(Photo : Courtoisie)
Nicolas et son conjoint Félix.

Nicolas Courcy : Discussion sur la non-binarité

Par France Poirier

J’ai eu une belle discussion avec Nicolas Courcy, une personne intervenante au Dispensaire à Saint-Jérôme, au programme 2SLGBTQ1A+. Pour les besoins du texte, nous utilisons l’article iel, puisque Nicolas s’identifie comme une personne non-binaire.

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Nicolas Courcy travaille en intervention sociale depuis 14 ans. Au début, c’était au Centre sida amitié qui est devenu le Dispensaire. Iel a atterri à cette ressource par accident. C’était son 14e choix de stage. « Finalement j’ai aimé ça. Il n’y avait pas de services pour animer la clientèle de la diversité », raconte-t-iel. Après avoir occupé différents postes, son patron lui a proposé d’offrir des services à la clientèle homosexuelle pour parler de prévention. Puis la clientèle s’est élargie. « On offre des groupes, des services, de l’accompagnement. Dans les premières années, c’était beaucoup des personnes bisexuelles, gaies ou lesbiennes. Tranquillement, ça s’est transformé vers les personnes trans et non-binaires pour obtenir des services, ce qu’il n’y avait pas dans les Laurentides. Ils devaient se rendre à Montréal pour obtenir ces services », nous explique Nicolas.

C’est quoi la réalité en région pour une personne issue de la diversité ?

« Ça s’est beaucoup amélioré, mais dernièrement, on fait face à un recul au niveau de la tolérance. J’ai des problèmes dans les écoles avec les jeunes, il y a beaucoup de haine. On dirait que les gens ne veulent plus entendre parler de la diversité. Il y a entre autres le conseil des sages nommé par le gouvernement sur les personnes trans et non-binaires et dans lequel il n’y aucune personne trans ou non-binaire nommée sur ce comité, ce qui ne fait pas de sens », souligne-t-iel.

Iel ajoute que la diversité était sur une belle lancée alors que les choses s’amélioraient, mais dernièrement, il y a une recrudescence de la haine. « J’ai l’impression que dans les dernières années, on retrouve plus de groupes qui sont contestataires et qui affichent plus leurs opinions négatives face à certains groupes. Tout le monde est rendu médecin sur les réseaux sociaux. Ils commentent des situations qu’ils ne connaissent pas ou sur lesquelles ils ne sont pas renseignés », dénonce-t-iel.

Pourquoi doit-on se définir avec une étiquette ?

Selon iel, les étiquettes seront nécessaires jusqu’à temps qu’on n’en ait plus besoin. « Actuellement, on vit une période où les gens vivent de la violence. Ils ont peur d’être eux-mêmes par crainte de subir de la violence dans des espaces publics. D’avoir un mot qui définit ta réalité, c’est une lame à double tranchant. Autant ça peut soulager quelqu’un d’avoir un terme pour se définir, mais ça ne change rien à sa situation. D’avoir un vocabulaire commun, ça permet de mieux communiquer les choses. De mettre des mots pour exister, c’est super important parce que ça donne le la validité à un vécu », explique Nicolas.

« Par exemple, moi, je suis une personne non-binaire. Toute ma vie j’ai été dans une game de ping-pong. Est-ce que je suis un gars ? Non. Est-ce que je suis une fille ? Non. Ç’a été un va-et-vient jusqu’à temps que j’entende parler de non-binarité et que je comprenne que c’était ce qui me définissait. Je me suis identifié au début comme une personne homosexuelle parce que je ne connaissais pas la non-binarité. J’ai pu mettre un mot sur ce que je vivais, mais ç’a été un long processus », explique-t-iel.

Ça fait environ 7 ans qu’iel a réalisé sa non-binarité et ç’a été un choc. Nicolas était à l’envers et ne comprenait plus ce qui se passait. Ç’a pris du temps pour en parler à son entourage, même à son conjoint de l’époque. Ç’a pris environ un an avant de se dévoiler. « Je n’ai jamais été à l’aise avec ma masculinité, et ma féminité a toujours été un point de vulnérabilité dans ma vie. Lorsque je vivais de la transphobie, de l’homophobie, c’était à cause de cette féminité », souligne Nicolas. Iel a apprivoisé cette partie d’iel et s’est assumée comme personne non-binaire.

Sa mère lui disait, quand iel était jeune : ce n’est pas ce que tu as l’air, c’est ce que tu as en dedans.

« Je n’ai pas besoin que les gens comprennent ma réalité, mais j’ai besoin que les gens respectent ma réalité. On a des mots qui ne sont pas genrés. On peut les utiliser quand on ne connaît pas la réalité de la personne, sans prendre pour acquis », ajoute Nicolas.

En couple avec un homme trans

Nicolas est en couple avec Félix depuis 2 ans 1/2, un homme trans qui a eu des enfants et qui les a portés en tant que femme. « Ses enfants ont 22 et 19 ans. Il pourrait ne pas parler de sa situation, mais il veut faire avancer les choses. Pour la première fois de ma vie, je suis avec quelqu’un qui m’a connu et aimé pour qui iel était vraiment. Il est tombé en amour pour qui j’étais vraiment. Ç’a changé ma vie », soutient Nicolas.

« L’amour est trop beau pour rester dans le placard. »

  • Nicolas Courcy, personne non-binaire

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