Champlain et le plan Nord
Par Rédaction
Dans les écrits qu’il adressa à la Chambre de commerce parisienne à l’automne 1618, Samuel de Champlain dressait un portrait saisissant des ressources naturelles et du potentiel économique de la Nouvelle-France. Il le fit car la situation était désespérée.
Après seize ans de présence française en Amérique, Champlain n’avait eu que peu d’appui.
Il avait donc grand besoin d’aide pour établir une colonie permanente.
Dans son Mémoire il décrit les possibilités de revenus de la Nouvelle-France telles que la pêche à la morue, au saumon, à l’esturgeon, au hareng et à la sardine, à l’anguille, la mise sur pied d’une industrie baleinière pour les huiles.
Puis la richesse des forêts qui sont «d’une hauteur émerveillable» dont on pourrait faire de bons vaisseaux. Champlain avait rapporté en France quelques échantillons de chêne scié, excellent «pour fenestrage et lambris»,de pin blanc pour la fabrication des mâts, des conifères d’essences diverses et d’autres arbres pour la fabrication de la potasse. Il mentionne évidemment la traite des fourrures: castors, orignaux, cerfs, loups, puis souligne la fécondité du sol et les nombreux arbres fruitiers.
Il mentionna aussi les mines qui, si elles ne contenaient pas d’or, demeuraient riches en fer, cuivre et autres minerais et il mentionna aussi des carrières où se trouvaient des pierres de grandes qualités.
Son appel fut écouté et la Chambre de commerce lui accorda tout son soutien et ses officiers adressèrent une lettre d’appui chaleureuse au roi Louis XIII pour qu’il offre les moyens à Champlain d’établir trois cents familles en Nouvelle-France, ce qui fut fait. Si Champlain connaissait le potentiel économique de la Nouvelle-France c’était en partie grâce à ses relations avec les Amérindiens.
Ainsi alors qu’il finissait de cartographier le Saguenay il avait voulu en apprendre davantage et espérait remonter la rivière jusqu’à sa source. Mais ses alliés montagnais lui firent savoir en termes peu équivoques qu’il ne devait pas s’aventurer plus loin. Les Montagnais étaient les intermédiaires d’un lucratif
commerce de fourrures, acquérant les
épaisses peaux subarctiques des nations que Champlain nomme les Péribonkas et les Mistassinis. Les Montagnais leur achetaient leurs fourrures et les revendaient aux Européens et aux autres nations amérindiennes à Tadoussac.
Ce commerce était leur source de revenus la plus importante, et ils interdisaient aux autres trafiquants qu’ils soient amérindiens ou européens, de remonter le Saguenay sous peine de mort.
Champlain évita de mécontenter les Montagnais à ce sujet.
Toujours il sut gagner l’estime des amérindiens en reconnaissant leurs intérêts vitaux et en respectant leurs exigences. Les Montagnais comprenaient aussi son intérêt pour le Saguenay et acceptèrent de lui décrire l’arrière-pays. Dans ses explorations Champlain s’assurait toujours les concours des amérindiens, en retour ceux-ci lui furent toujours fidèles, le reconnaissant comme un père.
Tiens j’apprends que: «Le Plan Nord exclut plus de Premières Nations qu’il n’en inclut selon le Secrétariat de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador alors que Jean Charest fait la promotion de ce plan en Europe en rappelant l’importance de travailler avec les Premières Nations…» J’apprends aussi que selon une étude du Mouvement Desjardins, qu’elle émet des réserves prudentes sur les redevances du Plan Nord: «Cette étude laisse entendre que les retombées attendues du Plan Nord ne contribueront pas de façon significative à l’amélioration des finances publiques surtout si l’on tient compte des investissements publics importants nécessaires à sa réalisation.»
Champlain un découvreur, cartographe de génie, navigateur hors pair, qui pendant trente ans a sillonné un territoire que se partage aujourd’hui six provinces canadiennes et cinq États américains.
Champlain avait lui aussi un Plan Nord,un grand dessein pour la France en Amérique.
Né dans un pays ravagé par les guerres de religion il a prêché la tolérance envers les protestants.
Il a encouragé les mariages entre amérindiens et colons. Il a inlassablement tenté de maintenir la paix entre les nations amérindiennes, mais il a su quand prendre les armes lorsque nécessaire pour imposer un équilibre politique juste. Il a été un visionnaire, un humaniste si on le compare à ses contemporains espagnols ou anglais assassins et prédateurs.
Mais il a surtout été un homme avec une qualité absente chez bon nombre de nos chefs politiques contemporains: «Un bon chef écrivait-il doit surtout tenir sa parole surtout s’il a fait bonne composition, car celui qui ne la tient pas est réputé lâche de courage, perd son honneur et sa réputation quelque vaillant qu’il soit.»
Pour en savoir plus: Peut-être le plus grand livre d’histoire du Québec, de l’historien américain David Hackett Fisher, prix Pulitzer, traduit de l’anglais par Daniel Poliquin «Le rêve de Champlain» chez Boréal, 998 pages.