Une seconde chance
Par Mimi Legault
Une simple anecdote m’a frappée l’autre jour dans un supermarché. Un petit garçon s’est arrêté devant un étalage de fruits et sans perdre un instant, il s’est mit à s’empiffrer de raisins rouges. Il n’y avait aucun parent en vue, seule une jeune employée assistait impuissante à la scène. Soudain, sa mère se pointe, regarde son fils avec horreur et s’écrie : Félix, veux-tu bien manger plus lentement?
Vous le voyez le problème? Ça s’appelle viser le blanc et tuer le noir. Je parle ici du canard juste au cas où je serais mal interprétée. Je pense sincèrement qu’il faudrait aujourd’hui un cours 101 à certains parents. Ils font leur possible, j’en suis certaine. Mais…
Un jour à l’école, trois élèves de 1re année, pendant le temps de la récré, décidèrent de sortir de la cour pour aller s’acheter des bonbons au dépanneur. Heureusement, leur prof les vit revenir et appela chacun des parents pour leur raconter le fait. Résultat?
Trois réactions parentales différentes. Le premier parent décida de confisquer le vélo de son jeune pendant une semaine. Le second accusa les deux autres amis de mal influencer son petit nenfant-doudou et le dernier s’est assis avec son rejeton pour lui parler des fâcheuses conséquences qui auraient pu se produire.
Personnellement, j’ai eu une éducation avant-gardiste, dans ce sens que l’on recevait une punition à la deuxième offense. Un jour, Jean-Jean et moi avions trouvé un gros chien d’une saleté repoussante. Nous avions décidé de le laver dans la salle de bain, chez moi. Je ne vous décrirai pas la scène; j’ai seulement souvenance d’avoir vu ma mère pleurer devant tout ce dégât. Entre autres, la queue du chien avait fait voler en éclats sa collection de vernis à ongles. À peu près 32 bouteilles… Est-ce que j’ai été punie? Non. Mes parents sont partis du fait que notre intention était bonne. Ils se sont assis avec moi et m’ont expliqué le comment du pourquoi. Mais si j’avais récidivé, alors là, une bonne punition aurait frappé à ma porte.
Même chose lors d’une grosse tempête de neige, lorsque Jean-Jean et moi avions jeté derrière la souffleuse municipale, qui était passée dans la rue, un vieil habit de neige imbibé de ketchup (pour faire croire à du sang…). Le chauffeur était descendu de son camion avec une main sur la poitrine croyant qu’il venait de faucher un gamin. Mon père avait pensé que le gars avait un arrêt cardiaque. Aucune punition mais un solide face-à-face avec mes parents pour m’expliquer l’ampleur de notre niaiserie.
Est-ce que cela a fait de moi une enfant-roi? Pas du tout. On m’expliquait et si plus tard, je recommençais, j’étais invitée à me retirer dans ma chambre tout en ayant droit à une bonne explication entre quatre yeux. Jamais une seule petite tape de leur part. Jamais. Mais je me suis fait dire NON maintes fois, j’ai appris à attendre mon tour; je terminais ce que je commençais.
J’ai été avertie que le fait de reconnaître mes torts ne me faisait pas mourir. Que ce n’était pas une bonne idée de tirer les tresses de ma petite sœur. Mentir à mes parents était la dernière chose à faire. Ils finissaient toujours par connaître la vérité.
Si je vous cause de ça, c’est parce que durant les deux dernières années, notre patience s’est quelque peu effritée. Avec raison. Maintenant que la lumière se pointe au bout du tunnel ( n’est-ce pas monsieur Legault? ), gardez-vous une petite gêne côté tolérance avec vos petits et même vos grands. Nous sortons de cette pandémie amochés dans l’âme et meurtris dans le corps et le cœur.
Lorsque je suis devenue mère à mon tour, ma mère n’avait qu’un souhait : que l’un de mes enfants m’en fasse baver comme je l’ai fait toute jeune.
Son souhait a été réalisé. Chaque fois que mon enfant m’en faisait voir de toutes les couleurs, je repensais à mes bons parents patients et remplis d’amour. Ça ne m’empêche pas de faire le vœu que si un jour, il avait un enfant, il ressemblera et à mamie et à fiston…