La toune de l’été

Par Jean-Patrice Desjardins

Le concept m’a toujours énervé, car je trouve que c’est parfois une tactique de placement publicitaire pour les stations de radio. Mais il faut avouer qu’une fois la crème solaire et les gougounes de plage rangées et septembre revenu, il nous reste toujours un air musical en tête. Une chanson qui reste accrochée à un souvenir. C’est inévitable, les scientifiques appellent cela la « mémoire émotionnelle ». Notre cerveau associe un événement à une odeur, un goût, une image ou, dans le cas qui nous intéresse, à une chanson.
Avant de vous dire quelle chanson s’enligne pour être ma toune de l’été, j’ai demandé aux lecteurs d’Accès (dont je ne donnerai que le prénom, mais que je remercie en passant) de fouiller dans leur mémoire et de me donner quelques exemples.
Nancy trouve son choix « kitsch au possible », mais se souvient de 1993 comme l’été de Ça va bien de la chanteuse Kathleen. Elle associe l’air au camping en famille avec ses oncles et tantes au parc du Mont-Tremblant. Elle n’avait que 14 ans (est-ce une excuse valable?).
Simon n’avait pas 10 ans en 1983, mais se rappelle Sunshine Reggae du groupe Laid Back. « Leur fameux vidéoclip jouait souvent et on les voyait sortir de l’eau avec un effet reverse. »
Julie terminait son secondaire 4 en 1988 et traînait des compilations sur cassette dans son Walkman jaune. Durant le trajet en bus de Laval à Montréal, elle écoutait What I Am d’Edie Brickell and the new Bohemians, Like a rolling stone de Bob Dylan, Summer of 69 de Bryan Adams, Fast car de Tracy Chapman, Never let me down again de Depeche Mode, Beds are burning de Midnight Oil, Love bites de Def Leppard et (non, c’est mortel!) Never gonna give you up de Rick Asley.
Nadia cite Don’t get me wrong des Pretenders. Nous sommes en juin 86 ou 87 et c’est ce qui jouait dans ses oreilles lors d’un voyage de classe en bus jaune vers Ottawa. « J’étais en amour avec le gars assis sur le siège en avant de moi et j’avais réussi à lui soutirer un baiser durant le voyage! »
Marco parle de Under The bridge de Red Hot Chili Pepper. C’était à l’été 1991 et il était moniteur dans un camp de vacances. Il y a rencontré la mère de son fils, qui est majeur aujourd’hui… et aime probablement le même groupe que son père!
Tanaïs me sort Red red wine de UB40. « Instinctivement, je trouve qu’il n’y a pas une toune qui dégage plus l’été et les vacances. Aussi, au dernier jour de l’année scolaire au primaire à Val-David, on faisait jouer C’est le temps des vacances de Pierre Lalonde. »
Josée est au bord de la piscine en 1982, apprivoisant son adolescence en frenchant en bikini et en partageant ses premières bières au son de Safety dance de Men Without Hats.
Nathalie vous amène ailleurs avec Soleil, soleil de Nana Mouskouri, que sa mère chantait tout le temps quand elle avait 10 ans. Elle confirme que La Macarena jouait partout en France en 1993.
Valérie associe la chanson Les deux printemps de Daniel Bélanger à son arrivée dans les Laurentides en 1996. « Je suis maman depuis peu, on quitte Montréal, remplis d’espoir et de promesse. » Depuis, ses quatre enfants sont « la plus belle saison de ma vie »!
Pour Henri, c’est en juillet 1967 que ça se passe. All you need is love des Beatles est transmis par satellite à la télé. « Même si je n’avais que 12 ans, je sentais qu’il s’était passé quelque chose d’important. »
Pour Chantale, c’est Africa de Toto qu’elle avait enregistrée avec son magnétophone à partir de la radio. « Bien sûr, il me manquait les premières secondes, c’était monnaie courante sur ces enregistrements. »
On voit que les raisons sont multiples de consacrer un air comme toune de l’été. Pour ma part, j’aurais pu vous citer Owner of a lonely heart (Yes en 1984) ou Why can’t this be love (Van Halen en 1986), mais l’été 2016 a été marqué par l’écoute d’une chanson toute simple et naïve. Le duo de Louis-Philippe Gingras et La Bronze avec Parc à chiens est un hymne au laisser-aller propre à la canicule. Un texte savoureux, une mélodie accrocheuse, prenez le temps de l’écouter : vimeo.com/176341580

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