«Don’t shoot the messenger»
Par Josée Pilotte
C’est fou comme on condamne facilement!
Après avoir écouté l’entrevue au 98,5 Fm de Benoît Dutrizac avec la journaliste Isabelle Hachey au sujet de l’affaire Bugingo, j’étais estomaquée de lire tous les commentaires sur les réseaux sociaux traitant Dutrizac de tous les noms.
Il était vraisemblablement bouleversé d’apprendre qu’il a peut-être été lui-même victime d’un imposteur pendant plusieurs années, il essayait à mon avis (peut-être) maladroitement d’apporter quelques nuances au débat et aux condamnations dans son entrevue.
Peut-on attendre d’avoir la version de Bugingo avant de le fusiller sur la place publique? J’ai bien peur que non. Nous ne sommes donc pas impartial, notre jugement est teinté par une seule version des faits, qui se base sur un seul côté de la médaille.
Contrairement à certains commentaires que j’ai lus sur la page Facebook, je trouve que Dutrizac a mis ses gants blancs lors de son entrevue avec Isabelle Hachey. Il ne remet en aucun cas son intégrité ni le sérieux de son travail, au contraire. Il ne fait que douter, sans doute sous l’effet du choc, comme nous tous d’ailleurs. Il espère que tout ceci n’est qu’un cauchemar… Il a la chienne quoi! La chienne de s’être fait berné durant toutes ces années et de n’avoir rien vu?
Qui parmi vous pourrait se vanter dans un contexte semblable ne pas vouloir donner le bénéfice du doute à un ami, mais aussi à un journaliste de renommée internationale?
La question qui me vient à l’esprit est la suivante: sachant que Dutrizac est son ami, sachant que c’est un journaliste polarisant, qui mélange à la fois un certain ton baveux, un brin démagogique et provocateur avec des formules sans grande nuance, était-ce le bon gars pour mener ce genre d’entrevue? Bien sûr que non, et puisqu’à lire les propos de certains blogueurs, facebookeux, et compagnie, visiblement tout le monde est tombé dans le panneau de juger avant de connaître tous les faits.
Parce qu’entre vous et moi, soit que Bugingo est vraiment cave de s’être fait «pogner» les culottes à terre par une de ses pairs, soit il y a des choses qu’on ne sait pas et qui j’espère seront dévoilées un jour.
Ce que je déplore – encore une fois – c’est notre façon de réagir, épidermique, émotive, sans aucun recul. Et avec tellement de jugement et de mépris. Déjà que notre profession n’est pas au mieux de sa forme dans l’opinion publique, coincée dans le classement entre les clichés de politiciens véreux et de garagistes malhonnêtes.
Encore une fois, on est témoin du lynchage public de figures publiques, et ce sans filtre parce que justement elles sont publiques. Tout le monde se croit expert et pense détenir la vérité, derrière son petit écran d’ordinateur.
Si c’est là notre ouverture d’esprit, notre fenêtre sur le monde, alors elle est bien triste cette vision! Ce qui m’est venu spontanément à la suite de cette bombe, est la concentration de la presse qui amène à une marchandisation de l’information, une info de plus en plus spectacle, sans rigueur, sans validation, où tout le monde a son 15 minutes de gloire pour faire son show de boucane, sur toutes les tribunes, où chacun détient la (sa) vérité. Et nous dans tout ça, on se fait gaver de cette info «fastfood». On aime ça et on devient accro. On en redemande. Et pire: on y participe plus que jamais. En quelque part, on a crée des monstres (des Bugingo, des chroniqueurs de ce monde, mythomanes ou non).
Bref, je ne suis pas fan de Dutrizac mais faut quand même pas charrier avec les commentaires que j’ai lus suite à son entrevue, car il a fait sa job de poser des questions – certes avec son style – mais comme disait ma grand-mère: «Don’t shoot the messenger».
*** ***
Élever le niveau
Parlant d’élever le niveau, je suis tombée de haut en apprenant que la Ville de Saint-Sauveur a octroyé un permis à un promoteur pour installer une grue à l’entrée de notre super beau village, pour la période estivale, dans le stationnement du Steak Frites, et ce pour faire vivre une expérience inoubliable: manger un repas gastronomique au sommet de la grue à 50 mètres très exactement, sur une plateforme pouvant recevoir 22 personnes, deux chefs et deux serveurs. Euh’l’gros kit quoi! Et soyez sans crainte chers lecteurs, paraît-il que nous y sommes bien attachés comme dans un manège à la Ronde (sac à vomi en dessous de votre chaise? Non c’est une joke)! Vous aurez ainsi une perspective 360 de la vallée, avec vue imprenable sur notre super beau boulevard Taschereau (Jean-Adam). Pour la bagatelle somme d’une centaine de dollars environ par tête de pipe.
Je n’ai rien contre les promoteurs qui veulent venir faire de la business ici (tiens, ça me rappelle quelqu’un dans un autre dossier). J’en ai contre le fait qu’encore une fois on ne pousse pas la réflexion plus loin.
Nous avons environ 80 restaurants à Saint-Sauveur qui doivent être très, très créatifs par les temps qui courent pour survivre. Certains d’entre eux comptent sur la période estivale pour se remettre à flot. Comment vont-ils prendre la nouvelle qu’un promoteur venu de je ne sais où, débarque avec sa grue à l’entrée de notre village (très charmant comme décor, vous en conviendrez) pour venir profiter des beaux jours et piger dans la masse touristique qui visite notre pittoresque village. Je me pose la question très sérieusement.
D’abord ce promoteur ne paie pas de taxes. Il devra payer 700$ la journée à la Ville de Saint-Sauveur. Il compte venir cinq fois cet été, d’une durée de 4 à 5 jours à chaque fois. Il fait quelques montées de grue par jour, disons à 150$ par tête environ.
Faites le calcul par vous-même.
Je me demande ceci: a t-on consulté les restaurateurs tels que 40 North, Bistro à Vino, Maestro, Marabou, Resto St-Sau pour ne nommer que ceux-là, pour savoir ce qu’ils en pensent?
Pensez-vous vraiment Monsieur le Maire de Saint-Sauveur qu’un tel projet va aider nos commerçants, qui déjà s’auto-digèrent, et mettre Saint-Sauveur sur la map? Vraiment?
Je peux comprendre un tel projet dans une grande ville tel que Montréal, New York, Paris, mais Saint- Sauveur, franchement!
Notre village a besoin qu’on s’occupe de son image. Saint-Sauveur a besoin d’un tissu commercial en santé. Saint-Sauveur a besoin de vision, point!
Et je ne parle pas de l’image qu’on aura à l’entrée de notre village… On est loin de la préservation du cachet architectural et du noyau villageois.
Est-ce qu’on veut vraiment que Saint-Sauveur ressemble à une fête foraine?