Majeur et vacciné
Par Josée Pilotte
18 ans. J’ai peine à y croire. La vie passe tellement vite. Trop même.
La mort du journal Accès a été tant de fois annoncée que l’on ne peut que se surprendre de sa survie après toutes ces années. Et non seulement nous ne sommes pas morts, mais nous sommes fiers d’être bien vivants. D’avoir survécu à la guerre des médias, à la convergence, au numérique et autres guéguerres que j’oublie certainement.
On n’a qu’à regarder les pages de cette édition pour comprendre que le succès d’Accès, c’est avant tout une histoire d’amour entre le journal, ses fidèles lecteurs et sa communauté. Ce lien presque fusionnel explique en grosse partie notre succès.
J’ai appris, au cours de ces 18 ans, que la poche la plus « grosse » et la plus « pleine » n’est pas nécessairement gage de réussite, qu’il faut davantage de passion, de détermination et un brin de génie pour déplacer des montagnes.
La plus grande force de ce journal réside dans sa capacité à s’adapter aux nouveaux défis et à demeurer dans la créativité et à regarder en avant même si cela n’a pas toujours été facile.
Parce qu’entre vous et moi, on en a vu de toutes les couleurs. On a souvent douté et on s’est souvent trompé, mais heureusement, on n’a jamais perdu de vue l’essence même de qui nous sommes et ce que l’on défend depuis 18 ans : la liberté d’expression.
Quand je regarde tout le chemin parcouru, je me dis souvent que ça tient du miracle d’avoir traversé tout ça. Et comme si ce n’était pas assez, on doit aujourd’hui relever le défi du virage numérique. On n’a pas le choix semble-t-il et vouloir y échapper serait à mon avis une grave erreur. La révolution numérique redéfinit le visage des médias conventionnels et nous devons embarquer dans le train coûte que coûte, sinon ça sera la fin pour certains d’entre nous. Et une voix qui s’éteint, c’est une voix en moins pour notre démocratie.
Ces 18 ans sont très significatifs parce que, depuis peu, je suis la seule capitaine à bord du navire Accès. Une grande décision dans ma vie, mais aussi dans celle de ma partenaire, Mary-Josée, qui tenait la barre avec moi depuis le début. On l’a bâti ensemble ce journal et vous pouvez vous imaginer comme on y a cru…
Je lui dis merci de m’avoir permis de continuer sans elle. Je sais pertinemment qu’elle aura toujours Accès tatoué sur le cœur et que même de loin, nous serons liées à tout jamais.
Dix-huit ans, ce fut notre vingtaine, avec tout ce que cela a comporté. Ce fut la naissance de nos kids. Notre trentaine avec un semblant de sérieux, mais qui n’aura pas duré longtemps (on a toujours bien haï ça, se prendre au sérieux). Et notre quarantaine à vouloir réaliser nos rêves respectifs chacune de notre côté. Bref : nous avons vibré ensemble, le temps d’une respiration.
Aujourd’hui, je vais naviguer seule, mais j’ai la chance d’avoir une équipe, des amis et une famille formidables pour m’épauler dans ce nouveau défi. J’entrevois l’avenir avec le sourire. J’essaye en vieillissant de me mettre moins de pression et de me faire confiance. Y’a certaines choses que je peux contrôler, et je vais tout faire pour atteindre mes objectifs, mais y’en a d’autres sur lesquelles je dois apprendre à lâcher prise.
Accès, je vais le tenir à bout de bras tant et aussi longtemps que vous, chers lecteurs et collaborateurs, resterez au rendez-vous. Sans vous, nous ne sommes rien.
Alors, je nous souhaite de vivre longtemps, au moins jusqu’à la retraite – en passant, le gouvernement veut prolonger l’âge de la retraite de 65 à 67 ans – comme nous l’a si gentiment souhaité Réjean Tremblay.
Cet anniversaire est toujours l’occasion de faire une rétrospective et une introspection. Une rétrospective de ce qu’a accompli Accès durant ces 18 dernières années dans le paysage médiatique laurentien : donner une couleur, un ton à l’actualité régionale, mais avec une certaine audace, en dehors des conventions. Nous avons su conserver cette impertinence qui nous a collé à la peau dès le début. Une impertinence qui dérangeait, mais qui nous définissait. Et elle nous a servi de moteur, d’énergie vitale et personne n’aurait réussi à nous faire fermer la gueule. Encore aujourd’hui, il n’est pas rare d’entendre circuler des rumeurs sur une fermeture prochaine de notre journal. Signe que l’on dérange encore un certain establishment local. S’est-on assagi? Non! Mais la guerre des médias et les défis qui en ont découlé nous ont apporté une couche supplémentaire sur notre couenne déjà dure : on appelle ça l’expérience qui rentre et qu’on a eue à la dure!
La rédaction d’Accès, elle, a toujours su marcher dans les pas initiaux de notre mission, soit celle d’offrir une information différente, décalée, éclatée avec cette touche d’impertinence. Parce qu’il n’y a rien de plus insignifiant qu’être banal. Et nous, les bas bruns, on n’aime pas ça! Et notre couleur c’est, entre autres, tous les artisans qui sont venus apporter leur petite touche, chaque semaine, depuis 18 ans.
Je ne peux que conclure en vous remerciant du fond du cœur, vous, chers lecteurs, collaborateurs et partenaires, qui avez cru en nous depuis le début et qui poursuivez l’aventure avec nous, semaine après semaine.
Longue vie à Accès!