Un grand pas pour la défense du français
Jeudi dernier, le gouvernement du Québec a déposé le projet de loi 96 qui a pour titre la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français. Il était fermement attendu et a été généralement bien accueilli.
« Le français sera toujours vulnérable en raison de la position du Québec en Amérique du Nord. Chaque génération à la responsabilité de la survie de notre langue », a affirmé François Legault en conférence de presse. 44 ans après le dépôt de la loi 101, ce projet de loi s’inscrit dans la continuité de la lutte à la protection et à la pérennité du français. Le premier ministre du Québec l’a qualifiée de « nécessaire » et « raisonnable ».
De son côté, Simon Jolin-Barrette, ministre responsable de la Langue française, a parlé d’un renouveau, ainsi que d’une relance linguistique. « La langue française est notre seule langue officielle et notre langue commune, et il est temps que cela se reflète dans toutes les sphères de la société ». Les modifications législatives touchent en effet plusieurs secteurs d’activité, dont le travail, les services, le commerce, l’éducation, l’apprentissage, la justice et la francisation.
Dès l’adoption de la loi, le gouvernement du Québec entend utiliser la clause dérogatoire afin de la protéger d’éventuelles contestations institutionnelles devant les tribunaux.
« Le symbole, c’est important »
André Marion, directeur de la Société Nationale des Québécoises et des Québécois des Laurentides, s’est dit impressionné par le projet de loi déposé la semaine dernière. « C’est un grand pas pour la défense et la prévention de la langue française », indique-t-il. Certains considèrent que le projet de loi est davantage symbolique et trop peu concret. Monsieur Marion ne partage pas cet avis. « Le symbole, c’est important », affirme-t-il.
Se considérant lui-même comme plutôt modéré, il salue la retenue du gouvernement. « Si le gouvernement était allé plus loin, ça aurait peut-être été trop agressif. Pour atteindre les objectifs, il est préférable de faire preuve de modération, plutôt que de confronter. »
Pour André Marion, la création d’un ministère de la Langue française, ainsi que le renforcement du champ d’action de l’Office québécois de la langue française font partie des mesures les plus significatives. Cependant, il faudra voir jusqu’où s’étendront leurs activités et leur pouvoir. Comme unique point faible, il identifie l’absence de cibles précises. « Au-delà de la loi, il faudra qu’il y ait des objectifs clairs et quantifiables, ainsi que des obligations de résultats. »
La responsabilité aux municipalités
Dans les mesures qui touchent davantage la région des Laurentides, on retrouve celle concernant le statut bilingue des municipalités. André Marion salue l’habileté du gouvernement pour régler la question. Dorénavant, les villes se trouvant sous le seuil de 50% de population anglophone perdront leur statut bilingue, à moins que les élus adoptent une motion pour le conserver dans les 120 jours suivant l’application de la loi. On remet donc le problème dans la cour des municipalités. André Marion est confiant que cette mesure pourrait décourager certaines villes à adopter une motion, surtout si leur pourcentage est faible. Il donne l’exemple de Rosemère qui est à 12,1% de population anglophone, et de Morin-Heights, à 18,3%.
L’essentiel
Maintenant, le plus important reste à faire, selon André Marion. « C’est une bonne chose d’avoir fait la loi, mais l’essentiel, ce n’est pas ça. L’essentiel, c’est de développer la fierté. La fierté de parler français, de l’écrire, de la chanter, de la slamer. Ce n’est pas une loi qui peut faire ça, c’est l’éducation et la famille, notamment. L’essentiel ce n’est pas quelque chose qui se change avec les lois, mais avec la culture », conclut-il.
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Quelques éléments clés du projet de loi 96
- Garantir le droit de travailler en français au sein de l’État québécois
- Créer un ministère de la Langue française
- Créer une entité indépendante : un commissionnaire à la langue française, nommé par l’Assemblée nationale
- Appliquer la loi 101 aux entreprises de 25 à 49 employés
- Protéger le droit de tout travailleur de gagner sa vie en français
- Reconnaître le droit à l’apprentissage du français
- Consacrer le français comme langue commune et comme langue d’intégration des personnes immigrantes
- Protéger le droit du consommateur québécois d’être informé et servi en français
- Geler la proportion des étudiants dans le réseau collégial anglophone à 17,5 %
- Reconnaître dans la Loi constitutionnelle de 1867 la nation ainsi que du français comme seule langue officielle et commune du Québec.
- Appliquer la loi 101 aux entreprises de compétence fédérale