La dame
Par Rédaction
La chronique à Mimi
par Mimi Legault
mimilego@cgocable.ca
C’était une journée splendide, l’hiver croustillait sous mes pas. Le soleil et moi étions de la même humeur. Je suis entrée à la banque en même temps qu’une autre dame dont la figure burinée, les vêtements usés et même la démarche démontraient que la vie ne l’avait pas gâtée.
J’aimerais savoir, dit-elle à la caissière, s’il me reste au moins dix dollars dans mon compte. Quelques secondes suffirent pour lui confirmer ce qu’elle craignait : on lui fit signe que non. La dame est repartie le pas lent et le dos légèrement plus courbé.
J’étais sidérée par cette pauvreté. Pourtant, je suis bien au courant qu’elle existe mais des fois, il faut simplement que la vie vienne te le dire d’une façon plus personnelle. Soudain, il faisait moins beau. Du coup, la misère avait un visage.
Un souvenir impérissable
J’avais à peine quatre ans. Chaque soir, ma mère me faisait faire ma prière et en terminant, elle me disait d’avoir une pensée pour la petite fille de Toronto qui était pauvre comme Job et de remercier le p’tit Jésus pour vivre dans un milieu relativement aisé. Vous dire l’ardeur que j’y ai mise! Je voulais qu’elle vienne demeurer avec nous. Avec le temps, j’ai compris que cette parabole de ma mère ne visait qu’à développer chez ses enfants la reconnaissance et la générosité.
Je vous parle ici de justice sociale, de transferts de budgets pour des familles dans le besoin, de crédits d’impôts pour l’un et d’augmentation de taxes pour l’autre au ventre plein.
De cette abondance de richesses chez les uns et de ce manque de vivres chez le citoyen mal nanti qui tire le diable par la queue. Donald Trump nous casse les oreilles depuis des mois avec l’érection de son maudit mur à la con.
Mais des murs, il y en a partout autour de nous dont celui qui sépare le riche du pauvre.
Le souvenir de la dame me hante encore. Je la reconnaîtrais entre mille. Même que je me suis demandé si finalement, ce n’était pas la petite fille de Toronto qui avait vieilli…
Le riche et le pauvre
Prenons comme exemple la Guignolée. Ça nous fait une belle jambe. On donne un sac de provisions le matin et le soir même, on mange une fondue avec des amis ou on va faire la file pour s’acheter d’onéreux billets au Centre Bell. Puis, on oublie. Notre « conscience élastique » dort tranquille.
À ce propos, c’est l’histoire d’un homme riche, plein aux as jusqu’à l’arrière glotte, qui se promène dans sa rutilante Rolls-Royce.
Il aperçoit un sans-abri sur le trottoir qui quête sa vie, le bras et le cœur tendus. Il demande à son chauffeur d’arrêter et décide d’aller à sa rencontre.
Les voilà qui marchent côte à côte comme deux vieux amis. Au bout de quelques minutes, l’homme riche lui demande sur un ton agacé quel est ce bruit qu’il entend : clic clac, clic clac.
Le pauvre homme lui répond que l’une de ses chaussures a pris l’eau dernièrement et que la semelle s’est décollée, qu’il n’a pas assez d’argent pour s’offrir une autre paire de souliers. Ému, l’homme fouille dans ses poches, en retire une liasse épaisse de billets de banque entourés par un élastique. Élastique qu’il remet au pauvre en lui disant : prends-le, je te le donne, j’ai réglé ton problème…
C’est bien pour dire, comme le dit cette pensée, il y a des gens tellement pauvres que tout ce qu’ils possèdent, c’est de l’argent. Clic clac, clic clac….