Les p’tites claques
Par Mimi Legault
Dans un certain pays de l’Europe, par le billet d’un sondage, 32% de femmes et d’hommes ont avoué avoir donné de bonnes claques à leurs enfants. C’est un tiers de la population. Le saviez-vous? Ça doit, je viens juste de vous le dire…Ici, je vise spécifiquement des parents qui claquent leur progéniture régulièrement. Pas de sang qui coule donc pas de violence selon eux c’est juste une tape en arrière de la tête ou des oreilles. Après tout, selon eux, ça ne fait pas mal. Non? La douleur que ça provoque est invisible : ça donne du spleen dans le cœur. Donc un parent sur trois ose lever la main sur un plus petit que lui. La majorité du monde animal n’agit même pas comme l’Humain. On verra deux mâles se battre pour obtenir les faveurs de la femelle, mais cette dernière ne bat pas ses petits, elle les défend!
Au risque de me répéter, je ne parle pas d’enfants battus qui appellent l’aide de la DPJ. Je parle des p’tites claques. Elles sont comme les pizzas. Parfois petites, moyennes, grosses. Ce sont les all dressed qui frappent le plus. Si je vous parle de ça, c’est que la semaine dernière dans un centre d’achats, j’ai vécu un cas qui m’a traumatisée. Je vous raconte. Un homme, une femme et leur fillette de 5- 6 ans. L’enfant marchait en regardant les boutiques. Comme ses parents, d’ailleurs. Jusqu’ici, rien d’illégal. Sauf que l’enfant ne regardait pas où elle allait n’ayant pas les yeux assez grands pour tout voir. À un moment donné, la petite a trébuché contre une dame âgée qui, imaginez-vous dont, marchait également. La dame a fait alors quelques pirouettes dignes de certaines figures du patinage artistique. Même que je lui aurais donné un 9,5! Mais bon, elle est tombée. Sans gravité, elle était déjà debout quelques instants plus tard. Mais au lieu de s’enquérir de l’état de la dame, la mère a frappé sa fillette en lui criant : Peux pas r’garder où tu marches? Une claque en arrière de la tête comme pour dire tiens-toé, ça t’apprendra. Un p’tit coup sec, qui fait avance deux pas en avant, mais un recul de dix dans le cœur. Pas grave, tout l’monde a continué à courir les ventes à un tiers de rabais. Un tiers, ça vous dit quelque chose?
Ce genre de petites « mornifes » ne laissent pas de traces sauf quelques bleus à l’âme. Ça aussi, ça ne se voit pas. J’ai toujours dit qu’élever un enfant, c’est savoir garder les deux mains dans ses poches et se calmer le bollo. Un enfant, ce n’est pas un sac d’entraînement pour la boxe, il n’a pas d’armure! Si vous croyez que j’exagère, demandez à certains profs du primaire. Je devenais un vrai pitt-bull lorsque j’apprenais qu’un de mes élèves avait été tapé par son parent. Qu’est-ce que je pouvais faire? Le pire, c’est que si je montrais trop les crocs, c’est l’enfant qui payait. Je me souviens d’une fois où j’avais remarqué des rougeurs sur le ventre d’un jeune garçon qui se changeait pour un cours d’éducation physique. Après discussion avec le petit, j’avais téléphoné à la mère qui s’était défendue en affirmant ne pas le battre, mais simplement lui donner quelques taloches. Résultat? C’était le temps des Fêtes et au retour à la maison, la mère, pour le punir d’avoir parlé, lui avait dit de choisir deux cadeaux au bas du sapin et d’aller lui-même les jeter à la poubelle. Il avait ensuite passé le week-end entier dans sa chambre. Le lundi, lorsqu’il était revenu en classe, l’enfant m’avait dit : je préfère les claques, ça dure moins longtemps…
L’enfant tapoché n’oublie pas. Il comprend qu’il peut manger des claques, il sait désormais que ça donne des caries à l’âme. Si mon texte peut toucher un seul adulte qui pose ce genre de geste, ma chronique n’aura pas été vaine.