Les Fromagiers de la Table Ronde : Faire du fromage en famille
Fondée en 1922, la ferme Alary à Sainte-Sophie a déjà 102 ans. En plus des vaches laitières, la ferme élève des cochons, des lapins, des poulets et des poules pondeuses, des moutons, des chèvres… « Pour les enfants, c’est plus l’fun. Juste les vaches, ça peut être ennuyant à s’occuper », explique Elizabeth Alary en riant. Elle fait partie de la 4e génération d’Alary à travailler à la ferme. Certains de la 5e génération s’impliquent aussi déjà, explique-t-elle.
Depuis 2003, la ferme produit surtout du fromage, sous le nom des Fromagiers de la Table ronde. « C’était en grande partie le projet de mon oncle Ronald et de mon cousin Gabriel. On avait trop de monde qui voulait revenir sur la ferme. Construire la fromagerie, ça faisait de la place pour tout le monde », raconte Elizabeth.
100 % local
Quand la fromagerie a ouvert, « on était la seule ferme biologique au nord de Montréal. Donc il n’y avait pas de marché pour notre lait », raconte Ronald Alary. Transformer ce lait en fromage permettait donc de le valoriser.
« On a commencé avec deux fromages. Avec les années, on est rendu à plus d’une dizaine », continue Ronald. Au début, environ 20 % de la production de lait était transformée. Mais depuis quelques années, toute la production devient du fromage. Les quelque 65 vaches de la ferme produisent environ 1 000 litres par jour. De plus, la ferme est autosuffisante : tout ce que les vaches mangent est cultivé sur la ferme.
Les fromages sont vendus un peu partout au Québec, et même en Ontario, à Vancouver et à Edmonton. « Mais il y a des fromages qu’on garde exclusivement ici pour notre clientèle, en petite quantité. » Pour y goûter, il faut venir là où le lait devient fromage.
Du lait aux grains
Après avoir enfilé des bottes, un sarrau et des filets pour les cheveux et la barbe, on entre dans la fromagerie. « Le matin, on a la traite de la veille, qui arrive vers 4 h du matin. […] Puis vers 6 h, on reçoit la traite du matin », explique Elizabeth.
Le lait est d’abord pasteurisé à 63°C pendant 30 minutes. Il est ensuite refroidi entre 35 et 37°C selon les fromages. « C’est là qu’on va ajouter les ferments. Ce sont eux qui vont nous donner la croûte et le goût. » La plupart des fromages ont entre deux et cinq ferments, pour développer un goût riche et complexe.
Ensuite, il faut laisser maturer un peu. « On va attendre une à deux heures, selon les fromages. On va laisser les ferments travailler », explique Elizabeth. Puis on ajoute la présure. Extraite de l’estomac des petits ruminants, c’est « une enzyme qui fait cailler le lait. » Le lait gagne alors une texture gélatineuse qui rappelle le Jello.
Après un certain temps, on coupe le fromage. « Si on veut une pâte molle, on y va avec un grain plus gros. Donc le petit lait va rester à l’intérieur. Et si on veut une pâte ferme, on va couper plus petit et le grain va s’assécher. Aujourd’hui, on fait une pâte semi-ferme, donc on va utiliser deux sortes de couteaux pour avoir un grain moyen », nous montre Elizabeth.
Par la suite, on brasse les grains plus ou moins longtemps et rapidement. Une fois qu’ils sont prêts, les grains vont dans des moules puis seront égouttés ou pressés, selon la texture voulue.
La fleur de l’âge
Enfin, les fromages sont prêts… à vieillir ! Ils sont donc entreposés dans un premier haloir, c’est-à-dire une salle d’affinage. Dès qu’on entre, un bouquet d’odeurs variées nous accueille. « Ici on est à 12,5°C et environ 97 % d’humidité. Ça va favoriser le développement de la croûte », explique Elizabeth.
Pour quelques fromages, dont le Rassembleu, le Fleuron et la Nymphe, on laisse la croûte se développer seule. Pour les autres, on lave la croûte deux à trois fois par semaine. Les pâtes molles passeront deux semaines ici. Les Ménestrels, eux, restent six semaines, avant de changer de pièce.
Dans le deuxième haloir, l’odeur est plus âcre, alors que les croûtes maturent. « Ici, on est à 90 % d’humidité. Déjà, c’est plus sec. Et on est autour de 10-11°C. » Certains fromages ont des pointes manquantes : des tests sont faits régulièrement pour assurer le contrôle de la qualité.
Les Ménestrel continuent de vieillir ici de six à huit mois sans trop d’intervention. « Les autres fromages vont faire un stop ici avant l’emballage. Ça va leur permettre de sécher un petit peu. »
Chaussure à son pied
Produire des fromages au Québec offre une grande liberté. « En France, quand tu es dans une région qui fait du comté ou du camembert, c’est ce que fait ta fromagerie. Ici, on n’a pas de barrière. Je peux faire du cheddar, comme je fais du bleu, ou un comté. Je n’ai pas de limite. »
Cela varie le quotidien des fromagers qui, admet Elizabeth, est parfois répétitif. Et ça permet aussi d’offrir une riche variété aux clients. « C’est rare que des clients vont arriver et ne rien trouver à leur goût. »
1 commentaire
Ce qu’ils sont bons vos fromages! Je les aime tous, mais mon préféré est le Fleuron. Je les ai connus au marché de Val-David. Et maintenant je les prends aux fermes Lufa ou aux différents marchés de la région. Bravo Ronald!