Toujours plus haut

Par Josée Pilotte

J’ai failli ne plus jamais revenir au journal. Vous auriez été bien en peine, han?! Allez faites-moi plaisir, dites ouiiii! Okay, j’exagère un peu là, je voulais simplement voir votre réaction. Mais n’empêche que parfois la vie est un sport extrême.

C’est exactement cela que nous nous disions justement dimanche dernier dans la forêt lorsque le vent s’est soudainement déchaîné, fouettant notre visage de neige glacée. Pendant quelques minutes nous avons eu l’impression d’être nulle part; le vent sifflait, les grands hêtres craquaient en se balançant au rythme des bourrasques du blizzard, et tout cela rendait la visibilité presque nulle. Après s’être donné de la misère pendant plus de 3h30, on s’est tous regardés en se disant: «Messemble que c’est extrême notre affaire!» Alors qu’on se pétait les bretelles avec notre exploit dominical, v’là-ti pas quelqu’un qui lance: on se calme le pompon, là, avec «l’extrême», on n’est pas en train de monter l’Everest quand même! Peut-être, lui ai-je dit, mais nous ne sommes pas non plus en train de prendre une marche pouet-pouet sur la rue Principale.

Il est vrai qu’aujourd’hui, gravir le Mont Manaslu, courir un marathon, faire un Ironman, pédaler le Canada d’un bout à l’autre est devenu non seulement accessible mais chose courante dans notre société. On carbure désormais à l’adrénaline. Vivre à l’extrême est devenu une nouvelle façon d’être. Nous avons démystifié «l’extrême» en peopolisant ces exploits sportifs qui, de tout temps, étaient accomplis par une certaine élite. Aujourd’hui que tu sois gros, petit, grand ou bien que tu aies 102 ans… sky is the limit.

On dira ce qu’on voudra, mais ces défis sont un produit de notre temps.

Autrefois, il fallait gagner son ciel pour entrer au paradis; aujourd’hui pour atteindre le nirvana, ils faut repousser ses limites à l’extrême. Certains diront que c’est au sommet  des plus hautes montagnes qu’ils se sentent les plus vivants et qu’ils sont au plus proche des Dieux, que c’est à travers l’immensité du défi qu’ils touchent enfin à l’essence même de «qui ils sont».

Nous vivons dans une société individualiste où tout tourne, avouons-le, autour de notre nombril. Nous cherchons alors peut-être à travers le dépassement de soi, un sens à notre existence. Après avoir évacué le sacré de nos vies, aujourd’hui nous cherchons dans cette quête d’adrénaline à remplir le Vide par les sueurs de nos efforts et ainsi mieux s’inscrire dans notre propre Histoire.

Est-ce bien? Ma mère vous dirait que c’est trop, qu’on pousse trop la machine. Moi je vous dirais que c’est à travers mes défis qu’un jour je me suis rencontrée. C’est en sortant de ma zone de confort et en poussant mes limites un peu plus loin que j’ai touché un peu de mon âme.

Mais l’extrême de l’un n’est par forcément celui de l’autre.

Chacun ses défis, chacun ses sommets à atteindre.

Au retour de cette sortie de «backcountry», j’étais fière de moi. Et de retour à la maison, que pensez-vous que j’ai fait?

Je me suis adonnée à mon second sport extrême: celui de m’allonger bien confortablement sur mon sofa, mon bol de pop-corn entre les mains, en regardant la télé!

Comme quoi parfois la vie est vraiment extrême!

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