Tour de passe-passe à Piedmont?
Par nathalie-deraspe
En novembre dernier, Vidéotron érigeait une antenne-relais pour cellulaires dans le stationnement des autobus Dagenais à Piedmont. La tour était installée pour un maximum de trois mois, promettait le maire, Clément Cardin. À quand le démantèlement?
Beaucoup moins prestigieuse que les tours érigées au cours des dernières années dans les montagnes avoisinantes, cette construction est apparue dans le décor sans que trop de gens ne s’en rendent compte. Qui plus est, l’installation apparaissait le long de la route 117, en plein secteur commercial.
Industrie Canada indique que le promoteur est exempté des exigences de consultation du public selon la procédure sur l’emplacement des bâtis d’antennes pour les tours, pylônes ou autres bâtis d’antenne de moins de 15 mètres au-dessus du sol. La tour en question devait à l’origine être plus élevée, mais Vidéotron a finalement convenu de réduire la taille de celle-ci. Peut-être, justement, pour éviter des consultations auprès de la population. L’entreprise a obtenu l’aval de Piedmont en moins de deux.
Clément Cardin avait assuré ses électeurs que l’installation serait démantelée dans les trois mois suivants. Aujourd’hui, le maire se ravise: «On s’est trompés. On aurait dû dire six mois.»
David Dagenais, des autobus du même nom précise: «On a parlé d’un horizon d’un an renouvelable.» L’homme soutient que s’il avait su les problèmes potentiels causés à la santé, il aurait refusé de louer son site pour accueillir pareille installation. «C’est de la pollution visuelle. La municipalité fait des lois pour embellir la 117 et ils permettent des tours comme celles-là. S’ils veulent renouveler, je vais leur dire non», promet-il.
Le maire lui-même affirme qu’il s’inquiète davantage de l’esthétique que des questions de santé. «On ne possède pas de preuves tangibles», soutient-il.
Des maisons bombardées d’ondes
Les analyses prises dans une des résidences de la rue Beaulne ont fait sursauter le technicien en hygiène électromagnétique Stéphane Bélainsky, de la compagnie Expertise Électromagnétique Environnementale 3E, qui s’est déplacé sur les lieux à la demande d’Accès. «Dans une approche préventive, ces mesures-là sont considérées comme extrêmes. De nombreuses études de médecins indépendants vont démontrer des effets de santé sous ces niveaux, allègue-t-il. Dans la salle à manger, les mesures atteignaient 30 000 microwatts par mètre carré (uw/m2). Sur le balcon extérieur, 80 000. Le Parlement européen préconise des normes d’exposition à long terme ne dépassant pas les 100 uw w/m2 à l’intérieur et 1 000 à l’extérieur. Au Canada, le Safety Code 6 propose des normes beaucoup plus laxistes, basées sur l’échauffement des tissus vivants: entre 6 000 000 et 10 000 000 uw/m2. Pourtant, un nombre grandissant de personnes disent éprouver des ennuis de santé à des taux nettement inférieurs que ceux-ci : arythmie cardiaque, troubles du sommeil, nausées, etc.»
«Je ne trouve pas ça rassurant, lance la résidente de la rue Beaulne. On n’a même pas été avisés. C’est comme si on avait rien à dire là-dedans. À notre insu, on se fait installer quelque chose qui peut nuire à notre santé.» à vue d’œil, bon nombre de résidences seraient situées dans un rayon de 150 mètres de cette installation et sont en ligne directe avec les émetteurs. Deux facteurs favorisant des expositions très élevées, selon Stéphane Bélainsky. Le principe de précaution soutenu par le Parlement européen préconise que les maisons soient à 300 mètres des tours.
À ce jour, le Ministère n’a pas eu à intervenir dans ce dossier et ne détient aucune information quant au démantèlement de cette tour, avance Michel Cimpaye, relationniste médias pour Industrie Canada. Faux, soutient le maire Clément Cardin. «Notre directeur général a envoyé une lettre à Ottawa il y a au moins six semaines pour faire activer les choses. On a même pas eu d’accusé de réception.» Le maire se dit toutefois confiant de voir le dossier se régler sous peu. À terme, Telus et Vidéotron devraient partager la même tour située rue Belvédère.
Forcer le partage des tours
La MRC des Pays-d’en-Haut entend faire en sorte que les entreprises de télécommunications se partagent les tours afin de limiter leur multiplication sur le territoire. À Wentworth Nord, deux antennes sont en voie d’être implantées sur les terres publiques de la Couronne. Comme ces dernières sont gérées par les MRC, il est possible pour les élus d’intervenir. «On veut faire des partenariats, explique le préfet Charles Garnier, qui précise qu’une clause oblige désormais les entreprises de télécommunications de démolir à leurs frais les tours devenues inutilisables.
Vidéotron compterait ériger sous peu 8 tours dans la MRC. Le préfet n’a pas été en mesure de nous indiquer combien d’installations semblables sont prévues pour Bell et Telus.
L’union des municipalités du Québec entend se saisir du dossier afin de s’assurer que les villes aient un meilleur contrôle sur l’implantation de telles antennes.
Industrie Canada précise qu’au moment d’appliquer les critères d’exclusion, les promoteurs tiennent compte des dimensions physiques du système d’antennes, y compris l’antenne, la tour et le pylône, par rapport à l’environnement local; de l’emplacement du système proposé sur le terrain et de sa proximité aux résidences avoisinantes; de la probabilité qu’une zone ait une importance névralgique pour une collectivité; des exigences de balisage et d’éclairage de Transports Canada visant la structure proposée. La procédure ne précise toutefois pas de distances spécifiques à observer entre les tours et les résidences avoisinantes.