La Coupe est pleine? À suivre…
Par pierre-birlichi
plaisir du vin
Quelle ne fut pas ma surprise lorsqu’en surfant sur la toile, j’ai lu les réactions des lecteurs à l’article de Jacques Benoît paru le 19 janvier dans le journal La Presse. Dans son papier, le célébrissime collaborateur nous faisait part de l’augmentation des prix de 390 produits, et la prochaine nomination d’un nouveau Vice-président pour la Société des Alcools du Québec. Certains lecteurs ont aussitôt lié les deux informations.
Morceaux choisis du courrier des lecteurs:
«Autant qu’à y être pourquoi pas nommer 4 ou 5 autres vice-présidents… et continuer à augmenter les prix…»
«Dites-vous bien que tous les surplus vont dans les coffres de l’état, donc ce sont des vases communicants qui font que vous payez moins d’impôts…»
«Comment voulez vous avoir confiance dans une société, en situation de monopole, qui nous prend pour des pigeons: entre novembre dernier et aujourd’hui le prix du $ US n’a pas varié, hors la SAQ augmente sa tarification vis-à-vis du $ US…»
«Dans le Globe and Mail d’aujourd’hui, un article sur la diminution des prix des vins en Ontario.»
Je suis stupéfait, mais pas étonné, par la violence des propos que j’ai parcourus sur le site. En essayant de mieux comprendre, une phrase toute faite a frappé mon esprit pour résumer notre relation avec notre monopole: «Je t’aime, moi non plus». Sans vouloir donner raison aux uns et tort aux autres, je vais tenter de vous livrer un propos qui prendra le parti pris d’un très bon vin, c’est-à-dire de l’équilibre.
Tout d’abord, je suis d’avis qu’il nous faut rendre hommage, en toute objectivité, à la SAQ. Comment ne pas être fier d’une compagnie publique qui réalise un chiffre d’affaires de 2,98 milliards de dollars, qui rapporte plus de 1.4 milliards dans les caisses de l’état, pour un profit net de plus de 710 millions? Avec un ratio [Bénéfice Net sur Chiffre d’Affaires] de plus de 33%, je sais que notre monopole est envié dans le monde entier. Lorsqu’un «service public» à ce point rentable redistribue ses gains pour le trésor et le bonheur collectif ne devrions-nous pas nous réjouir et nous rappeler qu’il n’y a que très peu d’équivalents dans le monde?
En même temps, il faut reconnaître que la frustration est grande pour toute une frange de consommateurs. Les quelques réactions reprises plus haut (j’ai laissé à votre curiosité le soin de lire les plus virulentes sur le site de La Presse) laissent transpirer un phénomène d’attraction et de répulsion. En complétant la lecture de toutes les réactions, je me lance et vous livre une analyse toute personnelle du ressenti de certains vis-à-vis de la SAQ: «je suis prisonnier d’un système qui choisit pour moi ce que je bois et ne peut pas boire, qui m’offre un produit de consommation courante au prix d’un produit de luxe». Cette impression, cette perception est à ce point vivace que ni les 6000 produits disponibles, ni les 800 nouveaux produits retenus en 2006, ni la soupape des Importations privées, ni l’uniformité des prix pour un même vin dans l’ensemble de la Province ne parviennent à dissoudre un malaise, savamment entretenu par une certaine presse.
Il demeurera donc toujours parmi nous quelques irréductibles qui considèreront que la SAQ en fait toujours plus…pour nous vendre toujours plus et toujours plus cher. En faisant cela, elle ne réalise que son mandat. Spéculant sur une baisse des prix du vin, les proprivatisations continueront d’ergoter qu’en plus de contribuer au désendettement de l’état, la vente de la SAQ au secteur privé leur permettrait de sauver quelques dollars qui se retrouveraient comme par enchantement dans notre économie.
Les promoteurs de ces courants de pensées ont créé l’industrie du Père Noël et bâti Disneyland.