Santé: Montréal s’approprie les infirmières françaises

Par nathalie-deraspe

Malgré des programmes visant à favoriser l’accueil d’infirmières étrangères dans la région, très peu de candidates s’aventurent au nord de Montréal. Accès a appris que la métropole ne publicise que les emplois locaux.

Automne 2002. Une manchette dans un journal de Gatineau indique que 80% des Françaises embauchées comme infirmières quittent après une année ou deux de travail en terre québécoise. Pierre Simard, retraité de la direction au Centre d’Emploi Canada, sursaute. Dès le lendemain matin, celui-ci joint l’hôpital dans le but d’offrir son soutien. Cinq ans plus tard, le taux de rétention est passé de 20% à 65%.

En plus de trouver un appartement aux futures infirmières, le comité qu’il a mis sur pied inscrit les enfants à l’école et met tout en œuvre pour trouver un emploi au conjoint le plus tôt possible afin de favoriser l’intégration complète du couple. Plusieurs repas collectifs sont également organisés en cours d’année, afin que les anciens accueillent les nouveaux arrivants. Le projet était une première au Québec. Et c’était gratuit!

Pas de demandes

Dès qu’il s’est établi à Saint-Jérôme, Pierre Simard a contacté le CSSS afin d’élaborer un programme semblable dans la région. «J’ai des bénévoles qui n’attendent que ça», dit-il. Déposée depuis plus d’un an, son offre n’a pas encore trouvé écho et pour cause. Le CSSS n’a reçu aucune demande d’infirmières d’outre-mer.
«Le ministère de la Santé et des services sociaux nous ont dit que toutes les infirmières françaises devaient suivre une formation et que celle-ci n’était offerte qu’à Montréal. La seule liste d’emplois qu’on nous a fournie n’indiquait que les postes disponibles dans la métropole. On nous offrait une prime d’installation de 2000$ à 2500$ et on était prêts à vous embaucher dès votre arrivée, raconte Céline (nom fictif). On ne m’a jamais dit que j’allais faire 16$ de l’heure. On te fait miroiter une compensation si tu réussis l’examen d’entrée, mais de fait, j’ai reçu un ajustement pour deux mois et non 8. Au départ, nous avons été très déçus du Québec.»

Céline avait pourtant 13 années d’expérience aux soins intensifs. Dès qu’elle a questionné les perspectives d’emploi en région, on lui a indiqué qu’elle ne pourrait pas profiter d’une prime d’installation. Elle et son conjoint ont tout de même décidé de sortir de la ville. Ils ont abouti par hasard dans les Laurentides. L’infirmière a été accueillie à bras ouverts à Sainte-Agathe, où un programme d’accueil était déjà sur pied. «Si on ne s’était pas perdus en chemin, on n’aurait jamais su qu’on pouvait travailler dans le coin», raconte son conjoint. Aujourd’hui, la petite famille coule des jours heureux dans la région de Saint-Donat. Mais combien d’infirmières le Québec pourrait-il retenir avant qu’elles ne décident de joindre les agences privées, où elles aussi, gagneront 50$ l’heure au lieu des 32$ offerts dans le réseau public? «Il y a encore beaucoup de résistance de la part de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, estime Céline. En France, notre formation correspondrait au BAC, mais elle n’est pas reconnue à sa juste valeur», conclut-elle.

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