Avoir 18 ans…
Par Thomas Gallenne
18 ans. L’âge de la majorité. Celui de l’impertinence aussi. Quand on se sent pousser des ailes, prêt à affronter le monde. À le remettre en question, à le mettre au défi! L’énergie vitale compense le manque d’expérience. C’est ce qu’ont vécu les artisans du journal Accès, il y a 18 ans, lorsque Josée et Mary-Josée ont décidé de voler de leurs propres ailes. Cela ne s’est pas fait dans la facilité, tant s’en faut. Mais elles se sont accrochées, ont cassé la baraque et ont traversé les épreuves…
Un. Huit. Deux chiffres après tout. Mais qui en disent long.
18 ans, c’est l’âge des grands questionnements. L’âge des manifestations étudiantes. L’ébauche des premiers projets. L’entrée dans la vie adulte.
Mes 18 ans ont été marqués par une période de rêverie. J’étais installé confortablement dans ma bulle, étudiant et préparant mon bac de français au lycée en France. J’étudiais les poètes maudits. Baudelaire, Rimbaud, Appollinaire. Nous sommes même allés avec ma classe en Rhénanie, région allemande frontalière avec la France, nous imprégner des lieux qui avaient inspiré Guillaume Apollinaire pour son recueil de poèmes Alcool.
Une bulle éclate.
Les grèves étudiantes avaient secoué la France deux ans plus tôt, avec la mort tragique de Malik Oussekine lors d’une manifestation qui avait été réprimée durement par la police.
Mes 18 ans étaient en quelque sorte l’étirement d’une certaine innocence de l’enfance et de l’entrée dans un monde d’adulte, âpre, où chacun doit un peu se battre pour faire sa place.
18 ans, c’est la fin de la décennie des 10 ans, celle de l’enfance, pour entrer de plein pied dans la décennie suivante, celle de l’âge adulte, où l’on se lance dans la vie.
Cette décennie des années 80 avait été marquée par différents bouleversements sociaux, culturels. Nous sortions de ces trente glorieuses avec, disons-le, une légère gueule de bois. Pour la jeune génération qui s’éveillait à la sexualité, ce n’est pas l’amour libre ni l’émancipation sexuelle qui l’attendait comme cela avait été le cas de la génération précédente, hippie, mais plutôt une terrible épidémie : celle du sida. Avec le renforcement du néolibéralisme, l’effondrement de l’Union soviétique et du bloc de l’Est, les crises aux cycles de plus en plus rapprochés… Bref, la fin du party s’annonçait…
Ces 18 dernières années ont été marquées par la bascule vers un nouveau siècle, et la perte d’une certaine innocence. Avec le 11 septembre, c’est l’échiquier géopolitique qui a été revu… et les libertés individuelles en ont pris pour leur grade!
Avec tout cela, avons-nous conservé notre impertinence? Je pense que tant que nous restons critiques sur ce qui nous environne, tant que nous nous questionnons sur notre monde, tant que nous demeurons alertes aux choses qui se passent et tant que nous conservons cette faculté d’indignation, l’esprit de nos 18 ans demeure… Certes, le temps fait son œuvre, mais l’esprit reste… Et avec le cœur aussi…
Accès, impertinent de nature. Pertinent de culture. Certes, Accès, tu acquières aujourd’hui ta majorité, mais ton esprit irrévérencieux demeure, ton impertinence persiste, ne serait-ce qu’en faisant fi des épreuves.
Et comme le dit souvent Josée : « Tant que nous aurons la flamme, nous continuerons à marquer d’un A le paysage médiatique laurentien ».
Longue vie à Accès!