Parlons argent

Par Mimi Legault

C’est paradoxal : si les gens arrêtaient de consommer même le superflu, ça n’irait pas bien du tout pour l’économie. Mais ô malheur, les biens superflus rendent la vie superflue : le con-sommateur, ce caniche friand de «susucre». Arrêtons-nous un instant et jetons un coup d’œil dans nos armoires, nos garages (je n’en ai même pas…), nos tiroirs. C’est rempli de vêtements qu’on n’a presque pas portés, de gugusses aussi futiles les uns que les autres. Et pourtant, nous sommes bien au courant qu’on n’est jamais privé de ce dont on n’a pas besoin.

Je connais des gens qui, dès qu’ils ont un surplus de sous, se créent des besoins auxquels ils croient fermement. Lorsqu’on racontera nos mémoires, ça commencera par : nous étions pauvres à la maison, mes parents ne possédaient qu’une seule voiture. Mon éducation m’a appris que l’argent était bon ou mauvais dépendant de quelle manière on l’utilisait. L’autre chose que j’ai lue dans l’une des chroniques de Mario Dumont est que si à 20 ans, le jeune adulte déposait à chaque semaine 20,00 $ et qu’il n’y touchait jamais, il aura accumulé à 65 ans la jolie somme de 649 000 $. J’ai annoncé cette bonne nouvelle à deux de mes neveux âgés l’un de 24 ans et l’autre de 21. Le premier m’a annoncé fièrement qu’il avait lu la même chose et qu’il avait déjà commencé; je me suis retournée vers son frère qui, lui, a paru perplexe en me disant : c’est maman qui s’occupe de ça. Voyez ? C’est pour ça qu’il existe des riches et des pauvres.

Prenez les cartes de crédit. Quel fléau dans des mains trop jeunes ou qui gèrent mal leur argent ! Carte de crédit = dette instantanée. Si vous achetez un bien pour 499,99 $, shlick-shlick la carte de crédit. Mais si vous étiez obligé de vous rendre à la banque, d’y retirer le montant, ça ferait plus mal et je pense bien, non j’en suis certaine : vous y songeriez par deux fois. L’argent parle, mais le crédit a de l’écho. L’autre jour une dame confiait à une amie à quel point elle se sentait libre depuis qu’elle payait tous ses achats en espèces. L’autre de répondre : eh bien moi, je n’ai pas les moyens de payer comptant !

J’ai reçu deux bons conseils que je n’ai jamais oubliés. Le premier : n’achète pas tout de suite l’objet convoité et si tu y penses encore trois jours après, tu pourras toujours l’acheter. Le second : si tu décides d’acquérir quelque chose de très cher, assure-toi d’avoir au moins le même montant une fois que ce sera payé. Ce conseil est venu d’un vieux curé qui avait offert 3 000 $ pour l’achat d’une immense terre sur la Rive-Sud. Le proprio exigeait 6 000 $ dans le temps. Comme c’est exactement le montant qu’il possédait à la banque, il lui avait offert la moitié. Il l’avait obtenue. Il est mort riche et… heureux ? Je l’ignore encore. Ce que je sais, c’est que pour protéger ses arrières, il faut mettre des sous de côté pour en avoir devant soi. Autre chose, le gaspillage me donne la nausée. L’autre jour au resto pour le déjeuner, un groupe de jeunes parents se présente. Un des adultes demande un smoothie (pas donné les smooties…). Voyant ce liquide appétissant apparaître sur la table, ils en commandent pour tout l’monde, les petits comme les grands. Quatorze en tout. À leur départ, huit grands verres n’avaient pas été touchés. Cet exemple en est un de surconsommation et de fort mauvais exemple pour cette jeunesse qui pousse. Je ne cours pas après ce genre de faits, ils se présentent tous les jours. Par contre, j’ai entendu une magnifique histoire cette semaine. Une petite fille de 10 ans rêvait de faire des sous. Elle a décidé d’offrir ses services pour laver les fonds de poubelles qui puent tant l’été. Son petit commerce fonctionne, elle a des commandes trois semaines à l’avance !

Je vous l’accorde, l’argent ne fait pas le bonheur, il rendra tout au plus le malheur plus confortable. On peut s’acheter un chien de race, mais seuls l’amour et le bonheur lui feront remuer la queue. De toute façon, riche ou pauvre, chacun a des ennuis différents côté argent. Cette pensée succulente d’Albert Brie : paie à l’Homme de bonne volonté…

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