Un enjeu régional de taille

Par cynthia-cloutier-marenger

Projet de centre commercial aux anciennes Cascades d’eau de Piedmont

La question se pose étant donné la nature du projet présenté, qui comprend un secteur commercial divisé en deux zones totalisant environ 950 000 pi2. Situées en bordure de l’autoroute 15, ces zones seraient destinées à recevoir des bâtiments s’étendant entre 10 000 pi2 et 20 000 pi2 maximum, soit des commerces dits «régionaux».

Comme l’explique Gilbert Aubin, directeur général de Piedmont, les commerces régionaux, de plus grande envergure que les commerces locaux, sont assez grands pour desservir une clientèle régionale. Ils sont toutefois loin de la taille des Costco (124 000 pi2 en Amérique du Nord) ou des Walmart (en moyenne 120 000 pi2 au Québec).

Pour avoir une idée de la superficie envisagée, notons que la pharmacie Jean Coutu de Saint-Sauveur compte 10 200 pi2 et que le supermarché IGA de Sainte-Adèle, en processus d’agrandissement pour atteindre 35 000 pi2, en fait actuellement 24 000.

Quant au nombre de commerces prévus, selon MM. Aubin et Guylain

Verdier, propriétaire du Groupe Verdier, il est impossible à définir à cause de l’état d’avancement du projet, encore au stade des consultations. Louise Guertin, candidate à la mairie de

Piedmont, avance pourtant les chiffres de 25 à 30 boutiques de 20 000 pi2, obtenus auprès d’experts en urbanisme.

Un besoin dans la région?

D’après les paramètres du projet actuel, l’incidence du centre commercial de Piedmont dépasserait donc les limites de la municipalité pour toucher le centre des Laurentides. Économiquement, la région est-elle en mesure de l’accueillir? Selon Guylain Verdier, la réponse est sans équivoque: «Personne ne va investir dans un terrain vacant sans potentiel.»

Pour appuyer ses dires, M. Verdier mentionne les études de marché qu’il a commandées avant de concrétiser son investissement de 3,5 M$. «Les études ont été très concluantes, assure-t-il. Elles ont jugé qu’il y a un gros potentiel dans la région, qu’il y a une demande pour des commerces régionaux. Si ce n’était pas à Piedmont, ça pourrait être à Sainte-Adèle.»

Interrogé sur le sujet, Stéphane Lalande, directeur général du Centre local de développement (CLD) des Pays-d’en-Haut, confirme que, dans certains secteurs tels l’ameublement, l’électronique et l’automobile, les besoins non satisfaits créent des «fuites commerciales». Il ajoute que l’augmentation de la population de la MRC – 78 % entre 1991 et 2011 – a entraîné une hausse des besoins commerciaux.

Une question de choix

Malgré ce constat, M. Lalande questionne la nécessité de posséder des commerces régionaux sur le territoire. «Les commerces régionaux ne sont pas nécessaires à la survie de la population», rappelle-t-il, précisant que les secteurs de proximité telles l’alimentation et la restauration répondent amplement à la demande.

Selon lui, la décision d’accueillir un type de commerce particulier doit être prise en considérant plusieurs facteurs, comme le genre de services désirés ou l’implication de leurs propriétaires dans le tissu social de la région.

Ainsi, si les commerces régionaux offrent plus de choix, les commerces locaux, quant à eux, possèdent l’avantage du service personnalisé. De plus, leurs propriétaires s’impliquent souvent dans la communauté. «Est-ce qu’une entreprise dont le siège social est à Montréal va contribuer à la communauté? se

demande Stéphane Lalande. Pas certain…»

Les effets de la concurrence

Enfin, il va de soi que, plus il y a de commerces sur un territoire, plus le chiffre d’affaires de chacun est fractionné. Le directeur général du CLD mentionne qu’avec un seuil de rentabilité souvent difficile à atteindre pour un commerçant, une variation de 10 à 15% peut faire la différence entre rester ouvert ou fermé.

Quant à Guy Goyer, directeur général de la Chambre de commerce de Saint-Adèle, il partage cette vision. «C’est

évident que ça va nuire aux petits commerces de Sainte-Adèle et de Saint-

Sauveur, ajoute-t-il. Heureusement que ce n’est pas directement dans notre cour.»

La concentration des commerces dans la région ayant été portée à l’attention de Guylain Verdier, celui-ci s’en dit conscient, mais invoque la libre entreprise. «C’est aux commerçants de juger s’ils prennent le risque de s’implanter à Piedmont malgré la compétition», conclut-il.

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