Courtoisie

Buvons les Laurentides : Les microbrasseries de la région s’unissent

Par Simon Cordeau (initiative de journalisme local)

Une vingtaine de microbrasseries des Laurentides ainsi que des vignobles, des cidreries et des hydromelleries s’associent pour former l’organisme Buvons les Laurentides. « On a eu notre assemblée générale le 21 février. Donc on est officiellement constitué, avec un conseil d’administration », se réjouit Marc Brunelle, fondateur et directeur général de Buvons les Laurentides.

L’organisme organise d’ailleurs le Festival Bière des Bois, qui se tiendra au parc régional du Bois de Belle-Rivière à Mirabel du 22 au 24 mars. En plus de favoriser les échanges entre les acteurs du milieu, Buvons les Laurentides souhaite aussi développer une carte des producteurs locaux, un passeport de coupons rabais, et un kiosque mobile pour aller dans les festivals.

Un premier festival

« Un de nos membres, les Bières Philosophales, parle depuis longtemps de faire un festival de bière à Mirabel », explique M. Brunelle. Cependant, ça prenait un organisme pour se charger de l’événement. Avec la création de Buvons les Laurentides, la première édition du Festival de Bière des Bois peut devenir réalité. Une quinzaine de microbrasseries des Laurentides et d’ailleurs seront présentes toute la fin de semaine, en plus de diverses activités comme des musiciens sur scène, le lancer de la bûche, un concours du plus beau bûcheron et des épreuves d’hommes forts.

Surtout, le festival s’allie avec l’industrie de l’érable et lance un concours pour la meilleure bière à l’érable, s’enthousiasme M. Brunelle. « Il y a 11 brasseries qui ont soumis une bière au concours. » Ces bières seront jugées à l’aveugle par un jury composé d’experts, d’élus locaux et de membres du public. « On souhaite que ce soit une bière des Laurentides qui l’emporte, mais peut-être pas ! », lance M. Brunelle en riant. Les gagnants des médailles d’or, d’argent et de bronze seront révélés dimanche 24 mars, à 14 h. Les festivaliers pourront aussi voter pour la bière du public, sur la page Facebook du festival.

Après le concours, un comité sera mis sur pied pour établir des critères plus précis autour de la bière à l’érable et, éventuellement peut-être, définir un style unique au Québec. « Dans les Laurentides, il y a déjà quatre brasseries qui sont des érablières. Ça crée un engouement, ça amène des gens ici et des réflexions sur la question », croit M. Brunelle.

S’unir

Le premier conseil d’administration de Buvons les Laurentides. Courtoisie

Marc Brunelle a l’idée d’unir les brasseurs de la région il y a environ un an. « Depuis quelques années, j’ai une petite entreprise, Culture Bière. Je fais des ateliers de dégustation de bières. Donc je me promène beaucoup dans les microbrasseries. Je connais pas mal de monde dans le milieu, dans les Laurentides. Je prends des nouvelles de l’un, de l’autre », raconte M. Brunelle.

Il se rend compte que les brasseurs travaillent en silo, chacun de leur côté. « Ils font et vendent de la bière, mais ils n’ont pas vraiment le temps de faire autre chose. » Alors, pourquoi ne pas s’associer ? « Il y a déjà la Route des bières de l’Est du Québec, et aussi Lanaubière, qui a été créé dernièrement dans Lanaudière. On pourrait faire quelque chose de semblable. »

Avec François-Xavier Leprohon, il fait le tour des brasseurs des Laurentides. L’objectif est d’en convaincre au moins les trois quarts, pour avoir assez de légitimité pour aller voir les instances de développement local. « Il y a 23 permis de brassage sur les 8 MRC du territoire. On en a 20 qui ont signé un formulaire d’intention », se félicite M. Brunelle.

Commencent donc les démarches pour créer un organisme à but non lucratif (OBNL). « Derrière la cravate, j’ai beaucoup d’expérience en gestion d’OBNL, tant comme directeur général que comme administrateur », indique M. Brunelle. Mais mobiliser le milieu se révèle plus difficile que prévu, confie-t-il. « Pas parce que les gens trouvaient que ce n’était pas une bonne idée, mais juste parce qu’ils n’ont pas le temps. » Ainsi, à l’automne, il est décidé d’inclure tous les producteurs d’alcool des Laurentides, comme les cidreries, les distilleries et les hydromelleries, pour avoir plus d’impact.

