Pourquoi les prix des vins américains ne baisseront pas… pour le moment

Par pierre-birlichi

Il n’est actuellement pas difficile de rencontrer un amateur de vin américain en colère. Il est encore plus facile d’entendre un client de la SAQ se plaindre des prix élevés du vin en général, nonobstant l’envolée du huard vis-à-vis de la majorité des autres devises.

Sears, et dans une moindre mesure Wall Mart, ont annoncé quasiment simultanément que le prix de leurs produits en provenance des États-Unis baisseraient très prochainement. Cette amorce de mouvement ne semble pas suivie par les concessionnaires (un clin d’œil à Alain qui se reconnaîtra)… ni par la Société des Alcools du Québec. Les raisons abondent. Je dois reconnaître qu’en ce qui concerne notre monopole, les procédures d’achat existent et les justifications sont fondées.

Aussi, je vous propose d’entrer ensemble dans la mécanique d’achat de l’ancienne régie. Je suis certain que vous serez nombreux à être intéressés.

Lors de la sélection d’un vin, le plus souvent à partir d’un appel d’offre, le vigneron doit indiquer la devise de son choix. Dans le passé, les Européens appréciaient d’être réglés en euros, les Américains en dollars. Toutefois, cet avantage se retourne contre le vignoble puisque la SAQ fixe à son (notre) profit, tous les taux de change des devises pour ses transactions. On comprend mieux pourquoi 80% des fournisseurs opteraient désormais pour le dollar canadien comme devise de paiement. Mais voici d’autres raisons tout aussi importantes: Les exportateurs supportent, donc maîtrisent eux-mêmes leurs risques de change qu’ils évaluent et couvrent en fonction de leurs besoins et de leurs stratégies. La SAQ fixe le prix de vente en succursale à partir du prix au départ du chais auquel s’ajoute naturellement le transport, les différentes majorations (notez bien que le mot «marge» est banni) et les taxes que nous connaissons tous. Ce qui équivaut donc à dire que 5 dollars canadiens d’aujourd’hui valant 5 dollars canadiens de demain, le prix de vente en succursale est stable, du moins sur ce point. En effet, la SAQ peut à tout moment réduire ou augmenter ses majorations. Un prix stable garantit le positionnement du produit vis-à-vis de la concurrence d’un segment donné. Varier, c’est changer les repères du consommateur, et risquer de chahuter les équilibres établis. En période de hausse du dollar américain, le consommateur québécois de vins californiens ne ressent aucune secousse, et ne se plaint pas. En période de baisse de la devise de nos voisins, il faut tout simplement lui expliquer pourquoi il ne profite enfin pas de ce dont il a toujours rêvé: s’offrir les cousins du sud pour pas cher. Il nous reste à évoquer les 20% des vignerons qui souhaitent encore être réglés avec des billets verts. Pour eux aussi, 5 dollars US d’hier seront toujours les 5 dollars US de demain. Le chèque qu’ils reçoivent de la SAQ est donc identique à quantité constante. Ces petits exploitants n’ont généralement pas la culture financière des subtilités des options de change et autres couvertures à terme. Contrairement au cas précédent, le prix de leurs vins devrait donc légèrement baisser…lors de la prochaine livraison seulement. En effet, les vins américains que nous trouvons actuellement sur nos tablettes, ont été réservés et/ou achetés à la fin de l’hiver dernier, ou bien au début du printemps. Le taux de change n’était pas exactement le même qu’aujourd’hui. Pour illustrer notre démonstration, il fallait environ 1.1755 huard pour un dollar US en janvier 2007. Le taux moyen tournait autour de 1.1681 en mars pour atteindre 0.9809 depuis le début octobre. Je ne serai donc pas étonné de voir le prix de certains vins américains baisser avec tambours et trompettes, façon Sears, dans les prochains mois…une fois seulement que les stocks auront été écoulés, et que de nouvelles commandes auront été passées…à moins que…

D’ici là, si vous êtes vraiment contrarié, profitez de l’occasion pour vous laisser séduire par des vins d’autres origines, par les douceurs subtiles que vous offre la SAQ et certaines agences d’importations privées.

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