Broyer du blanc
Par Josée Pilotte
Personnellement, je trouve qu’il y a tellement de chroniqueurs qui commentent l’actualité chaque jour que je me demande pourquoi diable je m’impose cette torture mentale en ajoutant une couche – déjà très épaisse – sur l’opinion publique. Sûrement pour faire comme tout le monde, vous allez me dire, soit avoir une opinion sur tout et rien. Vous avez probablement raison pour ça aussi.
En parcourant l’actualité, j’ai été une fois de plus déprimée par ce que je lisais, ce que j’apprenais. Non mais, y’en as-tu des mauvaises nouvelles ou y’en a pas?
J’avais le choix cette semaine dans l’actualité entre les agressions sexuelles présumées d’un entraîneur de ski envers de jeunes athlètes âgés entre 12 et 18 ans. Une histoire sordide de plus. Et, outre le fait qu’il y ait eu des présumées victimes, on peut certainement déplorer qu’il existe une loi du silence dans ce genre d’affaires (qui ne devrait pas avoir lieu, on s’entend), qui est franchement dégueulasse.
Sinon, il y a eu notre cher député de Saint-Jérôme, Mister PKP qui a fait encore parler de lui la semaine passée. Certains diront qu’il s’est encore mis les pieds dans la bouche. Moi je dirais qu’il est plutôt fidèle à son personnage. Et son personnage ne «fitte» pas avec le politiquement correct de la «langue de bois». Son Twitt sur la vente des quotidiens Gesca à Martin Cauchon (Groupe Capitales Médias) n’était pas digne d’un futur premier ministre qui en plus est pour le maintien des sièges sociaux et des capitaux dans le giron québécois. Et son autre sortie sur les immigrés qui ne votent pas pour le Parti québécois était très malhabile de sa part. Bref: moi qui avais une pincée d’attente pour qu’il amène un vent de fraÎcheur sur un monde politique sentant la boule à mite; je suis pour l’instant très déçue de ses performances. Voilà, c’est dit.
Autre sujet terrifiant: l’attentat en Tunisie. J’avoue ne plus comprendre l’être humain et toute cette haine qui ne fait que prendre de l’ampleur au nom d’une idéologie barbare.
Difficile de ne pas y penser et de réfléchir sur le sujet. Notre sécurité est fragilisée et ce partout ou presque sur le globe.
Et de savoir que des jeunes de chez nous sont partis en Syrie sans que nous n’ayons été capables de les empêcher d’aller faire le mal, n’est en rien réconfortant. Qu’est-ce qui nous garantit que ces filets vont nous protéger des représailles de l’intérieur? Rien. Tout ça me donne des frissons.
Déprimant vous dites? Pourtant, j’ai lu aussi quelque part que le premier ministre indien, Narendra Modi a nommé un ministre du Yoga et d’Ayurveda. Profitant d’un large remaniement gouvernemental, il a érigé sa passion en ministère dédié à cette discipline. Il s’est même illustré devant l’ONU, avec le projet d’instaurer une journée mondiale du yoga. «Il ne s’agit pas de faire de l’exercice dit-il, mais de découvrir le sens de l’harmonie avec soi-même, le monde et la nature», a-t- il déclaré. J’avoue que ça me plaît beaucoup comme philosophie de gouverner.
Ce premier ministre indien est inspirant. Sur papier du moins. Notez ma pointe de cynisme. N’empêche, j’essaie au travers de mon journal de montrer le beau à travers ce brouillard média- tique. Et à être conséquente avec mes valeurs et mes convictions.
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Parlant d’être conséquent, j’ai une anecdote à vous raconter.
J’ai discuté la semaine dernière avec un «ancien client» qui me disait avoir coupé complètement la télé, radio, journaux de sa vie. Détox totale du monde média- tique. Attitude admirable si elle est conséquente. Sauf que l’ancien client qui a «dépluggé» des médias, est «pluggé» chez mon compétiteur. Je m’évertue alors à lui faire comprendre que tant qu’à faire, autant le faire avec un journal qui fait la différence. Loin de moi de juger son choix, mais plutôt de questionner son raisonnement. On est tous pour la vertu, mais quand vient le temps de l’appliquer, il n’y a plus personne!
Je peux comprendre la prémisse de sa décision de se débrancher des médias parce qu’il est vrai que ceux-ci contribuent souvent à nourrir le cynisme ambiant. Je l’admets.
Mais il existe une presse qui met en lumière les vrais enjeux de notre société. On a beau vouloir se déconnecter du monde, il n’en reste pas moins qu’on a les deux pieds dedans.
Et oui, j’avoue que le glissement vers l’information spectacle (comme l’«Affaire Joël Legendre») souvent plus payante que les bonnes nouvelles ou des enjeux de société moins sexy, finissent par nous faire décrocher.
Au fond, qu’est-ce qui ne marche pas dans notre monde? On blâme les médias de présenter tant de mauvaises nouvelles. Mais en même temps, les gens s’en abreuvent et en redemandent. Qu’est-ce qui ne marche pas dans notre monde? Quand nos bottines ne suivent pas nos babines?
Bien que notre monde médiatique présente souvent une face sombre de notre société, il existe des journaux, portés d’espoirs, qui osent penser faire la différence. Humblement. Telle une fleur qui pousse à travers les craques de l’asphalte.