Un carrefour

Buvons les Laurentides est un peu comme une « chambre de commerce sectorielle » qui met en valeur une industrie sur son territoire, explique M. Brunelle. « L’idée plus large, c’est de promouvoir l’achat local et de garder une économie forte dans les Laurentides. »

Il donne l’exemple de touristes des États-Unis ou de l’Ontario qui chercheraient des produits locaux à l’épicerie. « Les bières locales sont là, mais elles sont noyées dans l’offre des bières de microbrasseries québécoises. Et il y en a beaucoup ! » De la même manière, « il faut sensibiliser les restaurateurs à mettre des produits locaux sur leur table », insiste M. Brunelle. « Pour moi, il n’y a aucune valeur d’aller à Tremblant dans un bar mondialement reconnu, d’y commander un drink, et que ce soit du Jack Daniels ou du fort américain dedans, quand on a des distilleries et des produits incroyables à quelques kilomètres de là », illustre-t-il.

C’est pourquoi l’organisme souhaite développer une carte en papier (et disponible en ligne) des producteurs locaux, avec des itinéraires suggérés. On souhaite aussi créer un passeport Buvons les Laurentides : un carnet vendu 50 $ mais contenant 300 $ de valeur par exemple, avec des coupons pour une pinte, une dégustation ou un rabais chez les producteurs laurentiens. Enfin, l’organisme aura un kiosque mobile pour aller dans les festivals et autres événements. « Ça nous permet d’aller à l’Oktobierfest de Sainte-Adèle, par exemple, et de mettre en vitrine les produits des producteurs qui ne sont pas là, comme des vignobles et des cidreries », explique M. Brunelle.

Surtout, Buvons les Laurentides servira de carrefour pour que les producteurs se rencontrent et échangent. « Il y a déjà des projets mis en branle juste parce que les gens se sont rencontrés à l’assemblée générale », se réjouit M. Brunelle.

S’adapter

L’industrie brassicole semble passer un moment difficile, lorsqu’on consulte les médias. On peut penser aux déboires de la chaîne de boutiques Tite Frette, à l’appel à l’aide de la microbrasserie À l’abri de la tempête ou à la fermeture de la coopérative MaBrasserie. Depuis la fin de la pandémie, les gens achètent moins de bière, et les coûts des matières premières ont augmenté, ce qui se reflète dans le prix des produits. « On en parle beaucoup. Les gens commencent à parler de crise », admet M. Brunelle. Mais selon lui, la situation est plus complexe et nuancée.

« Dans l’association, on a une vingtaine de membres du milieu brassicole, et ils ont 20 modèles d’affaires différents. […] Chaque modèle à ses enjeux. Mais je ne crois pas que l’industrie est en crise. Elle est en adaptation. Et l’association est là pour ça : pour créer des synergies et trouver des solutions innovantes », illustre-t-il.

Dans le cas de Tite Frette, « c’est le modèle d’affaires le problème », croit-il. « Pour un magasin de spécialité qui vend juste de la bière, la portée est limitée. Combien de personnes dans la population générale vont faire le détour pour acheter leur bière, quand il y a 300 sortes à l’épicerie ? » À l’inverse, l’offre très grande dans les épiceries crée des « vieilles bières périmées sur les tablettes » et rend difficile pour les brasseurs de se démarquer.

Selon M. Brunelle, celles qui réussiront à se tailler une place sur les tablettes, ce sont les brasseries intermédiaires, comme Boréale ou Dieu du Ciel!, qui peuvent brasser de gros volumes et donc offrir un bon produit à faible coût. Les plus petites brasseries, quant à elles, devraient se concentrer sur le marché local, en vendant sur place ou dans les épiceries à proximité. « Le modèle d’affaires ne sera pas de mettre une canette sur les tablettes d’épicerie. Ça peut être de venir chez nous boire de la bière, comme le boucher et le boulanger du coin. Ça, je crois qu’il y a encore de l’avenir là-dedans », soutient M. Brunelle.


Festival Bière des Bois

  • Quand :  22 au 24 mars
  • Où : Parc régional du Bois de Belle-Rivière à Mirabel
  • Qui : 
    • Les Bières Philosophales
    • Anorak
    • Sir-John
    • Wilsy
    • Camp de Base
    • L’Entêté
    • Le Baril Roulant
    • La Veillée
    • Du Lièvre
    • Nouvelle-France
    • Ruisseau Noir
    • Maltstrom
    • Mille-Îles
    • Noire et Blanche
    • Shawbridge
    • La Souche

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