(Photo : Marie-Catherine Goudreau)
Marie-Andrée Gagnon avait préparé des activités pour la Saint-Valentin lors de la visite du Journal.

La nature comme matériel d’apprentissage

Par Marie-Catherine Goudreau

Je me rends à l’école primaire de la Source à Saint-Jérôme pour rejoindre la classe préscolaire extérieure de Marie-Andrée Gagnon. Il fait soleil et la température est au-dessus de la barre du 0 en cette journée de février, par chance. Je vois au loin un groupe d’élèves enjoués se diriger vers la forêt derrière l’école.

Arrivés au bon endroit, sac-à-dos sur les épaules et raquettes chaussées aux pieds, les élèves sont à l’heure de la collation. Tous s’assoient sur la neige et déposent leurs effets personnels sur une bache que Mme Gagnon a pensé apporter. J’en profite pour discuter avec les élèves de ce qu’ils aiment de faire l’école à l’extérieur. « Du ski de fond ! » « Glisser ! » « Faire des bonhommes de neige ! », répondent-ils un après l’autre.

Ensuite, Mme Gagnon explique les activités de la période. Comme la Saint-Valentin arrive à grand pas, elle a préparé trois ateliers pour offrir de l’amour aux amis les animaux dans la forêt. Les élèves peuvent utiliser des cartons en forme de coeur pour y écrire un mot, mettre du beurre d’arachides et des noix, puis l’accrocher sur un arbre pour que les animaux en profitent.

Les élèves peuvent aussi faire des coeurs sur les arbres avec de la neige, ou encore colorer la neige avec des sprays de couleurs. Mais ils sont aussi libres d’aller glisser, de jouer dans la neige, d’escalader des roches. Avant de les laisser aller aux activités libres, elle rappelle le Code de vie dans la forêt :

  1. Je te vois, tu me voies.
  2. Au son du tambourin, je me rassemble.
  3. Les branches ont besoin d’espace. J’ai des comportements sécuritaires.
  4. Je me respecte, je respecte les autres et la nature.
  5. Je demande avant de goûter.

Beau temps mauvais temps : dehors !

Marie-Andrée Gagnon fait l’école à l’extérieur depuis quelques années maintenant. Elle s’intéresse au sujet depuis longtemps et a lu de nombreux ouvrages, mais ce n’est que récemment qu’elle a décidé de se lancer. « Je ne le mettais pas en place parce que je croyais que c’était irréalisable avec 19 élèves. Mais avec la pandémie, les groupes étaient moins nombreux, alors je me suis dit : si je n’essaye pas, je ne le ferais jamais », explique Mme Gagnon.

Ainsi, grâce à l’appui et l’aide de la direction de l’école, Mme Gagnon a pu suivre une formation comme Praticienne d’école de la nature chez Forest School Canada / Alliance Enfant et Nature Canada. « Je suis toujours à la recherche de façons d’enseigner autrement et de nouvelles pédagogies. J’essaye que les enfants soient actifs dans leurs apprentissages, qu’ils se sentent importants et voient qu’ils ont un pouvoir sur leur éducation », dit-elle.

L’enseignante a donc créé un programme préscolaire : La classe nature de Mme Gagnon. Par celui-ci, elle vise le développement global des enfants à l’extérieur des murs de l’école. Ainsi, chaque jour, elle passe de deux à trois heures à l’extérieur, et ce, beau temps, mauvais temps. Même quand il fait – 30 °C ? « Oui ! Cette journée là, on est sorti juste un 15 minutes. J’ai montré aux enfants les risques lorsqu’il fait un froid extrême dehors », soutient-elle. Ils ont pris connaissance de ceux-ci et sont mieux préparés face à cette température.

« La nature devient notre matériel d’apprentissage. » – Marie-Andrée Gagnon

Ce programme « permet aux enfants de créer des liens forts avec la communauté et par le fait même, ils développent leur confiance en eux et un sentiment de sécurité », dit Mme Gagnon. Selon l’enseignante, la classe nature favorise le contact avec la nature, l’émerveillement, la curiosité, le plaisir d’apprendre et le développement personnel. « L’élève acquiert un amour pour le monde du vivant et du non-vivant et sera, selon moi, plus enclin à devenir un éco-citoyen », rapporte-t-elle.

Par ailleurs, selon des professeurs de quatrième année de la même école, les élèves qui ont fait la classe nature se démarquent par leur débrouillardise, leur soif d’apprendre et leur motricité globale. « Ils sont curieux, développent une belle confiance en soi et vont avoir le goût de venir à l’école », souligne l’enseignante.

De plus en plus populaire

Au cours des dernières années, la demande pour sa classe n’a cessé d’augmenter. « Cette année, j’ai pris 19 élèves, mais j’ai dû en refuser ! » Plusieurs parents du quartier souhaitent que leurs enfants soient dans cette classe.

Selon elle, les enseignants doivent essayer plusieurs fois l’enseignement à l’extérieur pour que les élèves ne voient pas cela comme une récréation. « La fréquence fera en sorte qu’ils vont s’adapter. S’ils vont dehors chaque semaine, ils vont être moins fous disons ! »

Marie-Andrée Gagnon partage par ailleurs régulièrement ses activités de classe sur Instagram et FacebookElle forme aussi d’autres enseignants, ailleurs dans le Centre de services scolaire de Rivière-du-Nord ou encore dans l’école, qui souhaitent inclure ses méthodes dans leur classe. De plus en plus de professeurs lui demandent des conseils, des références ou des livres pour en apprendre plus sur cette pédagogie, soutient-elle.

« Je veux donner le goût aux écoles de faire de l’enseignement à l’extérieur. Je partage mes connaissances dans le but que la population se mobilise, sorte dehors et connecte avec la nature ! On protège ce que l’on aime, et c’est ce côté environnemental qui me pousse aussi à faire ça. Pour que ces élèves deviennent des gens ouverts, des éco-citoyens. »

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