Réplique à PKP

Par Josée Pilotte

Monsieur Péladeau,

Merci d’avoir pris le temps de (ne pas) me répondre, par l’intermédiaire de votre vice-présidente exécutive Sun Media pour le Québec, Lyne Robitaille.

Si la célérité avec laquelle vous avez réagi à la lettre que je vous adressais m’a heureusement surprise; il en fut autrement quand je pris connaissance de son contenu… Une immense déconvenue que ces deux pages. Ma réplique sera plus laconique.

J’ai beau lire et relire ce long et vibrant plaidoyer à la défense de Quebecor, je n’y trouve aucune réponse aux questions que je vous adressais; bien au contraire, vous les éludez totalement. Qui ne dit mot consent?

Le fond de la question n’est ni le travail de journalisme de Quebecor dans ses hebdos régionaux, et l’écosystème dont se gargarise Madame Robitaille, que je ne remets nullement en question, ni les «guerres» de territoires que vous voudriez mener… Je suis, moi aussi, une femme d’affaires… et j’aime que vous existiez! Je consomme de l’Empire, j’applaudis à vos réussites internationales, vous contribuez à ma fierté d’être Québécoise. Mais autant je crois que vous avez toute votre raison d’être, autant j’ai la certitude que l’on a le droit, le devoir même, nous aussi d’exister. Et voulez-vous que je vous dise le fond de ma pensée, Monsieur Péladeau?: je pense que la vitalité de vos médias passe par la vitalité des médias en général.

Non, le fond de la question c’est la façon dont vous menez cette guerre, et que j’aimerais que vous preniez le temps de m’expliquer (je vous finance quand même un peu, via la Caisse de dépôt qui détient, je vous le rappelle, 45% de Quebecor Media): comment pouvez-vous «donner» des pages publicitaires à 150 ou 300$ alors qu’elles étaient 1 200$, voire 2 000$ à certains endroits sur le territoire québécois il y a un an à peine? Êtes-vous en train de dire aux annonceurs, qui sont le seul carburant des hebdos régionaux, que vous les avez arnaqués pendant des années?! Bien sûr que non, vous ne les avez pas arnaqués, puisque ces prix étaient justes. Ce sont vos nouveaux prix, destinés uniquement à vous accaparer le marché et occuper seul l’espace médiatique en région, qui sèment un doute sur votre logique d’affaires. Je comprends bien que vous possédez les imprimeries, les réseaux de distribution, les agences de presse, etc… Mais il reste que j’ai beau compter et recompter, calculer et recalculer, je ne vois pas comment vos hebdos peuvent ne pas se creuser des déficits d’opération astronomiques. En fait, j’assimile ces pratiques que vous faites en région à du dumping. Si ce n’est pas le cas: je vous en prie, donnez-moi la recette! Parce que pour l’instant vous risquez de nous forcer à diminuer nos standards; pour l’instant, vous risquez de nous faire mourir. Est-ce bien cela que vous voulez? Pour ma part, je sais que ce n’est pas ce que les gens en région veulent: ils veulent des sources d’information diversifiées, des chiens de garde de la démocratie, des voix pour s’exprimer.

Peut-être viendront-ils l’exprimer, si nous obtenons une Commission parlementaire sur la question de la presse indépendante et sur certaines pratiques commerciales qui la mettent en péril.

Et vous, seriez-vous là?

_Josée Pilotte

Éditrice

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