Les puristes à gogo
Par claude-andre
SOUS LE SOLEIL EXACTEMENT: une nouvelle chronique offerte par Accès, estivale et ludique.
Un regard incongru sur des réalités bancales… Suivez les pérégrinations estivales de Claude André!
– Hey Claude, on vas-tu voir le match du Brésil?
– Mets-en, je suis full Brésil. Avec leur jeu d’artistes pis les babes qui se dandinent le popotin à chaque but, c’est trippant en tab…
– Sti, que t’es cliché man! T’as lu le texte de Foglia? Il disait que le Mondial c’est le festival du con et des clichés et que de nombreux journalistes prennent pour l’Italie juste parce qu’ils aiment la pizza ou ont nommé leur chien Gino. Il ajoutait que, d’entre tous, les fans du Brésil sont les pires. Pis l’autre là, Cassivi, il a dit lui qu’il a peur de la folklorisation du foot. Tu ne serais pas un peu quétaine mon Claude?
Tous les 4 ans c’est pareil. Moi qui ne regarde les matchs de foot pendant la coupe d’Europe ou le Mondial, je me sens un peu imposteur. Et j’ai un peu honte cette année, j’en conviens, d’enfiler mon t-shirt vintage aux couleurs de l’équipe brésilienne.
Comme je me sens un peu tarte, surtout depuis qu’on sait fait sodo avec l’échange d’Halak, d’avoir acheté un chandail du CH à ma gamine. Et pourtant j’écoute le hockey que lorsque les Glorieux font les séries.
En fait, quand je lis l’accent orné d’orgueil de certains chroniqueurs, je me demande s’il faut posséder un passeport estampillé Grande Botte pour jouer le jeu et prendre pour la Sqadra Azzura? Ou se droit n’est-il conféré qu’aux seuls Italiens de la première et seconde vague d’immigration?
J’ai un peu peur aussi pour mon pote Joao: bien que Brésilien, il vit ici depuis un moment alors peut-être a-t-il perdu le privilège d’appuyer l’équipe de son enfance?
Ce qui est désolant chez les puristes à gogo, c’est cette propension à croire qu’ils sont les seuls dépositaires de la légitimité à posséder une opinion sur le foot. Comme si ils nous disaient: «Vous avec le hockey, faque vos yeules, ça c’est à nous autres!». En méprisant au passage ce petit peuple dont ils se réclament pourtant vu qu’ils sont de gauche.
Me font peur aussi parce que si on suit leur façon de penser, il faudrait être une femme pour parler de la condition des féminine ou un Black pour questionner le profilage racial? Brrrr.
En tout cas, je ne bouderai certes pas mon plaisir et continuerai à balancer des high five aux inconnus qui arborent du Brésil et reluquerai encore le cul bombé des brésiliennes en goguette pendant les matchs qui se trémousse après chaque but.
Et basta la folklorisation!
En ces temps de la globalisation effrénée, la soi-disant folklorisation n’est-elle pas le dernier rempart contre la «standardisation qui aplatit le monde», comme dirait l’ex président et écrivain tchèque Vaclav Havel?
N’est-ce pas ces identités nationales qui nous préservent de l’aseptisation globale?
Let’s go Brésil, stie!