Un homme de patience et d’écoute
Par Valérie Maynard
Directeur général de Piedmont depuis 50 ans
Gilbert Aubin est arrivé à l’hôtel de ville de Piedmont le 5 juin 1967. Cinquante ans et huit maires plus tard, il se prépare à tirer sa révérence. Rencontre avec un homme calme et serein, clairement habité par le sentiment du devoir accompli.
Gilbert Aubin a d’abord été enseignant en mathématiques, à l’école secondaire de Sorel, avant de se tourner vers le municipal. À l’époque, Piedmont comptait trois employés : le secrétaire-trésorier (aujourd’hui directeur général), une secrétaire et un directeur des travaux publics, qu’on appelait contremaître, et qui était aussi directeur du Service de police le week-end. En 1967, la population se chiffrait à un peu moins de 1000 personnes. « On avait un budget annuel de 100 000 $», se remémore-t-il. Aujourd’hui, ce même budget dépasse les sept millions de dollars, pour une population de 4500 personnes.
Homme de patience et d’écoute, deux qualités primordiales pour un directeur général, juge-t-il, M. Aubin s’est toujours fait un devoir, encore aujourd’hui, de sillonner quotidiennement les rues de sa municipalité. « J’ai divisé Piedmont en cinq secteurs. En une semaine, je fais le tour de la municipalité », explique-t-il.
C’est sa façon de constater par lui-même l’état d’une rue ou le bien-fondé d’une plainte citoyenne et de l’adresser aux bonnes personnes. « Je prends des photos et je transmets le tout immédiatement aux Travaux publics. Il faut constamment être proactifs », croit-il.
Le patron, c’est le maire!
Au cours de sa carrière municipale, jamais, assure-t-il, il n’a douté. « J’ai toujours senti que j’étais à la bonne place. » Le secret de sa longévité? S’ajuster à l’administration en place, respecter son maire – « Le patron, c’est le maire! » – et les employés et écouter les citoyens. « J’ai aussi appris à quelques reprises à marcher sur mon orgueil », souffle-t-il, un sourire en coin. Mais ce qu’il a aimé le plus, ajoute-t-il, ce sont ses rencontres avec les citoyens, « jamais routinières ».
Depuis 1967, huit maires se sont succédé à la mairie de Piedmont, le plus coriace étant nul doute Louis J. Clément, en poste de 1977 à 1987. « Lui-même disait qu’il n’avait de clément que son nom. Avec lui, les choses ont pas mal brassé. Il était tellement soupe au lait », évoque M. Aubin. Pendant notre conversation, M. Aubin pointe le tableau derrière lui où figurent tous les maires de Piedmont depuis sa fondation, en 1923. « Vous savez, Piedmont a été la première municipalité au Québec à avoir une femme élue au poste de maire, souligne-t-il, Eileen E. Consiglio, mairesse de 1957 à 1965. »
Depuis l’arrivée de celle qui lui succède désormais à la direction générale, Me Caroline Asselin, le 15 mai dernier, M. Aubin n’a plus de bureau ni même de boîte vocale. Qu’importe. Il se rend au travail tous les matins, comme d’habitude, à 7 h 10, et passe ses journées à finaliser ses dossiers et s’assurer d’une transition en douceur.
Parc Gilbert Aubin
Si plusieurs réalisations piedmontaises portent la signature Gilbert Aubin, l’acquisition de la Réserve Alfred Kelly et plus encore celle du parc des Sablières demeurent les plus significatives. « Gilbert Aubin a été un instrument essentiel à l’acquisition du parc des Sablières. Il a rassemblé tout le conseil municipal autour de ce projet et c’est comme ça qu’on a réussi. C’est lui qui a établi les liens », a fait valoir le maire actuel, Clément Cardin.
Tellement qu’en mai dernier, il a été unanimement résolu par les élus de renommer le parc des Sablières : le parc Gilbert Aubin. Portail, plaque commémorative affichant le nom Gilbert Aubin, plantation de végétaux, tout sera en place d’ici le mois de septembre, assure le maire Cardin, qui fera de cette nouvelle identification son dernier grand projet avant de tirer à son tour sa révérence, en novembre prochain.
Quant à Gilbert Aubin, il quittera officiellement ses fonctions à la fin du mois de juin, bien résolu à vivre une retraite active : voyages, golf, vélo et implication bénévole.
Et parce que Piedmont est gravée dans son cœur depuis si longtemps, et qu’elle le demeurera sans doute pour toujours, il propose de revenir à l’hôtel de ville « deux ou trois jours par mois », sur demande, pour donner un coup de main. « S’ils ont besoin de moi, je viendrai. »