prouver l’information dans ce document. »
Là aussi, Me Bouchard a qualifié la gravité objective de l’infraction d’« élevée ». « Le courtier doit faire les vérifications avant et même pendant la mise en marché. S’il y a un doute, il doit valider. Il doit être proactif. Le public doit pouvoir se fier à l’information disponible. Ça peut avoir un impact sur le consentement. »
La procureure a ajouté que la culture du cannabis est un stigmate associé à l’immeuble. Cela peut rendre l’immeuble plus difficile à vendre et abaisser son prix, sans compter les impacts pour les habitants, comme la présence de champignons. « C’est une information cruciale pour l’acheteur. »
Tenir les registres
Le troisième chef d’accusation concernait la tenue des registres. Le 19 mai 2021, Mme Viau n’a pas transmis sans délai les modifications aux déclarations du vendeur. La gravité est « modérée ». Même si l’infraction peut paraître « technique », elle affecte le devoir de surveillance de l’OACIQ, a indiqué Me Bouchard. « En cas de litige, l’agence n’a pas de documentation. […] Sans documentation, elle ne peut pas exercer son rôle. »
Mme Viau nie avoir commis des erreurs
En entrevue après l’audience, Mme Viau nie avoir commis les infractions pour lesquelles elle est sanctionnée. « Ce n’est vraiment pas ça du tout, selon moi. » Elle dit avoir plaidé coupable sous la recommandation de son avocat, pour éviter un long et coûteux procès.
Concernant le rapport explicatif du test d’air, elle dit : « Je ne l’ai pas eu ! […] Je pensais que [l’acheteuse] l’avait. » Elle ajoute que c’est l’acheteuse qui a trouvé le laboratoire et que, si elle avait des questions sur les tests, elle aurait pu contacter le laboratoire directement.
Concernant la culture de cannabis, Mme Viau dit avoir fait confiance au vendeur, qui l’assurait qu’il n’y en avait pas eu dans l’immeuble. « Je l’ai cru sur parole. » Elle ajoute que la culture de cannabis, démantelée en 2003, n’en était qu’à ses tout débuts. Si les tests d’air ont montré la présence de champignons, c’est plutôt dû à d’autres facteurs, comme l’absence de drain français et un dégât d’eau au sous-sol.
« Je ne suis pas de mauvaise foi. Je suis une femme honnête. Pourquoi j’aurais fait ça ? Je n’en suis pas à ma première vente », se défend Mme Viau.